Antoine Poidebard sur les routes de Perse
Le 22 avril 2021
Il était une époque cruciale dans la photographie du monde. Porteuse de traces, de ruines et de vestiges, cette dernière devenait une source irremplaçable pour l’histoire et la mémoire des hommes et de leurs conditions de vie, dans le contexte des guerres et de leurs lendemains… Avec son appareil photographique, Antoine Poidebard réinvente le récit de voyage en Perse.
- Auteurs : Jean-Claude Voisin, Lévon Nordiguian
- Editeur : Presses de l’Université Saint-Joseph de Beyrouth
- Nationalité : Française
- Date de sortie : 15 octobre 2020
- Plus d'informations : Pour le commander en ligne
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Résumé : Antoine Poidebard (1878-1955) est un jésuite connu surtout dans le monde scientifique comme l’un des grands pionniers de l’archéologie aérienne. Il a été d’abord missionnaire d’Arménie. Mobilisé, il est chargé en 1918 par l’état-major interallié d’une mission de reconnaissance des routes de Perse. Ce livre-album est basé sur les publications d’A. Poidebard sur le sujet, mais aussi sur deux carnets de notes prises sur le vif et une abondante documentation photographique inédite, réactualisée par des photographies de Jean-Claude Voisin qui, 100 ans après, a suivi la trace de Poidebard sur les routes de Perse.
Critique : Il était une fois, dans la photographie du monde, un voyageur aumônier, lieutenant, officier-interprète, envoyé en Iran il y a cent ans. Sa mission, il l’a mise en clichés. Désormais, cet art graphique allait nourrir la guerre des images, tout en la documentant. En témoignent, en France, les collections de l’Établissement de Communication et de Production Audiovisuelles de la Défense qui, au moment de sa création en 1915, avait pour mission de témoigner, fournir des images et communiquer sur le front. Très vite, après la guerre, les photographies contemporaines que ce service collectait, avaient vocation à devenir des moyens pour la reconstruction du pays à l’identique.
Cette importance prise par la photographie en dit long sur une histoire qu’Antoine Poidebard incarne et que Lévon Nordiguian et Jean-Claude Voisin nous relatent dans le détail de ce récit de voyage, sur les routes de Perse, à la fin de la Grande Guerre, puis un siècle plus tard.
On est loin de la candeur des Persans imaginaires Usbek & Rica, que Montesquieu faisait évoluer à Paris deux siècles auparavant. La Première Guerre mondiale a été un drame à partir duquel des millions de vies ont basculé dans l’horreur. Massacres, exils, déportations, génocides constituent les impacts invisibles d’un conflit mondial duquel des peuples entiers n’ont pas été protégés, ni épargnés. Les conséquences du génocide arménien auraient pu être passées sous silence, dans le révisionnisme ambiant de l’effondrement de l’Empire ottoman, par ailleurs vécu et décrit par T.E. Lawrence d’Arabie.
Ici, pour en avoir vu les effets sur les routes de Perse, Antoine Poidebard en décrit et en fixe les ravages. Il porte témoignage de ces époques troublées, à travers ces photographies d’orphelins arméniens à Bagdad, qui brandissent un étendard où on lit dans leur langue « Vrej », qui se traduit par « vengeance », ou d’enfants victimes de famines qui sévissent au col de Burbur, par exemple. Ce voyage en Perse ressemble autant à une épopée aventureuse, digne d’un personnage de bande dessinée, qu’à un voyage d’études, proche de l’anthropologie, pour ce pionnier de l’archéologie aérienne. Les traces des horreurs de la guerre se mêlent aux beautés de ces paysages merveilleux. Poidebard s’y enthousiasme pour Kermanshah, « l’un des plus beaux bijoux de la terre », avant de faire tomber son auto dans un fossé à Hamadan.
Bruno Foucher, ambassadeur de France au Liban, qui préface l’ouvrage, situe ce récit dans l’histoire des représentations occidentales de l’Orient : « Le voyage en Perse revêt, pour les Occidentaux du moins, une saveur particulière, une magie qui continue d’opérer. C’est une expérience différente de tous les autres voyages et je pense en avoir accompli un certain nombre, mais rarement avec ce sentiment d’effectuer, comme en Iran, un parcours initiatique. »
En reprenant ce pèlerinage initiatique, à l’instar de Pierre-Olivier Malherbe, de Barthelemy d’Herbelot de Molainville, de Jean Chardin, du général Gardane envoyé par Napoléon Bonaparte, le père Antoine Poidebard peint avec constance cinquante ans de présence dans cette région du monde. Il annote et légende ses clichés dans des albums scrupuleusement ordonnés, classés et conservés par la photothèque de la Bibliothèque orientale de l’Université Saint-Joseph de Beyrouth. Cet ouvrage, magnifiquement illustré et documenté, en appelle d’autres au fur et à mesure d’un inventaire que l’on espère de plus en plus systématique, pour prolonger cette recherche « aux origines de l’archéologie aérienne » et de cette traversée de l’Orient.
135 pages - 26,00 €
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