Empire des sens
Le 11 juin 2007
Atmosphère étrange, vertige des sens. Le désir dans tous ses états dans ce film délicieux et anxiogène.
- Réalisateur : Diane Bertrand
- Acteurs : Olga Kurylenko, Marc Barbé
- Genre : Drame
- Nationalité : Britannique, Français, Allemand
– Durée : 1h40mn
Atmosphère étrange, vertige des sens, étreintes amoureuses. Le désir dans tous ses états dans ce film délicieux et anxiogène.
L’argument : A la suite d’un léger accident de travail, Iris quitte son usine et trouve un emploi d’assistante dans un laboratoire aux activités étranges. Sans vraiment comprendre ce qui se joue sous ses yeux, elle s’engage peu à peu dans une troublante relation amoureuse avec son mystérieux employeur.
Notre avis : Deux corps qui se chevauchent, qui se caressent, se donnent du plaisir. Le sexe dans ce qu’il a de plus sain et de plus simple. Diane Bertrand filme l’acte amoureux avec une sensibilité, une sensualité et une poésie inouïes sans tomber dans l’artificiel ni le graveleux. C’est l’une des nombreuses bonnes raisons qui rendent ce film, adaptation d’un roman de Yoko Ogawa, extraordinaire. D’autant plus extraordinaire qu’il n’est construit qu’avec des éléments très ordinaires (un laboratoire, des escaliers, une chambre). La cinéaste les exploite pour faire bifurquer son récit vers des zones plus sombres et inavouables. Celles des fantasmes et des pulsions interdites, du fétichisme et de la frustration, de l’imaginaire et de l’angoisse. Un film qui respire le chaud comme le froid, où le romantisme le plus mystérieux le dispute à l’érotisme le plus torride.
L’annulaire autopsie avec sa mise en scène subtilement discrète, la déambulation hypnotique, le vertige sensuel, l’inquiétude intérieure qui conduisent tous dans le même labyrinthe de la passion amoureuse. En adoptant le point de vue de son héroïne (Olga Kurylenko) qui, à l’aune de tous les personnages, n’est guère exempte d’ambiguïtés, le film s’enfonce dans le méandre subtil d’un jeu de pistes rationnel jusqu’à l’absurde, dans lequel le fantastique s’insinue dangereusement. En creux, le récit parle de l’alchimie d’une rencontre, du risque de s’abandonner au regard de l’autre et des dangers de se rencontrer. L’imprévu faisant ainsi le sel de la vie.
Mais c’est surtout un grand film silencieux qui choisit courageusement de se taire, ce qui fait un bien fou dans le bavardage cinématographique ambiant. Hédoniste et orgasmique aussi, avec des tentations abstraites, mais solidement rivé au plancher des vaches. Quelque part entre la méta et le physique, le sexe et le sacré. La mise en scène est sensible aux corps, aux couleurs, aux gestes et aux regards pour multiplier les contrepoints ; le récit rivalise de trouvailles qui ne figurent pas dans le roman original (le marin fassbinderien, le croisement de pays, autrement plus convaincant que dans le niais Mon ange) et de références aux contes (Barbe Bleue, Le Petit Poucet, Hansel et Gretel...) ; et le spectateur jubile devant ce poème sombre et pénétrant d’une grâce et d’une beauté confondantes.
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Dodi 1er juin 2005
L’annulaire
Pas grand-chose à ajouter à la critique de Romain Le Vern, qui parle très bien du film.
C’est un film pour le moins atypique, envoûtant, avec des images et une musique très belles.
Je reprocherais quand même au film d’être un peu hermétique... J’étais un peu frustré à la fin qu’il n’y ait pas plus d’explications. Mais en même temps, ça concourt au sentiment d’étrangeté qui persiste longtemps après le film. Et puis le film est ouvert aux interprêtations...
Globalement, "l’annulaire" mérite vraiment d’être vu. Une vraie expérience de cinéma, comme on en a trop rarement l’occasion d’en voir dans le cinéma français.
Georges Ghika 10 juin 2005
L’annulaire
Ce film ne me fait pas trop penser à l’Empire des sens - beaucoup moins audacieux ! - mais plutôt à Gorge profonde... On sent qu’il existe chez les scénaristes le même goût pour les dialogues d’une nullité absolue et les adverbes lourdauds.
– Je viens pour l’annonce
– Je vous attendais. Entrez je vous prie. Allons dans mon bureau, nous serons mieux pour discuter.
Le tout est dit avec le même naturel que Clara Morgane et Marc Dorcel dans la fameuse scène de la secrétaire avec son patron. A moins que ce soit l’inverse...
Bref, tout l’esthétisme s’envole en fumée dès que l’un des « comédiens » ouvre la bouche, à part peut-être Edith Scob qui n’a malheureusement qu’un tout petit rôle. Pour continuer dans la méchanceté, je dirais même que Marc Barbé a autant de sex-appeal que mon pote Marcel et moi lorsque nous sirotons notre whisky-cocke, accoudés au bar du Macumba de Marcq-en-Baroeul.
