Magouille suspecte
Le 11 juillet 2019
« Pourquoi leur dirait-il nos noms et d’où nous venons ? C’est bien le mystère ! », entend-on dire le personnage de Roshdy Zem. Souci : cette phrase fut probablement aussi son mantra lors de l’écriture de ce film, qui prend soin de ne strictement rien développer, ni ses personnages, ni son intrigue.
- Réalisateur : Roschdy Zem
- Acteurs : Nicolas Duvauchelle, Frédéric Pierrot, Roschdy Zem, Gilles Cohen, Hafsia Herzi, Fred Ulysse, Raphaël Personnaz, Nadia Tereszkiewicz, Arsène Mosca
- Genre : Thriller
- Nationalité : Français
- Distributeur : Mars Distribution
- Durée : 1h32mn
- Date télé : 1er août 2023 00:00
- Chaîne : OCS Pulp
- Date de sortie : 17 juillet 2019
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Résumé : José Nunes et Maxime Charasse sont amis et associés minoritaires dans une entreprise de BTP en difficulté. Devant la nécessité de protéger leurs intérêts, ils prennent une décision radicale et se retrouvent liés par un sombre secret. Alors qu’ils commencent à entrevoir un avenir meilleur, un étrange personnage fait irruption dans leurs vies, leur rappelant que rien ne peut complètement s’effacer.
Critique : Déjà le cinquième film réalisé par Roshdy Zem. Mais celui-ci a la spécificité de laisser apparaître le visage de l’acteur réalisateur sur l’affiche, ce qu’il n’avait plus fait depuis son tout premier long métrage, la rom com Mauvais foi, en 2006. Pourquoi s’est-il attribué l’un des premiers rôles ? L’expérience nous a démontré que voir ainsi un célèbre cinéaste présent des deux côtés de la caméra pouvait être, sinon un excès de nombrilisme, du moins une manière de se montrer dans une performance différente, par rapport aux rôles qui lui sont systématiquement donnés.
Or, on sait que les films dans lesquels a tourné Zem ces dernières années l’ont transformé en un stéréotype du gros dur ténébreux, souvent placé du côté de la loi. Son Persona non grata était donc pour lui une occasion d’apparaître sous un jour différent. Et c’est exactement ce qu’il fait : après une vingtaine de minutes, entièrement consacrées à des Raphaël Personnaz et Nicolas Duvauchelle en sous-régime, Roshdy Zem fait son apparition dans la peau d’un tueur facétieux... parfaitement grotesque. Le malaise que suscite son cabotinage risible est tel que l’on se réjouira de le voir à nouveau cantonné dans des rôles de flics mutiques.
- Copyright 2019 Mars films
Si encore cette prestation odieusement poussive était l’unique souci du film, on pourrait pardonner à Roshdy Zem d’avoir naïvement cru nous dévoiler une facette méconnue de sa palette de jeu. Mais l’outrance du long métrage est le fait de l’ensemble du casting. Dès les premières scènes, il est évident que les acteurs en font le moins possible, persuadés que les dialogues sur-écrits qu’ils récitent feront en sorte d’expliquer tout ce que le public a besoin de savoir. Et tout le film s’étire sur cette idée anti-cinégénique. Qu’il s’agisse du passif des personnages, de leurs relations, des enjeux de l’intrigue et même des actions censées faire avancer celle-ci... Tout nous est artificiellement raconté au travers des bavardages aussi poussifs que superficiels, que s’échangent des acteurs peu investis.
Les magouilles, qui sont à l’origine de l’histoire, sont ainsi traitées avec un semblable manque d’approfondissement que les sujets de la collusion entre l’industrie immobilière et la mafia, ou le drame social lié à l’appropriation de terrains par des promoteurs véreux. Que l’on ne sache strictement rien des personnages caricaturaux empêche automatiquement toute empathie à leur égard. Et donc le simili-suspense qui se met en place dans les dernières minutes n’a strictement aucun impact émotionnel. Et ce n’est certainement la partie plus sentimentale du scénario qui va combler ce déficit d’attachement aux personnages, puisqu’ici, un autre problème, et non des moindres, se pose : la représentation des femmes littéralement limitées aux rôles de la femme au foyer (qui, d’ailleurs, se retrouvent toutes cocues), de la jeune ingénue ou de « la pute ».
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Si encore on avait pu voir le personnage de Hafsia Herzi user de son charme magnétique pour attirer celui de Nicolas Duvauchelle dans son lit, on aurait pu la qualifier de femme fatale, cette figure propre au film noir, puisque c’est ainsi que le réalisateur définit son film. Mais la façon rétrograde -pour ne pas parler de misogynie obséquieuse- dont l’ensemble des personnages féminins sont dépeints, participe au caractère terriblement malsain qui se dégage de cette production bancale, et du manque de références sur lequel s’est nonchalamment construit ce film.
La mise en scène fade, qui n’a comme seule caractéristique que le goût prononcé pour les plans aériens tournés depuis un drone, et la post-production maladroite (dont l’amateurisme est même particulièrement criant lors d’un champ-contrechamp entre Duvauchelle et Frédéric Pierrot, dans lequel il y a autant de coupes que de faux-raccords !) entérinent l’idée que ce long-métrage rate tout ce qu’il entreprend. Il est même difficile de croire que Roshdy Zem ait pu y prendre plaisir, si ce n’est dans une liberté qu’il s’est accordée de pouvoir en faire des caisses. Mais ça n’est certainement pas une raison suffisante pour y consacrer une heure et demie.
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