Le 9 novembre 2019
Un style épuré et incisif, factuel - peut-être trop -, pour raconter des micro-déséquilibres menant au vacillement inévitable.
- Auteur : Sylvain Prudhomme
- Editeur : Gallimard
- Genre : Roman
- Nationalité : Française
- Prix : Femina
- Date de sortie : 22 août 2019
- Plus d'informations : Le site officiel
- Festival : Rentrée littéraire 2019
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Résumé : « J’ai retrouvé l’autostoppeur dans une petite ville du sud-est de la France, après des années sans penser à lui. Je l’ai retrouvé amoureux, installé, devenu père. Je me suis rappelé tout ce qui m’avait décidé, autrefois, à lui demander de sortir de ma vie. J’ai frappé à sa porte. J’ai rencontré Marie. »
Notre avis : Les phrases sont courtes, elles vont droit au but mais pas vraiment droit au cœur. La plume de Sylvain Prudhomme n’est pas véhicule d’émotions pures, elle est simple, presque simpliste, factuelle – peut être un peu trop. L’autostoppeur et Sacha, le narrateur, ont vécu quelque chose, de cela le lecteur en est certain : oui, mais quoi ? Au fil des pages, il se révèle un ami un peu toxique, une présence étrange qui hante plus les routes que son village, plus les voitures d’inconnus que son propre foyer. Sacha retranscrit les dialogues sans les distinguer de sa narration, sans guillemets et avec une ponctuation minimaliste, points et virgules remplaçant interrogations et exclamations, un moyen sans doute de laisser l’imagination de chacun s’emparer du récit, des sentiments des personnages, de faire une place à tout le monde dans ce roman. Pour certain, la technique fonctionnera, tandis que d’autres resteront en-dehors, à l’extérieur de l’histoire étonnante de cet homme, qui sillonne la France pour savourer une liberté qu’il a pourtant choisie de laisser de côté, en s’engageant avec Marie et en ayant un fils.
Les personnages sont donc à la fois profonds et plats, à la fois complexes et trop simples. La faute sans doute à ce style qui séduit tant (et qui a valu à ce livre le Prix Femina 2019), épuré à l’excès, jalonné d’énumérations, poétique car prosaïque, comme les héros. Les actions ne sont pas retentissantes : chaque mot, chaque phrase apporte une légère variation à ce qui précède, et le récit évolue ainsi, sans à-coup, mais par micro-mouvements, micro-déplacements, micro-déséquilibres, avant que tout ne bascule. Sylvain Prudhomme propose donc de se perdre avec l’autostoppeur, ou plutôt de suivre Sacha, sa vie qui se crée peu à peu à V., sans se douter un seul instant que c’est là qu’a choisi de s’arrêter momentanément l’autostoppeur, simple étape avant de reprendre ses pérégrinations incessantes, ses déambulations, ses rencontres, laissant là Marie et Agustín, seuls et un peu tristes, à chaque fois que l’envie lui en prend, que l’immobilité le plaque au sol et le rend malheureux. L’auteur évoque la chanson de Leonard Cohen, « Famous Blue Raincoat », et son narrateur semble se fondre avec le chanteur pour dire à son ami :
“And what can I tell you my brother, my killer,
What can I possibly say ?
I guess that I miss you, I guess I forgive you
I’m glad you stood in my way.”
(« Et que puis-je te dire mon frère, mon assassin,
Que puis-je bien dire ?
J’imagine que tu me manques, j’imagine que je te pardonne,
Je suis heureux que tu te sois trouvé sur ma route. »)
Par les routes - Sylvain Prudhomme
Gallimard
304 pages
140 x 190 mm
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