Le 25 octobre 2017
Steven Soderbergh revient avec la ferme intention de revisiter le film de cambriolage selon une formule qui a déjà fait son succès. Armé d’un scénario malin et d’un casting quatre étoiles, il ne parvient pourtant pas à renouveler le genre.
- Réalisateur : Steven Soderbergh
- Acteurs : Daniel Craig, Katie Holmes, Channing Tatum, Seth MacFarlane, Adam Driver, Riley Keough
- Genre : Thriller
- Nationalité : Américain
- Distributeur : ARP Sélection
- Durée : 1h58mn
- Date télé : 12 novembre 2022 21:00
- Chaîne : OCS Max
- Date de sortie : 25 octobre 2017
L'a vu
Veut le voir
Résumé : Deux frères pas très futés décident de monter le casse du siècle : empocher les recettes de la plus grosse course automobile de l’année. Pour réussir, ils ont besoin du meilleur braqueur de coffre-fort du pays : Joe Bang. Le problème, c’est qu’il est en prison…
Critique : Après l’avoir vu passer, pendant une dizaine d’années, de genres en genres, selon les modes du moment, sans ne jamais en marquer aucun mais s’assurant chaque fois un succès relatif grâce à la présence d’un casting toujours bankable, on aurait pu penser que la méthode Soderbergh avait atteint ses limites quand le réalisateur avait annoncé prendre sa retraite. Quatre années plus tard, le cinéaste est pourtant de retour avec une idée qui semble juteuse : revenir au genre du film qui reste, dans les mémoires du public, le plus emblématique de sa carrière, Ocean’s Eleven. Ce retour au film de braquage est cependant conçu comme l’antithèse de la vision qu’il avait donnée à son remake de L’Inconnu de Las Vegas, à savoir que l’esthétique clinquante de la ville et le charme glamour de ses voleurs de haut vol sont remplacés par une image peu reluisante de l’Amérique profonde, peuplée de rednecks cradingues. Ceci dit, la thématique est à la mode : Comancheria en est le meilleur exemple. A cela, le réalisateur ajoute une plus-value, celle d’une bande originale vintage... encore un effet de mode.
Comme à son habitude, Soderbergh s’est entouré d’acteurs dont la présence est toujours un solide argument commercial. C’est ainsi que Channing Tatum et Adam Driver se retrouvent propulsés en têtes d’affiche, incarnant deux frangins marqués par une malchance pathologique. Ce postulat aurait pu être le point de départ de nombreux gags lourdauds mais est en fait exploité comme un élément dramatique puisque présenté comme une peur de l’échec à affronter. Cette façon de ne jamais tourner à la pure comédie déjantée va, de la même façon, s’étirer sur l’ensemble du long-métrage. Ce choix est d’ailleurs surprenant, tant le look affublé à Daniel Craig semblait propice à un rôle survolté. Bien au contraire, hormis quelques mimiques écrues, son personnage semble si flegmatique que l’on en vient à déplorer une direction d’acteur qui ne parvient pas à exploiter son potentiel comique.
- Copyright ARP Sélection
La difficulté qu’a Soderbergh à trouver le ton juste, entre chronique sociale et comédie policière assumée, ne l’empêche cependant pas de profiter d’une écriture dans l’air du temps. C’est assurément grâce à elle qu’il parvient dresser une galerie de personnages secondaires qui forment une peinture au vitriol de son pays. Bien plus que le déroulé de l’intrigue principale, qui correspond à la mise en place du cambriolage, c’est la somme des sous-intrigues qui fait de Logan Lucky un film plus habile qu’il n’y paraît. Le rapport qu’ont les personnages aux spectacles, qu’il s’agisse du NASCAR pour les uns ou du concours de chant des enfants pour les autres, en dit long sur la vulgarisation du rêve américain. Cette dénonciation sociétale aurait toutefois gagné à être faite de façon un peu plus corrosive.
A côté de cette piste trop peu développée, l’histoire de braquage semble n’être en fin de compte qu’un prétexte pour mettre en avant ces deux frères qui avaient tout pour coller à l’image des héros américains (un champion de football et un soldat) mais se retrouvent dans une situation de victimes dans un système ostracisant. Encore une fois, le rapport des personnages principaux à l’Amérique contemporaine manque de mordant. En guise de moteur au scénario, la mise en scène de leur délit a beau être éminemment efficace, il s’agit d’une mécanique qui souffre d’un rythme monocorde. Malgré la rapidité que lui donne le montage, au risque même parfois de paraître un peu brouillon, cet arc narratif s’avère pauvre en surprises et punchlines mémorables. Et même si le film assure sa fonction de divertissement en créant quelques scènes ou dialogues amusants, ceux-ci restent bel et bien anecdotiques.
- Copyright ARP Sélection
Au final, Logan Lucky ne sait pas sur quel pied danser pour la simple et bonne raison que son écriture et sa mise en scène semblent tout du long en parfaite contradiction. Le résultat est inévitablement un film bancal, trop peu drôle pour être une bonne comédie et trop mal rythmé pour être un thriller percutant. Le meilleur exemple de cette réalisation scabreuse est l’introduction du soi-disant twist final qui semble avoir été importé par un Soderbergh désireux de reproduire la recette d’Ocean’s Eleven par-dessus un scénario qui, ne lui ayant pas permis de se construire en amont, le rend parfaitement accessoire, voire idiot. Dommage, il y avait pourtant de bonnes idées dans ce heist movie, et en particulier dans son contexte socioéconomique symptomatique de l’Amérique d’aujourd’hui.
- Copyright ARP Sélection
La chronique vous a plu ? Achetez l'œuvre chez nos partenaires !
Galerie Photos
Votre avis
Pour participer à ce forum, vous devez vous enregistrer au préalable. Merci d’indiquer ci-dessous l’identifiant personnel qui vous a été fourni. Si vous n’êtes pas enregistré, vous devez vous inscrire.
aVoir-aLire.com, dont le contenu est produit bénévolement par une association culturelle à but non lucratif, respecte les droits d’auteur et s’est toujours engagé à être rigoureux sur ce point, dans le respect du travail des artistes que nous cherchons à valoriser. Les photos sont utilisées à des fins illustratives et non dans un but d’exploitation commerciale. Après plusieurs décennies d’existence, des dizaines de milliers d’articles, et une évolution de notre équipe de rédacteurs, mais aussi des droits sur certains clichés repris sur notre plateforme, nous comptons sur la bienveillance et vigilance de chaque lecteur - anonyme, distributeur, attaché de presse, artiste, photographe. Ayez la gentillesse de contacter Frédéric Michel, rédacteur en chef, si certaines photographies ne sont pas ou ne sont plus utilisables, si les crédits doivent être modifiés ou ajoutés. Nous nous engageons à retirer toutes photos litigieuses. Merci pour votre compréhension.