Le monstre a échappé à son créateur
Le 26 janvier 2020
La suite de ce qui devait être la réponse à Transformers s’est transformée en ersatz de Transformers... quelque chose s’est perdu en chemin. Un petit quelque chose appelé "liberté artistique". Il en reste une prouesse technique, mais certainement pas scénaristique.
- Réalisateur : Steven S. DeKnight
- Acteurs : Rinko Kikuchi, Charlie Day, John Boyega, Scott Eastwood, Jing Tian, Cailee Spaeny, Burn Gorman
- Genre : Science-fiction, Aventures, Action, Film de monstre
- Nationalité : Américain
- Distributeur : Universal Pictures France
- Durée : 1h51mn
- Date télé : 16 septembre 2024 23:00
- Chaîne : TF1 Séries Films
- Date de sortie : 21 mars 2018
L'a vu
Veut le voir
Résumé : Le conflit planétaire qui oppose les Kaiju, créatures extraterrestres, aux Jaegers, robots géants pilotés par des humains, n’était que la première vague d’une attaque massive contre l’Humanité. Jake Pentecost, un jeune pilote de Jaeger prometteur dont le célèbre père a sacrifié sa vie pour sauver l’Humanité des monstrueux Kaiju a depuis abandonné son entraînement et s’est retrouvé pris dans l’engrenage du milieu criminel. Mais lorsqu’une menace, encore plus irrésistible que la précédente, se répand dans les villes et met le monde à feu et à sang, Jake obtient une dernière chance de perpétuer la légende de son père aux côtés de sa sœur, Mako Mori – qui guide une courageuse génération de pilotes ayant grandi dans l’ombre de la guerre. Alors qu’ils sont en quête de justice pour leurs camarades tombés au combat, leur unique espoir est de s’allier dans un soulèvement général contre la menace des Kaiju. Jake est rejoint par son rival, le talentueux pilote Lambert et par Amara, une hackeuse de Jaeger âgée de 15 ans, les héros du Corps de Défense du Pan Pacific devenant la seule famille qui lui reste. S’alliant pour devenir la plus grande force de défense que la Terre n’ait jamais connue, ils vont paver un chemin vers une extraordinaire nouvelle aventure.
Critique : « Révoltez-vous » nous assigne l’affiche. Certes, mais contre quoi ? S’agit-il d’une révolte contre l’uniformisation des blockbusters hollywoodiens, tel que l’avait voulu Guillermo del Toro en signant le premier Pacific Rim, ou au contraire une révolte contre les idées farfelues d’un auteur excentrique ? Malheureusement, au vu du film de Steven S. DeKnight, la seconde option semble la plus plausible. C’est bien là le drame de toute suite : celui de devoir être comparée au précédent opus. Ici, la différence apparaît dès l’introduction de son personnage principal. Là où del Toro était parvenu à parfaitement s’imprégner de l’esprit japonais des films et mangas dont est issue toute l’imagerie des mechas et des kaijus dans laquelle ont allégrement la saga Transformers et Cloverfield, les transformant en effet de mode à l’américaine, ce second opus s’aligne sur les standards hollywoodiens. L’humour, le rythme, mais aussi la direction artistique de cette suite perdent ainsi toute leur exubérance purement nipponne au profit d’une réalisation plus édulcorée, et d’une écriture plus simple, similaires à celle de la grande majorité des films de genre américains. Non, ce n’est pas une révolte... c’est l’échec d’une révolution.
- Copyright Universal Pictures International France
Le choix par les producteurs d’en confier les rênes à Steven S. DeKnight, novice dans la réalisation de long-métrage mais aguerri dans celui de construire des séries à succès (il a fait ses premiers pas aux côtés de Joss Whedon sur Buffy contre les vampires et a récemment travaillé sur Daredevil), n’est pas anodin. Pacific Rim : Uprising ne cache à aucun moment ses velléités à servir de point de départ à une saga. Et pour cela, il n’hésite pas à se construire de la même manière qu’un long épisode pilote en introduisant ses nouveaux personnages et de nouveaux enjeux. L’originalité du scénario n’est donc évidemment une priorité. L’idée de faire du personnage principal le fils de l’un des héros du premier film, dont le destin est inévitablement de marcher dans ses pas est, par exemple, un élément pour le moins ordinaire, déjà vu dans, notamment, Independence Day : Resurgence, un film auquel il est difficile de ne pas penser en regardant Pacific Rim : Uprising tant leur traitement des éléments préétablis (et leur final) sont similaires, sans pour autant sombrer dans la catastrophe livrée par Roland Emmerich.
