Kusaku disparue
Le 10 juillet 2011
Enigmatique et en apparence décousu, ce film méconnu du grand Susumu Hani est pourtant habité d’une grâce fragile et d’une véritable urgence poétique.
- Réalisateur : Susumu Hani
- Acteurs : Aya Kunikida, Shau Sûmei, Takuji Hatano, Itaru Oki, Shû Wada
- Genre : Comédie dramatique
- Nationalité : Japonais
- Plus d'informations : http://www.mcjp.fr/francais/cinema/...
- Festival : Art Theatre Guild of Japan (ATG) ou La fabrique d’auteurs
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– Titre original : 午前中の時間割り - gozenchû no jikanwari
– Durée : 1h41mn
Enigmatique et en apparence décousu, ce film méconnu du grand Susumu Hani est pourtant habité d’une grâce fragile et d’une véritable urgence poétique.
L’argument : Reiko revient de vacances et apprend à Shitamura que leur amie Kusako, avec qui elle était partie, est morte. Pour comprendre sa mort, ils décident de visionner le film 8mm de leurs vacances.
Notre avis : Dans Premier amour, version infernale, le film en noir et blanc que Susumu Hani avait réalisé en 1968 sur un scénario de Shûji Terayama, la couleur faisait une irruption inattendue lorsqu’un étudiant surnommé Algebra projetait un film en super huit à caractère fortement autobiographique qui faisait fuir la plupart de ses spectateurs mais bouleversait profondément Nanami et Ken, le jeune couple de protagonistes.
L’Emploi du temps d’une matinée, nouvelle variation sur les hésitations et questionnements de l’adolescence, reprend et développe ce procédé, qui devient même le principe de fonctionnement d’un film qui confronte le 35mm décoloré du présent froid, hostile, indéchiffrable, de Reiko et Susumu, lycéens à la recherche d’eux mêmes, à la texture fragile et aux couleurs irréelles du 8mm de films d’amateurs, témoignages énigmatiques et fuyants d’un passé tout proche et irrémédiablement révolu ressemblant à un rêve énigmatique.
La figure de Kusako, l’étrange jeune fille dont l’éclatante vitalité crève l’écran dès qu’elle apparaît, illumine ces éclats de mémoire à la beauté mystérieuse, magique. C’est elle, la disparue hantant les survivants telle un fantôme, qui est le véritable centre du film et semble en détenir l’insaisissable secret.
Hani est une fois de plus en totale empathie avec ses héros adolescents interrogeant les signes du monde qui les entoure mais aussi avec le jeune prof (de philo ? De littérature ?) essayant de tenir tête à des élèves qui cherchent à le pousser dans ses retranchements mais finissant par craquer et qu’on retrouve, l’air encore plus paumé, au milieu de ses collègues après sa sortie de maison de repos.
Quant à la figure de l’ami rencontré par les jeunes filles au bord de la mer elle ne manque pas d’intriguer, tant est grand l’écart entre le rêveur fantasque et exubérant qui fabrique une montgolfière sur la plage et le jeune homme taciturne travaillant en intérimaire dans un bureau de poste et recherché par la police.
Car L’Emploi du temps d’une matinée laisse beaucoup de questions en suspens et peut déconcerter par sa manière de chercher pas à pas son sens et sa forme en refusant les facilités de la dramatisation, même si de brefs éclats de violence surviennent de ci de là, comme dans la scène où Shitamura se débat contre les policiers qui, le prenant pour le soldat déserteur, veulent de force le faire sortir d’un bar.
L’aspect décousu, au bord de l’inconsistance même, de ce film à la narration fragmentée et pleine de trous béants peut déconcerter. Pourtant la mélancolie incroyablement douce qui l’habite, le frémissement perceptible dans chaque plan et le charme de ses jeunes interprètes lui confèrent une véritable urgence poétique, confirmant l’envergure de Susumu Hani, très grand cinéaste discret et un peu oublié.
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