Le 25 juillet 2015
Un biopic trop sage pour cette personnalité hors du commun, mais qui réserve quelques belles surprises.
- Réalisateur : Marco Turco
- Acteurs : Stéphane Freiss, Vittoria Puccini, Vinicio Marchioni
- Genre : Drame, Biopic
- Nationalité : Italien
- Durée : 1h48mn
- Date de sortie : 5 août 2015
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Un biopic trop sage pour cette personnalité hors du commun, mais qui réserve quelques belles surprises.
L’argument : La vie à cent à l’heure d’une journaliste italienne hors norme, des rues de la Dolce Vita de Rome au 11 Septembre à New-York en passant par le Vietnam, la Grèce des colonels ou l’Iran de Khomeiny. Oriana Fallaci a révolutionné le journalisme, elle a sillonné la planète et a rencontré tous ceux qui font l’Histoire. Impertinente, drôle et parfois brutale, elle avait ses amis et ses ennemis. Raconter sa vie revient en quelque sorte à raconter l’histoire du XXe siècle.
Notre avis : Par son principe même, le biopic se heurte à des limites évidentes ; rechercher l’exhaustivité s’avérant impossible, au contraire de ces biographies anglo-saxonnes nourries de faits et de détails, il faut choisir des éléments avec soin tout en gardant une cohérence cinématographique, ne pas verser dans l’hagiographie ni l’accumulation factuelle. Affaire de structure et de parti-pris, donc. En s’attaquant à une personnalité aussi controversée qu’Oriana Fallaci, Marco Turco a curieusement opté pour une mise en images sage et parfois à la limite du cliché. Imaginer qu’une étudiante, double admiratif de la journaliste, l’aide à classer ses papiers et justifie des flash-back n’a rien de très original, d’autant que ces flash-back sont eux-mêmes strictement chronologiques. Ils charpentent le récit en segments très localisés (le lieu et la date sont toujours inscrits) et quasi-autonomes : le Vietnam, la Grèce, l’Iran sont les terrains d’investigations destinés à montrer le caractère d’Oriana en même temps qu’à reconstituer son itinéraire sentimental.
Dès le départ, la journaliste apparaît comme une femme forte, presque désagréable avec le médecin ou Lisa, l’étudiante. Le film part de ce principe de base pour dessiner un portrait plus nuancé : on la verra ainsi bouleversée dans un orphelinat, empathique avec des soldats ou amoureuse éperdue dans des moments d’émotion plus ou moins réussis. Affaire de goût et de sensibilité, dira-t-on ; mais aussi d’inventivité, car l’interview des soldats comme l’étreinte de la petite vietnamienne font écho à des scènes déjà vues. Mais fugitivement, un plan (le GI qui pleure ou le visage apitoyé d’Oriana) parvient à nous toucher.
Les deux segments les plus longs, le Vietnam et la Grèce, sont eux-mêmes très inégaux. Le premier peine à s’incarner, la faute sans doute au personnage interprété par Stéphane Freiss qui reste transparent, mais aussi à des dialogues sentencieux ou trop explicites. C’est d’ailleurs un défaut constant du film que de multiplier les explications, de ne pas assez faire confiance à l’image.
© Francesca Fago
Le segment grec est bien plus réussi. En s’attachant à un opposant à la personnalité complexe, Turco crée une tension (poursuite en voiture, surveillance permanente) efficace. Si la séquence du procès en noir et blanc, véritable réquisitoire halluciné, surprend par sa densité et sa force, c’est surtout la mort de Panagoulis qui reste en mémoire : annoncée comme inéluctable à la manière d’une destinée tragique, elle est évoquée par des signes mais n’est pas montrée. Cette ellipse est sans doute le climax du film, tout de maîtrise et de retenue.
D’autres passages, comme l’interview de Khomeiny, ont leur saveur, mais on regrettera que Turco fasse l’impasse sur la controverse qui marqua les dernières années d’Oriana Fallaci : de ses attaques contre l’Islam on n’aura qu’un petit aperçu présenté comme largement positif, ce qui est bien peu. Le consensus, peut-être imposé au cinéaste, est du point de vue du rapport au réel, inexcusable.
Au final, ce biopic hybride mélange de lieux communs et de fulgurances ne nous émeut pas autant qu’il le devrait. Sans doute la mise en scène trop lisse, les dialogues surabondants et une interprétation tout juste correcte y sont-ils pour beaucoup. Mais ce destin exceptionnel, sauvé par quelques séquences d’anthologie, mérite largement d’être vu et médité : la réflexion sur l’engagement et le sens de la vie pousse le scénario un peu plus loin qu’il n’y paraît, au-delà de ses conventions manifestes.
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