Together we stand, divided we fall
Le 5 octobre 2007
Un film sur le divorce d’une rare justesse, magnifiquement interprété, écrit et mis en scène par le scénariste de La vie aquatique.


- Réalisateur : Noah Baumbach
- Acteurs : Laura Linney, Jeff Daniels, Jesse Eisenberg, Owen Kline, William Baldwin
- Genre : Comédie dramatique
- Nationalité : Américain

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– Durée : 1h21mn
– Titre original : The squid and the whale
Un film sur le divorce d’une rare justesse, magnifiquement interprété, écrit et mis en scène par le scénariste de La vie aquatique.
L’argument : Bernard et Joan Berkman, écrivains du Brooklyn des années 80, divorcent (d’où le titre débile de la version française), "à l’amiable". Il va leur falloir partager, et ce sont leurs deux fils de douze et seize ans, qui sont au centre de cette rupture.
Notre avis : Dire le malaise des enfants, l’impossible réconciliation des parents, les silences, les nuits blanches, l’implacable réalité de la rupture de deux parents. Raconter le divorce sans procès, sans bagarres, sans grandes tirades, dans sa plus triste vérité. Illustrer l’impact d’une séparation sur les enfants, en leur donnant un rôle central. Voilà l’ambition de The squid and the whale, titre qui fait référence à une "œuvre" du Muséeum d’Histoire Naturelle de New York où s’affrontent un calmar et une baleine.
Tout le talent de Noah Baumbach, membre de la "famille" de Wes Anderson (réalisateur de La famille Tenenbaum et de La vie aquatique, ici producteur), c’est de raconter tout cela avec style et retenue, et non sans humour. Le choix de ses personnages, des profs et écrivains "libéraux" (au sens américain du terme) et libérés, et de son décor, le Brooklyn des années 80, n’est pas non plus innocent. Ce ne sont pas des cadres moyens qui se déchirent, mais des intellectuels. D’où une remarquable et réjouissante richesse des dialogues et des références littéraires, cinématographiques et musicales. Au centre de celles-ci, Hey you ! des Pink Floyd, hymne illustrant à lui seul le film.
Baumbach, en choisissant son contexte, marque son attachement à un cinéma indépendant, rappelant celui de Wes Anderson par la qualité de son propos, mais bien moins métaphorique. Car The squid and the whale est un film réaliste, et ses personnages atypiques n’en font pas moins une illustration d’une justesse rare de ces divorces et séparations que doivent subir nombre d’enfants à l’adolescence, ne favorisant pas la crise normale à cet âge : le déménagement, le regard des autres enfants, la garde alternée (même celle du chat), les aventures des parents exp[l]osées aux yeux des enfants, les préférences, les alliances, enfin l’aveuglement des parents face aux souffrances de leurs enfants.
Impeccablement interprété par Jeff Daniels (un des acteurs les plus sous-estimé de sa génération), Laura Linney et deux jeunes acteurs débutants (mais aussi par un ahurissant William Baldwin, à fond dans l’auto-dérision), le troisième film de Baumbach est un portrait de famille en décomposition, touchant, triste, drôle, jamais gratuit et jamais niais, regorgeant d’ironie et de petits drames, d’amour et de haine. Tout ce que laisse dans la mémoire d’un homme les divorces de son enfance.