Mireille - la critique du film + le test DVD

Notre avis : Si Frédéric Mistral est oublié aujourd’hui, son vaste poème épique Mireille eut à sa sortie (1859) un large succès et lui valut en 1904 le prix Nobel de littérature et, dans la foulée, des adaptations muettes. Celle-ci, plus tardive, a d’abord pour elle d’être tournée en décors naturels, qui apparaissent régulièrement comme une ponctuation et élargissent le drame. D’une manière plus générale, les sentiers, les champs, la grotte de la sorcière sont authentiques, ce qui appuie le réalisme, comme le fait que la plupart des acteurs sont des amateurs. Évidemment, cela se paie par un jeu approximatif auquel on peut parfois trouver du charme.
Bien sûr, tout cela a considérablement vieilli : les dialogues, la musique de Gounod sentent leur siècle. Pourtant, le film dégage une belle sensibilité quand des plans simples comme la traversée du fleuve par Mireille ou les travaux des champs sont montrés, sans fioritures, avec une lenteur paisible. La fuite de la jeune fille est même assez émouvante, malgré les maladresses de l’actrice.

Mais plus que le drame ou l’aspect religieux, c’est par la description précise d’un temps révolu que le spectateur sera touché : fête du village, cueillette, travail de l’ail, lutte contre le taureau… Nombre de séquences ont un intérêt historique évident, et la réalisation simple leur confère une force certaine. Pareillement, la lutte entre les rivaux est bien menée, avec cavalcade et coup de lance.
Si les dialogues passablement récités sont difficilement supportables et handicapent le film, les cinéastes semblent fascinés par leur actrice et lui offrent des gros plans lumineux qui sont autant de moments de grâce. Il faut donc passer sur des défauts évidents et oublier les conventions d’époque pour savourer cette œuvre rare, réputée disparue et retrouvée en 2004, avec sa fraîcheur et sa description soignée. Les curieux seront à la fête, et les cinéphiles reconnaîtront Joë Hamman, vedette de westerns camarguais avant la Première Guerre mondiale.

Les suppléments :
La présentation de Serge Bromberg est rapide, mais donne quelques informations intéressantes sur le poème, les réalisateurs et la destinée du film (4mn). Les images d’actualités permettent de voir Mistral célébré en deux occasions (2mn). Enfin, L’Arlésienne, adaptation de 1908, offre un témoignage historique du premier cinéma (plans fixes, jeu théâtral), mais capté comme Mireille en décors naturels (18mn). Le DVD est également accompagné d’une carte postale (photo de La belle marinière).

L’image :
Vu l’âge et la rareté du film et malgré quelques parasites, on peut se satisfaire d’une copie imparfaite mais lisible et restaurée autant que possible. Deux ou trois plans flous.

Le son :
La musique est assez acide et les dialogues un peu étouffés, mais globalement compréhensibles.