Les descendants - La chronique BD

Après son très réussi Les mutants, un peuple d’incompris (Les Arènes - 2015) honoré d’une exposition à Angoulême début 2016, Pauline Aubry partage cette fois-ci son histoire personnelle qui l’a menée en Argentine - entre autres -sur la trace de ses ancêtres.

A chacun sa jeunesse et ses convictions.
Il en est certains - des d’jeunes (ou même des anciens) - qui ne se posent pas les questions de l’auteure : "qui suis-je, d’où viens-je, que cherche-je ? A quand le prince charmant ?"
Pauline Aubry si !!

A Paris, Pauline succombe à une amourette (à sens unique) avec Paul, un pseudo aventurier mythomane qui la laisse sans nouvelles.
Alors qu’elle essaie de faire face à cette rupture consumée dès le premier coït, l’auteure veut prouver au goujat qu’elle aussi peut mener sa vie sac à dos battant, partir à l’autre bout du monde, être indépendante et revenir triomphante pour conter mille et une aventures fantastiques !
Mais elle doute : ne fait-elle pas erreur de laisser filer le bellâtre qui a mis le feu aux sentiments de notre post-ado ? Doit-elle continuer sa route et croire que dans le monde, quelque part il existe un prince VRAIMENT charmant ?

Pauline Aubry a grandi entourée de sa grand-mère et ses grandes-tantes dans un monde mi-réel / mi-idéaliste, mais 100% farfelu et au son des conversations estivales exotiques en langue espagnole, bercée de récit enjolivés et parfois approximatifs.
En s’épanouissant, l’identité de Pauline Aubry s’est affirmée et forgée avec l’empreinte génétique de ses ancêtres qui conquirent une terre que l’on appelle Argentine.
Son arrière-grand-mère européenne espagnole aurait eu le coup de foudre pour son mari français sur un bateau en partance pour l’Amérique du sud, alors l’auteure décide de faire route vers ce qu’elle appelle la Pampa, pour y trouver elle aussi le prince charmant et/ou reconquérir Paul qu’elle espère retrouver à Paris dès son retour.

Installée à Buenos Aires, Pauline trouve un stage en agence de communication.
D’auberges de routards, en passant par la location de chambres chez l’habitant ou encore la colocation à plusieurs dans si peu d’espace, elle décide de faire un road trip façon Thelma et Louise avec une de ses amies sur le continent.
Les voyages forment la jeunesse, et à la fin de son séjour à l’autre bout de l’atlantique de son pays d’origine, Polette* prend dix ans de maturité dans les crayons.

Avec toute la joie et la naïveté inhérente à son âge, la dessinatrice se penche sur le passé pour mieux appréhender l’avenir.
Elle refait corps avec ce qui semble être sa thématique de prédilection : l’identité et le passage à l’âge adulte.
Ce voyage transformera sa quête de l’amour parfait en connaissance de soi et notre Polette de donner naissance à un quasi ouvrage de sociologie consacré au deuil de l’adolescence.

Adapté de son blog avec un côté un peu bancale cependant (on a parfois un peu de difficultés à décrypter le texte) le graphisme de Pauline Aubry accapare par sa vivacité même s’il est parfois incertain : on se demande si les personnages de cette BD ne vont pas se faire la malle de leur case, façon "Le cri" de Munch…
Dommage également que la couverture nous donne quelques indices sur le devenir de LA situation qui préoccupe l’auteure et dont on espérait secrètement qu’elle se transforme en happy end.
L’ouvrage est cependant très réussi et instructif tant au point de vue psychologique qu’historique, pédagogique tout en restant humaniste.

Un espoir pour toutes les princesses utopiques… et les vilains crapauds qui se prennent pour des princes charmants !

* Blog de l’auteure Polette Dessine