Le 21 juillet 2024
Le métrage de Jordan Peele est un bon film de science-fiction, avec un sens aigu de la mise en scène. Mais on attendait plus d’audaces et moins de pathos de la part de ce cinéaste singulier.
- Réalisateur : Jordan Peele
- Acteurs : Devon Graye , Keith David, Keke Palmer, Steven Yeun, Michael Wincott, Terry Notary, Daniel Kaluuya, Donna Mills, Brandon Perea
- Genre : Science-fiction, Thriller, Épouvante-horreur
- Nationalité : Américain
- Distributeur : Universal Pictures France
- Durée : 2h10mn
- Date télé : 21 juillet 2024 22:41
- Chaîne : France 2
- Date de sortie : 10 août 2022
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Résumé : Les habitants d’une vallée perdue du fin fond de la Californie sont témoins d’une découverte terrifiante à caractère surnaturel.
Critique : Acteur, humoriste, producteur et scénariste afro-américain, Jordan Peele avait signé avec ses premiers longs métrages en tant que réalisateur deux perles des nouveaux films d’horreur, au carrefour du cinéma de genre et de la critique sociétale, tout en regorgeant de références. Mobilisant les codes de l’épouvante tout en les renouvelant, Get Out débutait comme Devine qui vient dîner avant de raviver le souvenir des Chasses du comte Zaroff, avec une dénonciation des préjugés raciaux à la fois plus poussée et subtile que chez Spike Lee. US se frottait davantage à l’univers du fantastique, via le récit d’une famille noire en villégiature et menacée par de terrifiantes créatures. Ces œuvres pourraient rétrospectivement former les deux premiers volets d’une trilogie terminée par Nope. On retrouve le cadre d’une parentèle noire en danger. Après la mort de son père, un éleveur de chevaux mystérieusement tué par un objet littéralement tombé du ciel, OJ se bat pour s’en sortir financièrement. Exploité par un studio de télévision (forcément dirigé par des Blancs) qui sous-estime ses compétences de dresseur d’animaux, il doit de surcroît faire face à des phénomènes étranges émanant de la sphère atmosphérique.
- © 2022 Universal Pictures, Monkeypaw Productions. Tous droits réservés.
Aidée de sa sœur Emerald, une jeune femme extravertie qui n’a pas sa langue dans la poche, il va chercher les moyens pour filmer ces événements étranges, avec l’espoir d’en tirer un revenu confortable. Écrit par Jordan Peele lui-même, le scénario est astucieux et n’oublie pas d’instiller des zones d’ombre, tout en faisant monter progressivement la tension, sans surenchère de retournements de situation. Et le cinéaste est cohérent dans sa volonté de rester fidèle au thème des discriminations. Ainsi, OJ et sa sœur se présentent comme les descendants du jockey noir des chronophotographies d’Eadweard Muybridge (1887), qui n’a jamais été officiellement identifié dans les histoires du cinéma. Et Esmerald doit s’affirmer en tant que femme (son père a privilégié une éducation patriarcale) et au titre de lesbienne assumée au fin fond de la Californie. D’aucuns rétorqueront que le réalisateur en fait d’ailleurs un peu trop dans ce registre, n’échappant que de justesse aux excès du wokisme. Mais Nope vaut surtout par la rigueur de sa mise en scène (cadrages, montage…) qui contribue, au-delà de la narration fluide, à en faire un bon film de science-fiction.
- © 2022 Universal Pictures, Monkeypaw Productions. Tous droits réservés.
Le sommet du long métrage est à cet égard à un épisode de flash-back révélant une tragédie survenue lors du tournage d’une sitcom, vingt-cinq ans auparavant, et dont se souvient un animateur de spectacles, ex-enfant acteur (Steven Yeun) : la scène est prodigieuse et effrayante, d’autant plus qu’elle semble apparaître, a priori, comme une digression narrative. Pour autant, tout n’est pas parfait dans Nope qui souffre de plusieurs écueils. En premier lieu, la mièvrerie ambiante de la troisième partie contraste avec le ton incisif d’un réalisateur qui finit par prêcher une morale familialiste, musique sirupeuse à l’appui. Ensuite, la visualisation du monstre tue quelque peu le mystère et le ton de suggestion horrifique : un reproche déjà adressé naguère aux producteurs de Rendez-vous avec la peur. Enfin, le cabotinage pénible de Keke Palmer (qui dispose en outre de dialogues parfois grotesques) fait un peu tache dans le casting. Heureusement, son partenaire Daniel Kaluuya, déjà dirigé par Peele dans Get Out, est impeccable comme à son habitude. Au final, Nope reste une bonne surprise et assurément une réussite du genre, malgré ces réserves.
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