Cronenberg resurrections
Le 26 mai 2022
David Cronenberg revient aux fondamentaux de sa carrière et narre la naissance d’une nouvelle humanité par le prisme de l’art transhumaniste : celui du cinéma. L’on pourrait croire que Les Crimes du futur annonce la mort du maitre du body horror, c’est tout le contraire.
- Réalisateur : David Cronenberg
- Acteurs : Viggo Mortensen, Scott Speedman, Kristen Stewart, Léa Seydoux, Don McKellar, Lihi Kornowski, Welket Bungué
- Genre : Drame, Science-fiction, Épouvante-horreur
- Nationalité : Français, Canadien, Grec
- Distributeur : Metropolitan FilmExport
- Durée : 1h47mn
- Date télé : 22 mai 2023 23:08
- Chaîne : Canal+
- Titre original : Crimes of the Future
- Âge : Interdit aux moins de 12 ans
- Date de sortie : 25 mai 2022
- Festival : Festival de Cannes 2022
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– Sélection officielle Cannes 2022 : en compétition
Résumé : Alors que l’espèce humaine s’adapte à un environnement de synthèse, le corps humain est l’objet de transformations et de mutations nouvelles. Avec la complicité de sa partenaire Caprice, Saul Tenser, célèbre artiste performer, met en scène la métamorphose de ses organes dans des spectacles d’avant-garde. Timlin, une enquêtrice du Bureau du Registre National des Organes, suit de près leurs pratiques. C’est alors qu’un groupe mystérieux se manifeste : ils veulent profiter de la notoriété de Saul pour révéler au monde la prochaine étape de l’évolution humaine…
- © FDC / Philippe Savoir
Critique : Un performeur artistique, Saul Tenser, boiteux et insomniaque, pressent sa propre mort arriver et demeure témoin de la déliquescence progressive de son corps. Il n’est pas nouveau de dire que Viggo Mortensen a toujours su restituer les tourments intérieurs de son cinéaste fétiche David Cronenberg. Que ce soit dans Les Promesses de L’ombre ou même A Dangerous Method, Mortensen a mené le cinéma du maître du body horror vers les sommets de la psychanalyse cinégénique ; mais jamais la question de l’alter ego n’avait été aussi prégnante que dans Les Crimes du futur, que Cronenberg semble léguer comme un héritage de sa filmographie ô combien passionnante. Il avait déjà commencé à imaginer sa propre mort dans un court-métrage réalisé l’année dernière par Caitlin Cronenberg, sa fille, et intitulé The Death of David Cronenberg. Le cinéaste se filmait seul à l’étroit dans une chambre où règnent des formes géométriques. Il portait une robe de chambre et se déplaçait vers une silhouette immobile dans un lit qui s’avérait être son propre cadavre, avant de l’embrasser. Le film explorait déjà la mortalité, le surréalisme et la métamorphose de la vie et de la mort d’une manière jamais vue auparavant dans son œuvre prolifique.
- © 2022 Metropolitan FilmExport
Il en est de même avec Les Crimes du futur qui derrière ses allures de film testamentaire cache en son sein une symbiose parfaite de deux périodes de son cinéma, l’horreur trash et organique des nineties représenté par Crash ou eXistenZ et l’esthétique froide et millimétrée des années 2010 avec Cosmopolis ou Maps to The Stars. L’on aurait pu considérer Les Crimes du futur comme un film mortifère voire crépusculaire au vu de l’âge de son auteur mais il en est rien. Son nouveau métrage, malgré une mise en scène et un travail des couleurs qui convoque la putrescence et l’agonie, demeure bouillonnant de vie. Cronenberg autopsie sa propre œuvre et en vient à s’auto-citer de nombreuses fois au cours du film sans jamais paraître pompeux ou parodique. À la manière des spectacles d’avant-garde de Saul, Cronenberg décortique et extrait de chacun de ses films ses organes et son moi intérieur pour créer quelque chose de nouveau, en l’occurrence une nouvelle humanité, un nouveau regard sur le cinéma, le corps, la chair et le sang.
- © 2022 Metropolitan FilmExport
Dans un monde où les humains ont évolué voire muté, capables d’engendrer de nouveaux organes semblables à des métastases et de digérer le plastique, Saul se présente comme le seul fossoyeur en essayant d’aller à contre-courant des mouvements de pensée. Ses performances deviennent alors des objets de cinéma à part entière et transforment le long métrage en une forme de comédie noire d’une drôlerie assez fascinante. La conclusion, annonçant la naissance une nouvelle humanité, et le regard magique de Mortensen versant une larme dont la composition rappelle le Saint Sébastien de Botticelli, achève de faire des Crimes du futur une fresque de science-fiction parmi l’une des œuvres les plus stimulantes de Cronenberg et initiateur d’un nouveau départ pour le cinéaste qui à l’instar de Saul aura su mettre en scène sa résurrection comme personne d’autre ne l’avait fait.
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