Le royaume - la critique

Comment dénoncer la violence aveugle avec un film plus violent encore ?

L’argument : Suite à une attaque suicide particulièrement sanglante dans un camp civil américain en Arabie Saoudite, le capitaine du FBI Ronald Fleury et son équipe se rendent sur place pour mener leur enquête.

Notre avis : Vendu comme une Chute du Faucon Noir bis, un film poussiéreux sur l’irréversible cycle de la violence terroriste, dénonçant les liens douteux (nappés de pétrole) qui unissent les Etats-Unis et l’Arabie Saoudite, Le royaume n’est en fait qu’un pâle thriller militaire. Peter Berg, acteur honorable et réalisateur de nanars (Very bad things, Bienvenue dans la jungle), sans doute porté par la caution Michael Mann (à la production) et son casting de stars (Jamie Foxx et Jennifer Garner en tête), oublie rapidement son sujet pour livrer une enquête qui ne manque pas de charme, mais qui ne fait pas avancer le schmilblick politiquement ou humainement parlant.
Ouvert sur une leçon d’histoire du Moyen-Orient bâclée, réglée en fond de cinquième, Le royaume semble, un temps, considérer les pressions politiques qui limiteraient une investigation américaine dans une région où on appelle l’Oncle Sam le "grand Satan". Problème, son héros, le très ricain capitaine Fleury, se fout des convenances et décide de s’en aller faire le ménage chez les méchants. A partir de là, les faux airs de thriller politique foutent le camp, et laissent la place à une sympathique mais terriblement banale enquête militaro- policière sur fond de folklore local (cache tes seins Jennifer, et vous, messieurs, serrez bien la main du prince du coin).

Face à la bande d’enquêteurs totalement frimeurs et super cools, les locaux se partagent en deux camps, les bons et les méchants. Parmi les gentils, un prototype de l’Arabe sympa, un frère, un vrai, même qu’il a lui aussi une petite famille mignonne comme tout, la preuve. Multipliant les images de petits enfants consolés (mais super braves) de la mort de leur papa, Le royaume tente, dans un mouvement d’une infinie naïveté sentimentalo-sirupeuse, de nous jouer le refrain de la paix entre les peuples et des valeurs universelles - Dieu et la famille, en l’occurence. Sur fond de soleil couchant, les bons musulmans prient, et Jennifer Garner donne des sucettes aux petites filles en foulard. On s’ennuie ou on ricane, selon.
Côté action, l’affaire se gâte encore plus. Sans dévoiler la "morale" de l’histoire, disons simplement ceci : Le royaume donne à voir de belles et impressionnantes scènes de combat (dont une en toute fin de film, particulièrement violente), pour nous dire, in fine, que ceux qu’on vient de voir s’entretuer son aussi cons les uns que les autres, et qu’ils n’ont rien compris à rien. Considéré a posteriori, le message est louable. Seulement, les pacifistes n’en ont pas besoin pour trouver la violence détestable et les belliqueux en tous genres sortiront de là avec l’impression que la seule solution au terrorisme, c’est une bonne rafale de M16. Les amateurs de Rambo s’en réjouiront. Ceux qui préfèrent Syriana passeront leur chemin.