Short bus
Le 11 juin 2013
Vainqueur de la Queer Palm 2013, L’inconnu du lac se fait le récit de libertés sexuelles. Explicitement radical.


- Réalisateur : Alain Guiraudie
- Acteurs : Pierre Deladonchamps, Christophe Paou, Jérôme Chappatte, Patrick d’Assumçao, Mathieu Vervisch
- Genre : Drame, Érotique, LGBTQIA+
- Nationalité : Français
- Distributeur : Les Films du Losange
- Durée : 1h37mn
- Date télé : 7 janvier 2023 22:40
- Chaîne : OCS City
- Âge : Interdit aux moins de 16 ans
- Date de sortie : 12 juin 2013
- Festival : Festival de Cannes 2013
Résumé : L’été. Un lieu de drague pour hommes, caché au bord d’un lac. Franck tombe amoureux de Michel. Un homme beau, puissant et mortellement dangereux. Franck le sait, mais il veut vivre cette passion.
Critique : À son zénith, le soleil étire paresseusement ses rayons sur les poussiéreux pare-brises des voitures garées à quelques pas de la plage. Au bord du lac, des corps cuivrés se dévoilent dans leur entièreté, tantôt languissants, tantôt espiègles. Les sourires lourds de sous-entendus qui animent le visage de ces hommes de tous âges et de tous horizons ne laissent aucune place au doute. A quelques enjambées de là, se dresse le bois. Entre les bruissantes herbes hautes et l’ombre des arbustes, les fourrés se font les témoins de vifs baisers et d’anonymes étreintes.
Alain Guiraudie a décidé de poser sa caméra face à ces amants d’un soir, ces dragueurs de juillet, et autres galants éphémères. Les jambes écartées, ils s’abandonnent à la chaleur de l’été, ne s’interrompant que pour remettre en place quelque testicule mal placé ou partir à la recherche d’un partenaire de jouissance. Tout le reste n’est que fantasme. On les sait se rendre de temps à autre à une soirée, ou au restaurant, mais le film définit toute action hors-champ comme hors de propos. C’est dans ce lieu privilégié, et nulle part ailleurs, que ces inconnus sont venus chercher une oreille attentive, une verge dressée, ou plus prosaïquement la tiédeur de bras autour de leur taille.
A sa sortie, L’inconnu du lac est interdit aux moins de seize ans. Sous un objectif impudique, les scènes de sexe crues se succèdent : les phallus éjaculent à l’écran, les doigts d’amants s’insèrent dans l’intimité de tant d’autres, et les moites scènes de fellation sont légion. Sans être vraiment vulgaires, ces instants de communion charnelle dérangent. L’on voudrait désespérément y voir la simple satisfaction d’un besoin primaire, mais le traitement accordé par le cinéaste au sujet nous en empêche. Le halètement suppliant de Frank pour qu’on l’embrasse au moment de l’ultime délivrance, la solitude misérable dans laquelle sont plongés nombre de ces touristes de l’amour, les couples absurdes en singeant d’autres l’espace de quelques heures... Le sexe et a travers lui sa recherche d’une intimité perdue exposent dans L’inconnu du lac une pulsion mortifère.
Le temps s’égrène, péniblement, et nos personnages n’ont aucun but, ni désir. Ne subsiste que celui de la volupté sublime, celle qui fera oublier l’univers entier à ces âmes meurtries. Henri, douloureusement conscient, embrasse la mort comme une vieille amie. Frank, en s’éprenant d’un éphèbe criminel, valse avec la fossoyeuse. Michel, Apollon craché par les entrailles de la mer, est à la fois silure et croque-mort.
L’inconnu du lac est un objet d’une superbe esthétique. La lumière naturelle fait rejaillir, sans fioritures, la beauté de ce qui se passe à l’écran. Le film est certes un thriller, mais on en retiendra surtout sa conception tragique des relations humaines (qu’elles soient homosexuelles ou non). On sort de la salle avec l’amère impression d’avoir assisté à une tragédie grecque, où l’espoir a été sacrifié sur l’autel d’une divinité supérieure : Thanatos.
roger w 24 juin 2013
L’inconnu du lac - Alain Guiraudie - critique
Si le cinéaste s’égare parfois dans une pornographie inutile, le film vaut mieux que cet aspect purement anecdotique et propose une plongée torturée en compagnie de personnages en bout de course. Quand Eros rencontre Thanatos !