A l’intérieur
Le 29 novembre 2013
L’étranger en moi aborde la dépression post-partum avec sensibilité, sans complaisance ni misérabilisme. Une réussite.
- Réalisateur : Emily Atef
- Acteurs : Susanne Wolff, Johann von Bülow, Maren Kroymann
- Genre : Drame
- Nationalité : Allemand
- Durée : 1h39mn
- Titre original : Das Fremde in mir
- Date de sortie : 17 novembre 2010
- Plus d'informations : http://www.dasfremdeinmir.de/
- Festival : Festival de Cannes 2008
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– Année de production : 2008
L’étranger en moi aborde la dépression post-partum avec sensibilité, sans complaisance ni misérabilisme. Une réussite.
L’argument : Rebecca (32 ans) et son ami Julian (34 ans) attendent leur premier enfant et en sont ravis. Lorsque Rebecca donne naissance à un petit garçon en parfaite santé, leur bonheur semble complet. Mais Rebecca ne ressent pas l’amour maternel inconditionnel qu’elle était censée éprouver et elle ne sait plus du tout où elle en est. Ne sachant pas vers qui se tourner, elle désespère d’autant plus que son propre bébé est pour elle un parfait étranger. À chaque jour qui passe, son incapacité à s’occuper de son enfant devient de plus en plus évidente. Ne pouvant en parler à quiconque, même pas à Julien, elle sombre dans le désespoir, au point de réaliser qu’elle constitue une menace pour son enfant. Finalement, la gravité de l’état de Rebecca est découverte et elle est internée dans une clinique. Elle commence alors à aller mieux et le fait de pouvoir toucher, sentir et aussi entendre rire son bébé commence à lui manquer...
Notre avis : A-t-on seulement idée de la culpabilité qu’une femme peut ressentir lorsqu’après la naissance de son enfant le bonheur ne la transporte pas, ou pire, que le malaise et le désespoir la gagnent ? C’est la question que se sont manifestement posées Emily Atef (également réalisatrice) et Esther Bernstoff, les scénaristes de L’étranger en moi. Constatant que 10 à 20% des femmes allemandes sont touchées par la dépression post-partum, la cinéaste a décidé de mettre en lumière ce sujet tabou, qu’il est délicat d’aborder tant nos sociétés normalisent la maternité. La thématique est lourde mais Emily Atef a su la rendre accessible dans la souffrance qu’elle évoque. Privilégiant les lumières naturelles et évitant les clichés macabres d’enfermement, elle rend son personnage principal d’autant plus troublant que rien ne transparait du mal intérieur qu’elle est en train de vivre. Jusqu’à ce qu’elle explose, elle semblait poursuivre une vie sans problème.
Susanne Wolff incarne cette femme tourmentée avec brio. Belle, perdue, souhaitant faire face coûte que coûte à la douleur qui gagne son personnage, l’actrice le rend attachant. Pari réussi également pour Johann Von Bülow, son mari qui essaie de l’aider mais qui se montre également tenté d’abandonner, lui-aussi accablé par ce que vit son épouse. Les acteurs ne sont jamais dans le jeu ou la surexposition des sentiments. Le conflit intérieur se ressent à l’écran mais ne peut s’expliquer réellement. En cela L’étranger en moi est une oeuvre troublante : qui est donc cet étranger ? On pense spontanément à l’enfant que l’héroïne attend mais, alors que pendant la grossesse elle paraît si heureuse, "l’étranger" n’est-il pas un mal plus profond qui ronge la jeune mère, comme un sentiment malin qui l’envahit insidieusement jusqu’à en devenir insurmontable ?
Le scénario se révèle bien écrit car il ne prétend pas donner de leçons ou de conseils ; il n’offre aucune certitude quant aux origines du mal et se concentre uniquement sur les parents. Les troubles occasionnés sur l’enfant ne sont pas évoqués ; ils composeraient à eux-seuls un autre film. Vraie réussite, L’étranger en moi est ainsi une œuvre sensible, forte de son interprétation, dont l’opacité psychologique résonne longtemps et soulève de vraies questions humaines et sociales.
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