Croque la pomme...
Le 10 mars 2009
Désir, perversion, domination sont les leitmotivs de cette première œuvre fascinante où les deux actrices, Isild Le Besco et Judith Davis envoûtent et instaurent progressivement un malaise tenace.
- Réalisateur : Sophie Laloy
- Acteurs : Fabienne Babe, Isild Le Besco, Édith Scob, Johan Libéreau, Judith Davis, Marc Chapiteau
- Genre : Drame, LGBTQIA+
- Nationalité : Français
- Date de sortie : 11 mars 2009
- Plus d'informations : Le site officiel
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– Durée : 1h36mn
Désir, perversion, domination sont les leitmotivs de cette première œuvre fascinante où les deux actrices, Isild Le Besco et Judith Davis envoûtent et instaurent progressivement un malaise tenace.
L’argument : Marie quitte sa famille pour aller vivre à Lyon et y étudier le piano au conservatoire. Pour des raisons économiques, elle partage l’appartement d’Emma, une amie d’enfance, qui y vit seule depuis la mort de son père et la désertion de sa mère.
Marie se soumet aux règles de vie imposées par sa colocataire, toujours plus oppressante. Emma la fascine, la domine, la bouleverse. Marie se débat entre son désir pour elle et son envie de lui échapper, puisant sa force dans l’amour pour le piano.
- © Little Stone Distribution
Notre avis : La séquence d’exposition de Je te mangerais présente, avec naïveté, le départ du foyer familial, d’une jeune fille de 18 ans, Marie (Judith Davis). Entre rires et larmes, cette femme en devenir est malgré tout impatiente de vivre son rêve : étudier au conservatoire afin de devenir concertiste - de renom, cela va sans dire, car son ambition est d’égaler la talentueuse Brigitte Engerer. Mais, l’entrée dans l’indépendance est somme toute relative car Marie n’a aucune contrainte financière à assumer (ses parents se chargent de ce « détail »), vit chez une amie d’enfance, Emma (Isild Le Besco), et n’est donc pas confrontée à la solitude liée à un déménagement. Les avantages sans les inconvénients.
- © Little Stone Distribution
Cependant, il ne faut pas se fier aux apparences... Le rêve prend peu à peu la forme d’un cauchemar. La bienveillance d’Emma ne serait qu’intéressée, guidée par un désir de possession et de domination. La réalisatrice, Sophie Laloy, instaure une tension dramatique en crescendo. Le décor se réduit progressivement aux seuls murs de l’appartement : l’étouffement envahit autant les personnages que les spectateurs. La situation semble inextricable ; il n’y a aucune issue au sens propre comme au figuré, car la « perte » des clés confine la pianiste chez elle. La jeune fille se laisse dévorer par l’amour dévastateur de sa colocataire. S’instaure rapidement entre elles une intimité à laquelle aucune n’arrive à échapper, dépassées par la force de leur attirance, autant que par leur dégoût réciproque. Leurs corps violents, entremêlés, se cherchent avec passion : au cours d’une scène, posée à même le sol, la caméra capte l’instant où Marie cède fébrilement à Emma. Le plan est volontairement décadré afin que le parquet soit largement visible : les deux femmes s’enferrent dans un engrenage destructeur.
Je te mangerais est une démonstration sur la relation dominant/dominé dont les rapports de force sont susceptibles d’être inversés à tout instant ; la plus fragile n’étant pas toujours celle que l’on croit.
- © Little Stone Distribution
Dans cette œuvre, la musique n’est pas un accompagnement mais un « personnage » à part entière. Au fur et à mesure que la délicate musicienne maîtrise les morceaux qu’elle chérit, elle puise en elle la force de combattre, de multiplier les conquêtes, d’enfermer sa colocataire dans une dépendance affective et morale. A l’image de son morceau fétiche, Pavane pour une infante défunte de Maurice Ravel, l’héroïne danse pour émerveiller et séduire sa cour, masculine. L’innocence emprunte de séduction calculée, elle illumine son environnement pour mieux s’y intégrer... et le détruire. Je te mangerais est une première œuvre bouleversante et étouffante, où le désir et le masochisme en huis clos fascinent.
- © Little Stone Distribution
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