Le 13 janvier 2021
Ann Patchett évoque à nouveau le thème si américain de la famille, mais elle choisit cette fois une demeure majestueuse comme centre de son roman, laissant ainsi les souvenirs sensoriels déferler.
- Auteur : Ann Patchett
- Editeur : Actes Sud
- Genre : Roman
- Nationalité : Américaine
- Traducteur : Hélène Frappat
- Titre original : The Dutch House
- Date de sortie : 6 janvier 2021
- Plus d'informations : Le site de l’éditeur
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Résumé : Danny Conroy grandit dans une somptueuse demeure en banlieue de Philadelphie. Malgré un père distant et une mère partie sans laisser d’adresse, il peut compter sur l’affection de sa sœur adorée, Maeve, l’intelligence et la drôlerie incarnées. Unis par un amour indéfectible, ils vivent sous l’œil attentif des “Hollandais”, les premiers propriétaires de la maison, figés dans les cadres de leurs portraits à l’huile. Jusqu’au jour où leur père leur présente Andrea, une femme plus intéressée par le faste de la bâtisse que par l’homme qui la possède. Ils ne le savent pas encore, mais pour Maeve et Danny c’est le début de la fin. Et une fois adultes, ils n’auront de cesse de revenir devant la Maison des Hollandais se heurter aux vitres d’un passé douloureux.
Critique : À l’image d’Anne Tyler et de tant d’auteurs américains, Ann Patchett est hypnotisée par les relations familiales et leur complexité. Pour raconter le destin d’un foyer, elle s’attache cette fois à raconter celui d’une maison, celle des Hollandais. Danny, le narrateur, y a grandi dans les années 1960, tout comme Maeve, sa grande sœur. Leur enfance, vécue auprès de Sandy et Jocelyn, leurs deux mères de substitutions, de leur père et des meubles réconfortants de cette demeure, eut la saveur d’un bonbon au caramel d’antan – douce, enveloppante, désuète. Mais bientôt l’arrivée d’Andrea met fin à ce bonheur caressant et suranné. Elle s’insinue dans chaque pièce, impose peu à peu sa présence. La mère des deux protagonistes a disparu alors que Danny était encore petit, faisant ainsi éclore une maladie chez sa fille aînée, maladie de tristesse et de douleur qui ne la quittera plus et lui rappellera chaque jour à chaque heure que sa mère l’a abandonnée. La présence de cette nouvelle épouse accentue l’absence, souligne le vide qui serre le cœur de Maeve. Elle se transforme en figure maternelle pour Danny, faisant ainsi écran entre lui et Andrea, ombre menaçante sur ses jeux d’enfants, jusqu’à ce que les circonstances ne les protègent plus et qu’ils soient chassés de leur domicile.
Ils reviendront alors très souvent se garer devant la kyrielle de fenêtres de la maison d’Elkins Park, contemplant les détails que les vitres laissent voir, dénudent, désossant les pièces, autopsie malsaine, mais nécessaire aux deux héros. Dans l’intimité enfumée de l’habitacle, ils ressassent leur douleur, le manque des bibelots, des ornements, du plafond ouvragé, du papier peint aux hirondelles qu’un peintre avait choisi pour fond, lorsqu’on lui avait commandé un portrait de Maeve, abandonné au-dessus de la cheminée du salon.
Le manque de la demeure se confond avec la nostalgie d’une enfance passée trop vite. Ces interludes rythment la narration, viennent ponctuer le récit des jeunes années, puis celui de l’adolescence, des études, et de l’achèvement du cycle, de la construction d’une nouvelle famille. La chronologie, brouillée au début du roman, prend sens peu à peu, les fragments s’emboîtent et deviennent fresque. La plume d’Ann Patchett, brillamment traduite par Hélène Frappat, dit les sensations, l’odeur, les infimes détails d’une maison que seul un enfant perçoit et garde en mémoire. Elle décortique patiemment les colifichets, les petits riens qui font une vie mais aussi ses grandes lignes, recrée l’amour fraternel et lui rend hommage en tissant autour de lui une chronique familiale d’une rare acuité.
Ann Patchett - La maison des Hollandais
Actes Sud
14.50 x 24.00 cm
320 pages
22,50 euros
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