Le 29 juin 2020
Féminisme discret mais affirmé, destin singulier mais si commun, solitude qui se fissure : La brodeuse de Winchester offre une jolie incursion dans l’Angleterre de 1932, entre menace du nazisme outre-Manche et poids des souvenirs de la Grande Guerre, entre univers ouaté et féminin et atmosphère mystérieuse du clocher...


- Auteur : Tracy Chevalier
- Collection : Quai Voltaire
- Editeur : Editions de la Table Ronde
- Genre : Roman, Fiction historique
- Nationalité : Anglaise
- Traducteur : Anouk Neuhoff
- Titre original : A Single Thread
- Date de sortie : 25 juin 2020
- Plus d'informations : Le site de l’éditeur

L'a lu
Veulent le lire
Résumé : En Angleterre, en 1932, être une "femme excédentaire" est le destin de nombre des représentantes du beau sexe. Pourtant, Violet Speedwell, dactylo, ne se résout pas à porter cette étiquette, encore moins maintenant qu’elle s’est convaincue de quitter sa mère pour prendre son indépendance à trente-huit ans. La cathédrale de Winchester, ville où elle s’établit, lui offrira un refuge des plus appréciables, et lui fera découvrir deux cercles lui apportant réconfort et chaleur : les brodeuses et les sonneurs de cloches pourraient bien devenir sa nouvelle famille...
Critique : Habituée des romans historiques, Tracy Chevalier s’attaque cette fois à la décennie qui voit Hitler arriver au pouvoir, alors que les souvenirs de la Grande Guerre sont encore si douloureux dans les esprits. 1932, en Angleterre : Violet décide enfin à trente-huit ans de prendre son envol et de quitter sa mère acariâtre et insupportable avec qui elle vit depuis sa naissance. Célibataire, elle s’arme de courage pour laisser Southampton derrière elle et ouvrir son cœur à Winchester. Sa cathédrale l’attire immédiatement, l’envoûte. Elle la considère comme son refuge et s’y rend souvent, examinant les détails architecturaux, la majesté de sa voûte, la beauté de ses vitraux colorés. C’est là qu’elle rencontre celles qui deviendront comme une nouvelle famille. Les brodeuses de Winchester. Elles se réunissent plusieurs fois par semaine, toutes à leur tâche : égayer le bois sombre des stalles de l’édifice, grâce à leurs fils. Agenouilloirs, coussins, aumônières : la cathédrale de Winchester mérite le meilleur. À leurs côtés, et sous la houlette de la véritable Louisa Pesel, Violet s’ouvre peu à peu, oublie les tracas du bureau et les commérages de ses collègues dactylos, ses soucis financiers, l’ingratitude de sa mère, et découvre un nouveau monde.
Outre la broderie, Tracy Chevalier emmène également le lecteur au plus près des sonneurs de cloches, faisant découvrir un univers étrange et presque mystique, plein de secrets. Avec une étonnante justesse historique et humaine, elle oscille entre récit routinier à la Anne Tyler qui se serait exilée outre-Atlantique et indolence à la manière d’Elizabeth Jane Howard (Étés anglais, Une saison à Hydra). Les personnages sont finement créés, pleins de nuances et de réalisme, tandis que l’acuité du contexte transforme ce roman en une sorte de chronique. Teinté d’un féminisme austenien discret mais affirmé, La brodeuse de Winchester se lit lentement, le lecteur découvrant avec plaisir la campagne britannique et les merveilles architecturales de Winchester. Même s’il accuse parfois un rythme trop alangui, c’est pourtant là l’un de ses charmes.
Tracy Chevalier - La brodeuse de Winchester
La Table Ronde
352 pages
135 x 220 mm