Puisqu’il est bien connu qu’un tel blockbuster ne se juge pas sur sa singularité, il serait dommage de rejeter celui-ci. En effet, malgré l’absence de ce qui faisait le charme du premier Pacific Rim, on ne peut pas nier la qualité de ses effets spéciaux. Après avoir subi la déconvenue visuelle de Tom Raider ou Un raccourci dans le Temps, il est bon de voir qu’il reste encore, à Hollywood, quelques techniciens capables d’assurer des incrustations numériques mais aussi un travail de perspective qui les rendent aussi majestueuses que réalistes. Si le film parvient à assumer sa fonction de divertissement, c’est donc essentiellement grâce à ses scènes de combats à grande échelle véritablement impressionnantes, ou du moins bien plus agréables à suivre que celles de Transformers : The Last Knight qui souffraient d’un montage exécrable.
- Copyright Universal Pictures International France
Si l’on arrive à faire l’effort intellectuel de faire abstraction de tout ce que l’on a pu trouver un tant soit peu insolite dans Pacific Rim (le cabotinage de ce bon vieux Ron Perlman en premier), pour accepter un modèle américano-américain, dans tout ce qu’il peut impliquer de plus lourdaud –en particulier dans le montage appuyé de ses soi-disant effets comiques– cette suite reste un film dont on peut dire qu’il "fait le job". Les fans historiques de manga regretteront évidemment de voir l’hommage rendu par del Toro –qui s’imposait alors en saint patron des geeks– transformé en foire au plagiat de quelques références cultes (de Great Mazinger à Neon Genesis Evangelion). Aux yeux du public visé, moins à même de relever ces emprunts, ses réels défauts seraient alors le caractère transparent des personnages secondaires (contrairement à Jake Pentecost, Scott Eastwood n’a définitivement aucune chance de succéder à son cher papa !) ainsi que quelques incohérences minimes, mais rien de rédhibitoire au vu du spectacle qu’il assure.
On notera également que la charte, implicitement érigée par Marvel, interdisant de montrer les victimes collatérales des destructions massives de villes, est soigneusement respectée (hormis un incontournable flashback qui nous rappelle que, selon les codes hollywoodiens, un personnage féminin ne peut être badass qui si elle a un trauma). Preuve que DeKnight, qui semblait jusque-là apprécier une représentation de la violence plus brute, n’a pas eu les coudées franches pour son premier long-métrage. Encore une fois, il est impossible de ne pas considérer Pacific Rim : Uprising comme un pur produit de consommation dépourvu de la moindre personnalité. Si on le prend comme tel, son plus gros défaut serait alors d’espérer profiter d’un effet de mode sur le déclin, car il est peu probable qu’il parvienne à le relancer et ainsi justifier une future franchise juteuse.
- Copyright Universal Pictures International France
Galerie Photos
Votre avis
Pour participer à ce forum, vous devez vous enregistrer au préalable. Merci d’indiquer ci-dessous l’identifiant personnel qui vous a été fourni. Si vous n’êtes pas enregistré, vous devez vous inscrire.
aVoir-aLire.com, dont le contenu est produit bénévolement par une association culturelle à but non lucratif, respecte les droits d’auteur et s’est toujours engagé à être rigoureux sur ce point, dans le respect du travail des artistes que nous cherchons à valoriser. Les photos sont utilisées à des fins illustratives et non dans un but d’exploitation commerciale. Après plusieurs décennies d’existence, des dizaines de milliers d’articles, et une évolution de notre équipe de rédacteurs, mais aussi des droits sur certains clichés repris sur notre plateforme, nous comptons sur la bienveillance et vigilance de chaque lecteur - anonyme, distributeur, attaché de presse, artiste, photographe. Ayez la gentillesse de contacter Frédéric Michel, rédacteur en chef, si certaines photographies ne sont pas ou ne sont plus utilisables, si les crédits doivent être modifiés ou ajoutés. Nous nous engageons à retirer toutes photos litigieuses. Merci pour votre compréhension.