Peau d’ange

Un homme, une femme. Entre eux, un lien indestructible en même temps qu’impossible. L’histoire d’Angèle et de Grégoire marque les débuts de Vincent Perez comme auteur et réalisateur. Sensible et romantique.

Angèle (Morgane Moré) quitte son village natal pour travailler comme employée de maison dans une ville de province. Son chemin croise par hasard celui de Grégoire (Guillaume Depardieu), une rencontre d’un jour et surtout d’une nuit. Pour Angèle, pure et vierge, ce moment restera à tout jamais ineffaçable, mais Grégoire, lui, n’est que fuite et absence.

Pour son premier long métrage, Vincent Perez a co-écrit avec Karine Silla l’histoire d’Angèle, mi-ange, mi-adolescente, une âme trop pure dans une meute de loups, forte et fragile à la fois. Le film s’ouvre sur une image hautement symbolique et pleine de poésie : Angèle petite fille court dans les herbes hautes jusqu’au sommet d’un talus. Sur sa nuque, elle retient un canard qui tente de s’échapper. On dirait que des ailes lui ont poussé.

Cette première scène donne le ton. Vincent Perez filme avec un lyrisme tout en nuances et en retenues un drame de jeunesse noué sur le thème éternel de la rencontre d’un homme et d’une femme. En même temps, il esquisse un portrait plein de tendresse et donne quelques coups de griffes à une société bourgeoise incapable de comprendre des êtres aussi excessifs qu’Angèle et Grégoire.

Morgane Moré et Guillaume Depardieu incarnent ces deux comètes qui vont dans des directions opposées. Le fossé qui sépare leurs personnages se lit déjà dans leur opposition physique. Elle a le regard bleu azur, prêt à embrasser le monde, lui, énigmatique, dissimule sa fêlure derrière sa carapace. Dans les rôles secondaires, on retrouve des acteurs de premier plan comme Laurent Terzieff et Valeria Bruni-Tedeschi. Un beau casting, inattendu et efficace.

Malgré cela, le titre, le synopsis et les personnages un peu caricaturaux laissaient craindre une fable naïve. C’est pourtant un conte mélancolique que met en scène Vincent Perez, certes plein de tendresse et d’émerveillement, mais qui n’ignore rien d’une réalité souvent cruelle. La douce Angèle passera par la prison, elle connaîtra aussi l’abandon et la bêtise d’un cercle de notables de province.

L’élément le plus surprenant de Peau d’Ange réside sans doute dans la curieuse lumière blanche qui nimbe tout le film. On ne sait plus trop alors si l’on est toujours dans la fable ou si l’on aborde un tout autre registre, celui d’une quête mystique. On découvre ainsi une facette inconnue de Vincent Perez : de Cyrano de Bergerac au Bossu en passant par The Crow et La Reine Margot, on croyait l’acteur fait pour l’action. Son passage à la réalisation nous montre une âme romantique tentée par la contemplation.