Miracle à Santa-Anna - la critique

Notre avis : Miracle à Santa-Anna s’inspire du roman Buffalo soldiers de l’écrivain américain James McBride, qui a écrit le scénario à la demande de Spike Lee. On peut comprendre l’engouement du cinéaste, car l’ouvrage parle de fraternité entre Blancs et Noirs, en l’occurrence entre soldats afro-américains, Italiens et soldats allemands, sur fond de Seconde Guerre mondiale. Le métrage est alors une belle charge contre les Etats-Unis, qui ne sont représentés que par des gradés blancs irrespectueux envers leurs troupes noires, alors que les villageois italiens acceptent la différence. L’œuvre commence d’ailleurs par une séquence symbolique qui dévoile un extrait de western avec John Wayne, symbole de l’Américain blanc ultranationaliste qui serait le seul à même de défendre son pays. Spike Lee, fort de sa maîtrise de la mise en scène, filme avec passion et conviction son histoire, parfois naïvement, mais toujours avec son cœur de militant. Les soldats noirs sont enfin représentés comme héros de la guerre et défenseur d’une nation qui les rejette.
A la manière d’Inside Man, l’auteur utilise des éléments de l’enquête afin d’intéresser davantage le spectateur : la trame débute à New York, de nos jours, avec l’assassinat d’un immigré italien par l’un des anciens membres du bataillon afro-américain ; il s’ensuit un gigantesque flash-back se déroulant en Toscane en 1944, qui permet d’élucider les interrogations sur ce meurtre et sur un vestige italien possédé par l’ex-soldat. La reconstitution historique est alors réussie, tout comme les scènes de combats qui sont d’un grand réalisme, bien que la musique de Terence Blanchard se fasse un peu trop présente et grandiloquente. L’œuvre connaît quelques baisses de rythme, qui sont toutefois compensées par de belles séquences humanistes.
Le vrai problème du film, c’est son message un peu simpliste : Blancs et Noirs sont égaux devant Dieu. Cela est louable et permet au grand Spike de livrer son discours de tolérance, mais le métrage insiste trop lourdement sur les symboles religieux - les croix, églises, versets de la Bible contaminant constamment le récit et l’image. On préfère l’attitude d’un Scorsese avec son rapport à Dieu ambigu, fait d’amour et de haine, qui lui permet de faire preuve d’un zeste d’ironie et de recul sur la religion. Miracle à Santa-Anna reste tout de même appréciable, mais n’atteint pas la grâce humaniste et poétique de Lettre d’Iwo Jima de Clint Eastwood ou de la Ligne rouge de Terrence Malick, deux chefs-d’œuvre qui prônent la fraternité entre les peuples sans recourir avec insistance aux artifices du spirituel.