Hommage à Hugo Santiago
Le 28 février 2018
Réalisé en 1969, sur un scénario co-écrit par Jorge-Luis Borges, Adolfo Bioy Casares et Hugo Santiago, Invasion a mené pendant trente ans une vie souterraine de film culte. Etendard d’un certain cinéma argentin, il reste une référence absolue, objet d’études (Robbe-Grillet l’avait intégré au programme de ses cours), de thèses, d’analyses. Tentative d’appréhension d’un univers...

- Réalisateur : Hugo Santiago
- Acteurs : Olga Zubarry, Lautaro Murúa, Juan Carlos Paz
- Genre : Fantastique
- Nationalité : Argentin
- Durée : 2h08mn
- Titre original : Invasión
- Date de sortie : 9 octobre 2002
- Festival : Festival de Cannes 1969

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L’argument : Une ville imaginaire, Aquilea, est aux mains d’envahisseurs mystérieux. On n’en saura guère plus. La ville ? Ce pourrait être Buenos Aires... Ou peut-être pas. Ses rues se croisent à angle droit, comme un échiquier où vont s’affronter les résistants, en costumes sombres, et l’ennemi, vêtu de clair. Une ville déserte, sans enfants, sur laquelle pèse une menace diffuse, indicible, à l’image de la résistance qui s’organise. Un petit groupe d’hommes, apparemment sans histoires, qui étirent des vies de mélancolie, sans amour, sans illusions. La Milonga [*]de Manuel Flores - jouée par l’un des résistants, dans un des moments les plus poignants du film - restitue la quintessence de ce mal-être, du destin implacable vers lequel ils s’acheminent, et qui va les rendre exemplaires, sans qu’aucun d’entre eux, pourtant, n’y voie autre chose que la vie, telle qu’elle doit être.
Notre avis :
Vendran los cuatro balazos
y con los cuatro el olvido ;
lo dijo el sabio Merlin
morir es haber nacido [**]
Les événements se mettent en place malgré les personnages et les envoient face à eux-mêmes. Devant la mort, l’un d’eux observera simplement : "Il me restait à savoir si j’étais courageux." Leur seule certitude est justement la mort, vers laquelle ils avancent les yeux ouverts, comme une évidence.
Invasion est un film noir, où Hugo Santiago mêle promesses et désespoir dans un combat infini contre soi-même, le temps qui passe, la mort qui rôde. Comme cet ennemi impalpable, qui marque parfois sa présence par des alignements de phares de voitures, brillant sur des parkings comme des yeux dans la nuit. Une lumière crue, des contrastes violents, des dialogues réduits à l’essentiel puis peu à peu remplacés par des bruits, de plus en plus aigus, de plus en plus violents, insupportables. Le sacrifice aura lieu, inéluctable, proposant un terme à une histoire éternelle. D’autres rejoueront la tragédie, comme un recommencement après même que le mot "FIN" a envahi l’écran. Pas de questions... C’est la vie qui se joue.