Triste monde tragique
Le 26 juin 2012
Une première œuvre au sujet difficile, hélas desservie par un traitement narratif bien trop didactique pour réussir à nous émouvoir pleinement.
- Réalisateur : Matéo Guez
- Acteurs : Marc Abaya, Che Ramos
- Genre : Drame
- Nationalité : Français, Canadien
- Durée : 1h17mn
- Titre original : Off World
- Date de sortie : 27 juin 2012
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Une première œuvre au sujet difficile, hélas desservie par un traitement narratif bien trop didactique pour réussir à nous émouvoir pleinement.
L’argument : Off World est l’histoire de Lucky, un jeune philippin, adopté enfant par une famille canadienne. Lucky grandit heureux à Toronto, mais vient le moment où il se pose la question de ses origines. Il part pour Smokey Mountain, l’immense bidonville de Manille, un des plus vastes des Philippines. C’est là que tout a commencé… C’est là que Lucky retourne… C’est là que commence son voyage personnel... Il découvre un frère, devenu LadyBoy, puis sa mère vivant dans la plus grande pauvreté. Ces retrouvailles bouleverseront Lucky, mais elles lui permettront de donner des racines à son existence.
Notre avis : On ne peut que respecter les choix artistiques initiaux de Mateo Guez pour son premier long métrage. Ce jeune réalisateur a eu le courage de situer l’action d’Off World au cœur de Smokey Mountain, immense décharge à ciel ouvert de Manille où des milliers de personnes tentent de survivre quotidiennement. Le genre de lieu que le cinéma occidental se refuse bien trop souvent à montrer, probablement parce qu’il symbolise l’échec d’un système qui considère la misère humaine comme un facteur inévitable à la bonne marche du monde. En y faisant évoluer le personnage de Lucky, jeune philippin adopté par une famille canadienne revenant sur son lieu de naissance pour y découvrir ses origines, Guez avait matière à bâtir une histoire suffisamment forte et universelle pour confronter viscéralement ses spectateurs à cet endroit si tristement méconnu.
Malheureusement, les meilleures intentions du monde ne suffisent pas à faire de bons films. Off World souffre hélas d’une absence de ligne directrice claire désamorçant une grande partie de l’intérêt que l’on porte à ses thématiques originelles. Film politique au traitement quasi documentaire ou bien quête identitaire purement fictionnelle ? Guez semble constamment hésiter sur l’orientation à donner à son œuvre. S’il faut reconnaître au jeune cinéaste un réel sens du cadre lui permettant de tourner des scènes visuellement superbes, le film pâtit dans son ensemble de cette indécision permanente. Il en résulte un objet filmique bancal, où des séquences intimistes se heurtent à d’autres ouvertement politiques, sans que l’immense pouvoir évocateur de la fiction ne soit pleinement utilisé pour nous immerger dans cette réalité si difficile. Comme le personnage de Lucky, qui observe le plus souvent Smokey Mountain de manière passive, le spectateur ne pénètre jamais émotionnellement dans le quotidien de ces hommes et de ces femmes. Les images du bidonville, parfois très dures, s’avèrent de ce fait beaucoup plus parlantes que les longs monologues intérieurs du protagoniste, dont la voix off, beaucoup trop présente et pompeuse, parasite à de nombreuses reprises des séquences où la narration visuelle semblait pourtant suffisante pour créer du sens.
Si le récit de la quête identitaire de Lucky s’avère émouvant aux détours de quelques scènes, notamment dans l’illustration des rapports que le personnage entretient avec son frère, il souffre lui aussi des ruptures narratives imposées par les séquences plus politiques. Off World est donc une œuvre hybride, jalonnée de beaux moments de cinéma, mais qui aurait dû accorder une confiance totale au pouvoir évocateur de la fiction pour mieux toucher le coeur de ses spectateurs.
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