Une pincée de mort aux rats ?
Le 16 juin 2014
Ce classique du cinéma coréen, huis-clos horrifique qui n’hésite pas à chausser les gros sabots du film de genre tout en adoptant une forme virtuose et quasi expérimentale, sort enfin sur les écrans français en version restaurée.
- Réalisateur : Ki-Young KIM
- Acteurs : Eun-Shim LEE, Jin-Kyu KIM, Jeung-nyeo JU, Aeng-ran EON
- Genre : Drame, Fantastique, Épouvante-horreur
- Nationalité : Sud-coréen
- Durée : 1h51mn
- Titre original : 하녀 (Hanyo)
- Plus d'informations : www.carlottavod.com/film-689-servan...
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– Sortie en Corée du Sud : 3 novembre 1960
Ce classique du cinéma coréen, huis-clos horrifique qui n’hésite pas à chausser les gros sabots du film de genre tout en adoptant une forme virtuose et quasi expérimentale, sort enfin sur les écrans français en version restaurée.
L’argument : Une famille vient d’emménager dans une grande maison neuve. Afin de soulager son épouse qui souffre de fatigue, le père accepte d’accueillir une servante. Possédant un comportement ambigu, la nouvelle venue s’amuse à espionner les conversations ou à effrayer les enfants. Lorsqu’elle entame une liaison avec le chef de famille, le foyer tombe lentement sous l’emprise de la servante…
Notre avis : Voici donc enfin sur les écrans français, hors festivals et rétrospectives, et dans une version superbement restaurée [1], ce film légendaire qui a fait récemment l’objet d’un remake réalisé par IM Sang-soo, sorti en 2010 sous le titre The housemaid.
L’original, signé par le franc-tireur du cinéma coréen des années 50 à 70, KIM Ki-young, frappe d’abord par des partis-pris formels très affirmés qui ressortent d’une esthétique expressionniste et quasi expérimentale. La photo noir et blanc très contrastée de KIM Deok-jin rend très oppressant le décor de la maison piège où se déroulent la plupart des scènes, les rares extérieurs n’apportant pas vraiment de bouffée d’air à ce huis-clos.
- La servante (Hanyo) de Ki-young Kim (1960)
Le montage heurté refuse la fluidité narrative du cinéma classique au profit des effets de surprise et de désorientation du spectateur, des raccords déroutants produisant souvent des impressions de sautes ou de répétitions.
Car la progression dramatique obéit à une logique de cauchemar, juxtaposant les images chocs à la composition très travaillée (le bras du barman agitant son shaker au premier plan devant les visages de deux hommes qui s’entretiennent) en se souciant peu de vraisemblance psychologique ni même de cohérence narrative.
- La servante (Hanyo) de Ki-young Kim (1960)
Le film ne recule pas devant les effets appuyés, soulignés par la musique de HAN Sang-ji, et l’atmosphère d’hystérie froide qui l’habite pourra paraître grossière et trop fabriquée. Mais sa franche méchanceté (tous les bons sont odieux, à commencer par les enfants), la pointe d’humour très noir partout présente, le caractère obsédant de nombre d’éléments récurrents (l’écureuil faisant tourner sa cage, la question de la présence ou non de mort aux rats dans le plat de riz, les leçons de piano) lui donnent une force dérangeante qui justifie les rapprochements qu’on a parfois établis avec d’autres oeuvres mettant à jour elles aussi la violence, sociale et sexuelle, souterraine mais prête à éclater, des relations entre maîtres et serviteurs. On n’est en effet pas très loin de Buñuel (Le journal d’une femme de chambre), Genet (Les bonnes) ou Losey (The servant).
L’interprétation de l’étrange LEE Eun-shim n’est pas pour rien dans l’impression de persistant malaise savamment entretenu par ce film qui s’avère être tout à fait à la hauteur de sa sulfureuse réputation.
- La servante (1960)
[1] Deux bobines , absentes du négatif original, ont été restaurées à partir d’une copie d’exploitation et présentent une qualité d’image moindre. Cela surprend sur le coup mais ne nuit pas à l’impact du film.
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