Les scènes de sexe n’ont rien de transcendent mais elles tiennent le spectateur masculin en haleine grâce à Olga Kurylenko (soit dit en passant, son personnage adore se promener en robe légère sous la pluie, sans parler des nombreux passages sous la douche...). En tant que non spécialiste de cinéma, je dirais qu’on les a déjà vues dans La nouvelle Eve, sans le côté comique, maladroit et touchant.
On ressort malgré tout avec l’envie de lire le roman d’Ogawa qui semble avoir des choses à raconter, lui, donc avec un amour conforté pour les livres et le cinéma muet.
raskol 10 juin 2005
L’annulaire
Je serai moins violent, quoique j’abonde dans le sens de Monsieur Ghika. Quelques réserves concernant Marc Dorcel, qui ne joue pas dans ses films me semble-t-il. Merci de m’éclairer.
Pour ce qui est d’Olga Kurylenko, elle qui rêvait de faire du cinéma, et bien c’est chose faite, elle peut donc s’arrêter... à moins qu’elle ne trouve foison de rôles où il ne lui sera pas nécessaire, comme c’est le cas ici, de prononcer plus d’une phrase d’affilée ou qu’elle n’aura pas à endosser la peau de personnages pourvus d’autres expressions que celle d’un chaton blessé... on suit ses jambes, ses fesses et ses seins avec plaisir, comme dans une pub Obao non censurée, et ce petit haut bleu qu’elle porte pour dormir semble une porte ouverte sur des castings chez Aubade (attention, la concurrence sera rude)... le scénario semble indigent, en tout cas obscure.. rien de pesant dans cette atmosphère à la Amenabar, trop calculée pour vraiment nous impliquer... peu de chance de se raccrocher au narratif, c’est certain.
La mise en scène, comment dire, est certes légère et élégante, comme une mayonnaise allégée...
Un peu comme si Rohmer ne disait pas à ses acteurs "surjouez".. mais "jouez mal"...
c’est à n’y rien comprendre.
babay 10 juin 2005
L’annulaire
De mon côté j’ai plutôt bien apprécié le film. en particulier la langueur qui s’en dégage, les couleurs chaudes et douces, les plans larges poétiques. Du côté des dialogues, ils sont il est vrai un peu limités, mais je ne pense pas que le film tienne sur les dialogues justement. Il y a peu, ils sont là pour ponctuer une ambiance oppréssante qui s’installe doucement. Et ces dialogues épurés à l’extrème renforcent encore cette sensation d’étrangeté.
L’impression quelques jours après avoir vu le film : voluptueux, poétique, oppressant. Plutôt pas mal donc !
vcsf 21 juin 2005
L’annulaire
sensualité, soumission, sexualité...
ce film est un petit bonheur, il sort des sentiers battus et il est vraiment très original. iris, suite à un accident dans une usine d’embouteillage, quitte son travail et cherche un emploi près d’une zone portuaire (c’est un personnage à part entière). elle va trouver un poste de secrétariat dans un laboratoire mystérieux de plus de 75 pièces et chaque matin en partant de sa chambre (partagée) d’hôtel , elle prendra un bateau navette pour rejoindre son employeur qui va impulser une soumission (par l’intermédiaire d’une paire de chaussures) qui sont ces personnes et pourquoi viennent-ils dans ce laboratoire ? que contiennent les bocaux dans les pièces ? est-ce qu’iris restera dans ce labo ? remarquables interprétations de Olga Kurylenko et Marc Barbé...
Blixen 27 juin 2005
L’annulaire
Je me réjouissais d’avance de voir l’adaptation cinématographique d’un roman de Yôko Ogawa, une jeune auteure japonaise dont j’avais apprécié plusieurs livres.
Et je fus bien déçue. Même s’il semble que l’oeuvre soit assez fidèle au roman - l’amie avec laquelle j’y suis allée l’avait lu, pas moi ! -, j’ai trouvé ce film particulièrement glauque.
Le fameux laborantin joue un personnage dont on ne sait rien, ce qui en fait un personnage malsain qui m’a glacée.
Alors, certes, l’ensemble est pour le moins singulier - cette histoire de spécimens que réalise le laboratoire dans lequel la jeune Iris a été embauchée est très étonnante - mais le charme de la jeune comédienne ne parvient pas à dissiper le malaise que j’ai ressenti à la vision de ce film.
Un bon point tout de même : je ne sais pas où ce film a été tourné - je ne l’ai pas trouvé au générique de fin - mais ces images de zones portuaires sont très belles.
Mykelti BuBba 16 décembre 2011
L’annulaire
"L’annulaire" est tout à la fois poétique, mystérieux, pesant et terriblement efficace. L’atmosphère est rendue si particulière par l’effort sur la mise en scène et sur le son. La musique de Beth Gibbons est d’ailleurs particulièrement envoûtante. Les personnages de Diane Bertrand n’ont pas besoin de communiquer oralement, car ils expriment tout par le regard et par les corps. Enfin, Olga Kurylenko, par sa candeur, sa fragilité et sa sensualité, propose une performance de premier plan, dans un registre assez éloigné des films dans lesquels elle tournera par la suite.