Mémoires de jeunesse - la critique du film

Portrait d’une jeunesse sacrifiée sur l’autel du patriotisme, à travers le parcours de plusieurs jeunes gens dont la vie est bouleversée par la Première Guerre mondiale.

L’argument : Printemps 1914. Jeune femme féministe à l’esprit frondeur, Vera Brittain est résolue à passer les examens d’admission à Oxford, malgré l’hostilité de ses parents particulièrement conservateurs. Décidée à devenir écrivain, elle est encouragée et soutenue par son frère et sa bande d’amis – et notamment par le brillant Roland Leighton dont elle s’éprend. Mais les rêves de Vera se brisent au moment où l’Angleterre entre en guerre et où tous les jeunes hommes s’engagent dans l’armée. Elle renonce alors à écrire pour devenir infirmière. Tandis que la jeune femme se rapproche de plus en plus du front, elle assiste avec désespoir à l’effondrement de son monde.

{{© Mars Distribution}}

Notre avis : Est-ce les célébrations autour de la Grande Guerre, qui vont se poursuivre jusqu’en 2018, qui expliquent la genèse de ce beau projet ? Alors que la Seconde Guerre mondiale dispose d’une pléthore de films sur les atrocités du conflit 39-45, voici enfin l’occasion de voir la Première Guerre différemment. En adaptant l’ouvrage autobiographique de l’écrivaine féministe Vera Brittain, le réalisateur James Kent réussi non seulement à éviter le pathos et le sentimentalisme ainsi que les travers fréquents des films de ce genre (violon, cris et larmes), mais aussi à livrer une œuvre sensible, au ton toujours juste et criant de vérité.
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Mémoires de jeunesse suit ainsi quatre personnages : Vera Brittain, jeune femme érudite qui souhaite étudier à Oxford, son fiancé Roland Leighton, son frère Edward et son ami Victor. Tous vont voir leurs vies bouleversées, leurs jeunesses fauchées, tout comme leurs projets d’avenir.
Au cœur d’un film où la beauté de la photographie et la qualité de l’interprétation n’ont d’égales que l’élégance de la mise en scène, des thèmes aussi importants que l’engagement dans l’armée, le rôle des femmes dans la société ou encore le statut des artistes, notamment des écrivains et des poètes entre 1914 et 1918, sont traités avec intelligence et finesse. {{© Mars Distribution}}La délicatesse du ton ne peut que rappeler le savoir-faire des britanniques en matière de films historiques. En réunissant autour de lui un casting international, James Kent rappelle implicitement que tous les pays du monde ont été touchés par cette crise mondiale.
D’une beauté artistique qui met en valeur la qualité de la mise en scène, l’émotion qui se dégage de chaque scène et des mouvements maîtrisés de caméras qui filment au plus près, entre la boue et le sang, le film présente surtout un quatuor d’acteurs qui devrait rapidement devenir le fleuron du cinéma de demain. {{© Mars Distribution}}Alicia Vikander trouve un rôle à la mesure de son talent. Sous-estimée dans Le septième fils, glaciale dans Ex Machina, elle est ici touchante, d’une sincérité à toute épreuve et réussit avec discrétion et délicatesse à montrer toute la force de son personnage, ainsi que toute sa souffrance et son courage pendant les moments difficiles. Elle est secondée par un trio d’acteurs qui ne peut qu’attiser la curiosité du grand public. A commencer bien sûr par Kit Harington, acteur finalement débutant au cinéma mais qui tient ici le haut de l’affiche (les producteurs ne sont pas fous). {{© Mars Distribution}}Après sa participation au très moyen Pompéi, il est forcément attendu au tournant. Loin des peaux de bête et de l’air renfrogné de Jon Snow, il se montre ici touchant en poète amoureux, peu à peu gagné par le désespoir face à l’enfer des tranchées. Il offre tout un panel d’émotions à son personnage, se révélant étonnant en jeune homme qui expose ses fragilités au lieu de les cacher. Le couple qu’il forme avec Alicia Vikander est magnétique et évite un rapport de force qui aurait desservi l’histoire. {{© Mars Distribution}}Vu dans la série Merlin, Colin Morgan est ici parfait en soldat blessé qui cherche à attirer l’attention de Vera Brittain, qui n’a d’yeux que pour son fiancé et son frère, interprété par Taron Egerton, lui aussi impeccable.
Est-ce leur talent naturel ou la qualité de la direction d’acteur qui explique l’émotion brute qu’ils dégagent ? Reste que le film repose sur les épaules de ces jeunes talents dans un long-métrage qui en tire le meilleur. {{© Mars Distribution}}Film délicat qui tranche en traitant avec finesse et élégance des évènements dramatiques et des faits historiques, Mémoires de jeunesse se distingue d’un simple biopic avec un savoir-faire et une beauté de ton et d’image qui fait du bien. Mais loin d’un simple film de guerre, c’est avant tout le récit d’une histoire d’amour contrariée au cœur de la grande Histoire qui vous fera verser des larmes. C’est d’une telle beauté qu’il serait franchement dommage de se retenir.