CHU HS
Le 23 février 2006
Un cauchemar en milieu hospitalier, imaginé par Lars von Trier, où le génie côtoie sans complexe le n’importe quoi. Inégal !


- Réalisateur : Lars von Trier
- Acteurs : Udo Kier, Ernst-Hugo Järegård, Kirsten Rolffes
- Genre : Fantastique, Épouvante-horreur
- Nationalité : Danois
- : Opening
- Durée : 10h00
- Titre original : Riget

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– Saison 1 : 1994
– Saison 2 : 1997
Résumé : À Copenhague, des événements surnaturels remettent en cause le bon fonctionnement d’un centre hospitalier baptisé le Royaume. Médecins et patients vont devoir cohabiter avec des fantômes plus ou moins belliqueux.
Critique : En 1991, Lars von Trier vient de terminer sa trilogie sur l’Europe avec Europa, film expérimental et foisonnant au niveau formel. Une récréation artistique s’impose pour le réalisateur qui a besoin de se renouveler. Le projet de L’hôpital et ses fantômes tombe à point nommé. Le contexte du sujet lui permet en effet d’explorer l’une de ses phobies les plus intenses (outre la trouille de l’avion, il ne supporte pas les ambiances cliniques) et surtout de tester des nouvelles techniques de filmage. En 1994 sont diffusés les quatre premiers épisodes de cette série, située pas très loin du Twin Peaks de David Lynch. Indubitablement les meilleurs, ceux-ci distillent une terreur implacable qui monte crescendo pour un final gore rarement vu à la télévision. Maîtrisant parfaitement son sujet, Lars von Trier mène de front plusieurs batailles avec réussite : le développement de personnages attachants, voire fascinants, et la progression de son histoire de fantômes - en dépit de quelques longueurs, on avale littéralement ces épisodes.
On se laisse prendre en effet par toutes les intrigues rondement menées, imbriquées les unes dans les autres : l’histoire de Mary, les plans flippants des couloirs de cet hôpital de dégénérés (les Danois ont-ils vraiment cette image de leur société ?), les apparitions d’une petite fille dans la cage d’un ascenseur, par un accouchement à faire pâlir Romero et ses zombies. La réalisation, point fort de cette série, démontre une fois de plus la maestria de Lars von Trier, excellent concepteur d’image et d’ambiance : le grain de l’image, l’utilisation du son et de bruits parasites effrayants auront raison de vos nerfs. Le gros bémol concerne la saison suivante qui sombre dans le grotesque à maintes reprises. Les fantômes sont devenus un prétexte pour Lars von Trier qui désormais s’amuse avec ses personnages (Haïti, le pathétique Petit Frère, Hook et sa nouvelle personnalité, l’ambulance folle). L’angoisse laisse place au burlesque, parfois au n’importe quoi comique, qui dessert amèrement les solides bases de cette entreprise ambitieuse.
Le DVD
Le(s) supplément(s) à ne pas rater : Un excellent portrait sur Lars von Trier (51 minutes) qui revient sur la première partie de sa carrière et s’arrête à Breaking the Waves. Le réalisateur, avec toute sa malice et son intelligence, explique son parcours, ses choix artistiques, ses ambitions, sa vision de la vie. Un document précieux qui permet d’en savoir un peu plus sur un génie qui est devenu, aux yeux de ses fans de la première heure, un grand mystificateur (manipulateur ?) depuis Dancer in the Dark.
Image & son : Poisseuse à souhait : on se régale de cette image granuleuse qui amplifie la terreur de certaines scènes. Néanmoins, cela n’empêche pas les épisodes de délivrer une excellente fluidité, notamment dans les nombreux plans-séquences qui traversent l’hôpital de salles en salles. Le son en stéréo a certes des relents passéistes qui servent curieusement l’ambiance de L’hôpital et ses fantômes. Métallique, sourd, on se sait plus exactement ce que l’on entend ; le rendu en est troublant. Enfin, dernier avertissement, le danois peut devenir une langue irritante au bout de quelques minutes.