Le 26 mai 2024
Un film exigeant, itinéraire spirituel proprement habité.
- Réalisateur : Larissa Cheptiko
- Acteurs : Anatoli Solonitsyn, Boris Plotnikov, Vladimir Gostyukhin
- Genre : Drame, Aventures, Film de guerre, Noir et blanc
- Nationalité : Russe
- Distributeur : Potemkine Distribution
- Editeur vidéo : Potemkine
- Durée : 1h50mn
- Reprise: 29 mai 2024
- Titre original : Восхождение
- Date de sortie : 19 mars 1980
- Festival : Festival de Berlin 1977
L'a vu
Veut le voir
– Reprise en version restaurée : 29 mai 2024
– Année de production : 1977
Résumé : L’action du film se déroule en Biélorussie au cours de la Seconde Guerre mondiale. Deux partisans soviétiques sont faits prisonniers par les Allemands. Ils apprennent qu’ils doivent être pendus. L’un d’eux, Rybak, craque et accepte de collaborer ; l’autre, Sotnikov, affronte calmement la mort.
Critique : Le film commence et se termine par des paysages enneigés, bloqués par le froid, immobiles, image d’une nature indifférente aux drames humains. Mais ces plans encadrent une tragédie, elle profondément humaine, tragédie au sens où la mort de Sotnikov, annoncée très tôt, incessamment différée, devient une réalité dans les dernières minutes. Rien d’antique pourtant dans cet itinéraire qui est autant une marche vers la mort qu’une élévation spirituelle, et bien sûr le titre en est un indice évident : l’« ascension », c’est la montée vers le gibet, le chemin de croix, mais aussi vers une acceptation religieuse. À cet égard, les yeux de Sotnikov suffiraient à décrire le trajet : indifférents, puis douloureux, extatiques, compréhensifs, ils incarnent la victoire d’une foi ardente sur la matérialité. Larissa Chepitko sait dépeindre cette matérialité de manière saisissante : la reptation dans la neige (jamais sans doute neige ne fut si concrète), les mains qui cherchent des balles ou peinent à retirer une botte, nombre de plans sont ainsi étirés, allongés jusqu’à épuisement.
De même, la lente marche vers la pendaison semble chercher un point de rupture ou de saturation. C’est que la cinéaste travaille les séquences en une sorte de maniérisme doloriste qui met mal à l’aise, ne cesse de provoquer son spectateur. Son goût des gros plans vise de la même manière un questionnement sur l’humain, le sens de la vie, la conscience, la culpabilité ; rien de léger ici, on est dans Dostoïevski ou presque. Les dialogues y sont sur-signifiants, à la limite de la lourdeur : on pourrait citer nombre de répliques comme : « Avec la mort tout prend fin », « un être insignifiant rempli de la plus ordinaire des merdes » ou « je prendrai tout sur moi » qui disent assez le sérieux inflexible de la démarche.
Pourtant, malgré des pesanteurs certaines (la piéta dans le cachot, le « Judas » jeté à la figure du traître), le film ne cesse de séduire par son jusqu’au-boutisme : aucune facilité, aucun compromis, aucun renoncement. Par les plans très graphiques dans la neige ou l’image quasi expressionniste de la cave, toujours la composition est à la hauteur des enjeux ; bien sûr l’extrême lenteur peut décourager, l’étirement agacer, mais de cette œuvre austère, interprétée alternativement en excès grimaçants ou en jansénisme bressonnien, naît une force, une pureté, qui ne peut que ravir l’amateur de films différents et hors des sentiers battus.
– Ce film a fait partie du coffret Potemkine consacré à Larissa Chepitko et Elem Klimov (sortie le 25 avril 2017)
– Ours d’Or et Prix FIPRESCI - Berlin 1977 / Meilleur film – Festival d’Union soviétique 1977
Galerie photos
Votre avis
Pour participer à ce forum, vous devez vous enregistrer au préalable. Merci d’indiquer ci-dessous l’identifiant personnel qui vous a été fourni. Si vous n’êtes pas enregistré, vous devez vous inscrire.
aVoir-aLire.com, dont le contenu est produit bénévolement par une association culturelle à but non lucratif, respecte les droits d’auteur et s’est toujours engagé à être rigoureux sur ce point, dans le respect du travail des artistes que nous cherchons à valoriser. Les photos sont utilisées à des fins illustratives et non dans un but d’exploitation commerciale. Après plusieurs décennies d’existence, des dizaines de milliers d’articles, et une évolution de notre équipe de rédacteurs, mais aussi des droits sur certains clichés repris sur notre plateforme, nous comptons sur la bienveillance et vigilance de chaque lecteur - anonyme, distributeur, attaché de presse, artiste, photographe. Ayez la gentillesse de contacter Frédéric Michel, rédacteur en chef, si certaines photographies ne sont pas ou ne sont plus utilisables, si les crédits doivent être modifiés ou ajoutés. Nous nous engageons à retirer toutes photos litigieuses. Merci pour votre compréhension.