Le 9 octobre 2018


Un des sommets de la French Touch. Avec Moon Safari, l’électro-pop française décolle définitivement.
Sortie : le 16 janvier 2018
Notre avis : Le premier album du combo versaillais, propulsé en tant qu’étendard de la French Touch, persiste comme un souvenir poignant qui émergerait d’une brume électronique. Jean-Benoît Dunckel et Nicolas Godin avaient déjà gratifié quelques happy fews de sucreries seventies, rassemblées sur un mini album, Premiers symptômes, sorti en 1997. Un an plus tard, Moon Safari confirme la tendance, revendiquant des influences diverses (de Michel Colombier à Serge Gainsbourg, et bien sûr, le grand maître du Moog, Gershon Kingsley), tout en parvenant à s’extraire d’imitations serviles pour combiner un ensemble tout à fait cohérent, qui aurait choisi d’emmener la pop, le krautrock et l’easy-listening pour un voyage intersidéral, dans une fusée à plusieurs étages. Un voyage dont on ne revient jamais complètement.
Qu’on ne se méprenne pas : le très populaire Sexy Boy et son refrain vocodé souffrent de la comparaison avec tout le reste, soit le meilleur de ce qui peut s’incarner dans la douceur musicale : on pense à des ballades comme All I need ou You make it easy, magnifiée par la présence de la chanteuse Beth Hirsch, ainsi que New star in the sky, qui n’est rien d’autre qu’une berceuse, dont le rythme alangui et les paroles fredonnées comme des mantras -"my baby blue is a new star"- étirent le temps jusqu’à la dilution. On ne dira jamais assez combien les paroles du groupe sont très clairement ajustées à leurs intentions musicales : ainsi, sur les nappes synthétiques de Kelly watch the stars ne se déposent que les paroles du titre, pour laisser à la pensée le soin d’investir le mystère propre à l’injonction. De cette chanson, on choisira plus volontiers la version radio edit, qui accompagnait en rythme le but de Laurent Blanc contre le Paraguay, dans le célèbre documentaire de Stéphane Meunier ; qui s’ornait aussi d’un clip inoubliable, où deux pongistes féminines bataillaient, tandis que Dunckel et Godin, en un montage parallèle, ferraillaient sec sur la mythique et rudimentaire déclinaison vidéo de ce sport : Pong.
Les territoires explorés par ce chef-d’oeuvre électro entremêlent l’espace et le temps : le passé de l’enfance n’est jamais très loin, qui surgit à travers les cris d’une cour de récréation. Mais il se combine avec la douce quiétude du présent et la prescience optimiste du futur : "All in all there’s something to give/All in all there’s something to do" chante Beth Hirsch, d’une voix douce et résolue. Au terme du voyage, demeure l’empreinte d’une expérience sonore, comme jadis la vécurent tous ceux qui aimèrent Dark side of the moon.
Moon Safari, Air (Source/Virgin Records), 1998
1. La Femme d’argent
2. Sexy Boy
3. All I Need
4. Kelly, Watch the Stars !
5. Talisman
6. Remember
7. You Make It Easy
8. Ce matin-là
9. New Star in the Sky (Chanson pour Solal)
10. Le Voyage de Pénélope
Copyright : Virgin/Parlophone