Le 11 janvier 2025
Un premier long métrage sensible et sobre, qui transcende le caractère sociétal de son sujet par une écriture fluide et une réelle poésie filmique.
- Réalisateur : Leonardo van Dijl
- Acteurs : Koen De Bouw, Tijmen Govaerts , Claire Bodson, Ruth Becquart, Laurent Caron, Stefan Gota, Tessa Van den Broeck, Pierre Gervais
- Genre : Drame, Teen movie, Film de sport
- Nationalité : Suédois, Belge
- Distributeur : Jour2fête
- Durée : 1h37mn
- Titre original : Julie zwijgt
- Date de sortie : 29 janvier 2025
- Festival : Festival de Cannes 2024
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Résumé : Julie, une star montante du tennis évoluant dans un club prestigieux, consacre toute sa vie à son sport. Lorsque l’entraîneur qui pourrait la propulser vers les sommets est suspendu soudainement et qu’une enquête est ouverte, tous les joueurs du club sont encouragés à partager leur histoire. Mais Julie décide de garder le silence.
Critique : Coproduit par plusieurs sociétés dont Les Films du Fleuve (Delphine Tomson, les frères Dardenne), Julie se tait est le premier long métrage de Leonardo van Dijl. Ce cinéaste belge avait déjà réalisé trois courts dont Stephanie (sélection officielle Cannes 2020), récit axé sur une très jeune gymnaste. Présenté à la Semaine de la Critique 2024, où il a remporté le prix SACD, Julie se tait (coécrit avec Ruth Becquart, qui joue le rôle de la mère de la protagoniste) a également pour cadre le sport. Julie est une lycéenne discrète qui mène une vie sociale semblable à celle des jeunes de son âge. Elle éprouve une véritablement passion pour le tennis, les entraînements pour des compétitions de haut niveau rythmant son existence. La suspension de Jeremy, son coach, à la suite du suicide d’une ancienne joueuse, met Julie au cœur de toutes les attentions. En effet, des groupes de parole sont organisés par le centre sportif pour que les joueuses témoignent sur le comportement potentiellement toxique de leur entraîneur. Julie semble avoir des révélations à faire. Mais Julie se tait… « En écrivant cette histoire, je me suis rendu compte qu’à bien des égards, nous sommes tous Julie. Chacun a des silences en soi, des choses qu’on n’a jamais confiées à personne ou qu’on n’a jamais sues dire. Julie nous permet d’explorer nos silences, qu’il s’agisse d’un mécanisme de défense, d’une forme de résistance, d’une source d’affirmation ou d’une violence ».
- Crédit : Nicolas Karakatsanis
Ces précisions du réalisateur dans le dossier de presse mettent l’accent sur l’aspect central du film, porté par un mini-suspense : Julie se mettra-t-elle à parler ? Une unique mais saisissante séquence où Jeremy apparaît à l’écran, en présence de la jeune fille (l’un des plans fixes les plus forts de ces derniers temps) révèle qu’elle aurait en effet bien des raisons de divulguer des informations sur lui… Alternant les non-dits (et pas seulement en raison du mutisme de l’héroïne) et des passages plus explicatifs, le scénario est rigoureux et ne cède ni au manichéisme, ni aux sirènes d’un énième « dossier de l’écran » sur sujet sociétal, à savoir l’emprise et les abus sexuels dans le secteur sportif, et la société en général. Le thème, qui avait en partie déjà été traité dans Slalom de Charlène Favier, situé dans le milieu du ski, aurait pu conduire aux excès de lourdeur psychologique ou policière, ce qui n’est pas le cas.
- Crédit : Nicolas Karakatsanis
Les silences de Julie font écho à ceux d’autres figures féminines du cinéma, de la Mouchette de Bresson à Émilie Dequenne dans Rosetta, en passant par Isabelle Huppert, dans La dentellière ou, récemment, Emmanuelle Devos dans… Un silence (sur les témoins de l’inceste). Le souvenir du mal-être de ces femmes (pour des motifs certes divers) apparaît dans ces scènes où la jeune fille vit manifestement un trauma, irradiées de mystère et parfois nimbées d’une poésie visuelle et sonore (la partition musicale de Caroline Shaw) qui n’édulcore en rien la gravité du propos. Du premier plan où Julie sort du cadre après avoir envoyé quelques balles, jusqu’au plan final où la caméra s’attarde sur elle, la mise en scène est cohérente et sobre, en harmonie avec l’écriture. Et les acteurs non professionnels (dont la jeune Tessa Van den Broeck, étonnante) se mêlent avec harmonie à des interprètes chevronnés admirablement dirigés, comme Koen De Bouw (le père) et Claire Bodson (la directrice du centre). Avec ce coup d’essai qui est un coup de maître, Leonardo van Dijl apparaît clairement comme une révélation importante du cinéma belge, de la trempe d’un Lukas Dhont.
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