Le 23 juillet 2023
Une comédie attachante, portée par un duo d’acteurs bien ajusté.
- Réalisateur : Claude Zidi
- Acteurs : Hubert Deschamps, Louis de Funès, Julien Guiomar, Annie Girardot, Mario David, Maurice Risch, Henri Attal, Jacques François, Ibrahim Seck, Daniel Boulanger, Philippe Brigaud, Geneviève Fontanel, Jean-Jacques Moreau, Tanya Lopert, Georges Staquet, Jacqueline Jefford
- Genre : Comédie
- Nationalité : Français
- Distributeur : AMLF Distribution
- Editeur vidéo : Studiocanal
- Durée : 1h36mn
- Date télé : 29 octobre 2024 21:00
- Chaîne : Paris Première
- Box-office : 2 798 787 entrées (France) / 539 404 (Paris-périphérie)
- Date de sortie : 22 mars 1978
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Résumé : Industriel ambitieux, Guillaume Daubray-Lacaze agrandit son usine de matériel de dépollution, détruisant du même coup le jardin de sa femme Bernadette, férue d’horticulture. Décidée à se venger de son mari, elle quitte le domicile conjugal, et se présentant contre lui aux élections municipales.
Critique : Le grand succès de L’aile ou la cuisse incite le réalisateur Claude Zidi et le producteur Christian Fechner à solliciter Louis de Funès qui, bien qu’affaibli par les effets d’une crise cardiaque, demeure un acteur efficace, même si son jeu a subi une certaine inflexion, l’obligeant à lever le pied sur l’hystérie. L’idée d’un nouveau long métrage est donc lancée, le scénario et les dialogues sont confiés à Pascal Jardin. En amont du tournage, un conflit a lieu avec le metteur en scène Jean-Pierre Mocky, qui avait proposé au comédien de jouer dans sa nouvelle réalisation intitulée Le boucan. Jugeant le script du nouveau de Funès trop proche de son projet, Mocky porte l’affaire devant la justice qui lui donne raison. Il sera indemnisé et le film de Zidi se tournera quand même. Que se serait-il passé si, à la manière de son alter ego Bourvil, la star comique avait entrepris une collaboration avec le franc-tireur du cinéma français ?
On ne le saura jamais, mais on n’a pas non plus à le regretter, parce que La Zizanie, sans être un chef-d’œuvre, est un divertissement attachant, d’un bien meilleur niveau que L’aile ou la cuisse. La bonne idée, c’est d’avoir associé deux artistes issus d’univers cinématographiques a priori dissemblables : Annie Girardot est alors une grande vedette, dont la filmographie inclut autant de drames que de comédies. A l’aise dans tous les registres, elle donne ici la réplique avec une belle aisance, n’hésitant pas à singer le jeu de son partenaire, à travers quelques scènes d’une frénésie vaudevillesque. La dimension théâtrale du long métrage s’incarne dans un certain nombre de séquences tournées en studio, comme si nous avions affaire à ce qu’on appelait, du temps de l’ORTF, une dramatique filmée, de sorte qu’il n’est pas étonnant qu’à l’orée d’un débat complètement saboté par la dispute entre les deux personnages, les protagonistes soient saisis comme s’ils étaient sur scène, devant un public. A ce moment précis, on imagine qu’à ces deux acteurs-là, très habitués au théâtre, une pièce aurait volontiers convenu, d’autant que leur complicité semble d’une naturelle évidence. Elle explique la présence de certains passages très tendres, joliment filmés, avec une qualité chorégraphique : ainsi, tandis que Guillaume et Bernadette valsent tranquillement dans une salle désertée, les balayeurs s’affairent en rythme.
La valeur globale de ce long métrage soigné démontre que le comique est vraiment une horlogerie, dont le tempo doit être impeccable pour que les gags agissent avec la plus grande efficacité. Et ce n’est pas un hasard si les machines de l’usine prennent autant d’espace, la répétition de postures étant infiniment fructueuse, si l’on veut irriguer l’humour, en évitant les temps morts. Zidi connaît Chaplin et Bergson, se souvient que le premier, dans Les temps modernes, dénonçait l’alignement des gestes humains sur la machine, et se rappelle que le second parlait bien du rire comme de « la mécanique plaquée sur du vivant ». A cette aune, un ouvrier sur qui l’on tape pour l’arrêter et le remettre en route, est cet individu rendu drôle par la simple perspective de sa réification. De la même manière, l’intrusion de l’usine, fonctionnant sans cesse pour satisfaire l’obsession capitaliste de Guillaume, est exploitée à travers des gags souvent réussis : on évoquera volontiers une scène de repas où le personnage incarné par Maurice Risch, qui a le très bon goût de la jouer sobre, s’agace que les bougies du gâteau, destiné à ses patrons, ne soient pas soufflées par des humains, mais par une machine. On peut gloser sur le caractère connotatif d’un tel segment, en le reliant à une intention didactique (dénoncer la recherche compulsive du profit qui suppose un rendement à plein régime et une déshumanisation accélérée). On peut aussi s’abstraire des intentions et tout simplement considérer que le rendu visuel d’un tel plan s’avère efficace.
Le meilleur du réalisateur s’offre même un effet de mise en abyme qui est sans doute le moment le plus réussi de la comédie : cherchant sa femme dans un bal, Guillaume enfile un masque à son effigie, avant d’assister à une imitation qui le raille. La séquence, interrompue trop tôt, suscite un trouble entre réalité et fiction : d’un seul coup, l’identité de Louis de Funès se superpose à celle de son personnage, comme si l’acteur avait traversé le miroir pour briser l’illusion fictionnelle. Le vertige est trop bref, mais on l’a rarement éprouvé en regardant un film avec l’acteur. Pour le reste, on tient là une des plus belles réussites de Zidi.
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