Le petit Chaperon rouge
Le 21 août 2020
Un diamant brut du thriller psychologique, prenant peu à peu la forme d’un duel moral titanesque. Ellen Page est une révélation.
- Réalisateur : David Slade
- Acteurs : Patrick Wilson, Sandra Oh, Ellen Page
- Genre : Drame, Thriller
- Nationalité : Américain
- Distributeur : Metropolitan FilmExport
- Durée : 1h44mn
- VOD : PlayStore, YouTube, Cinemasàlademande
- Titre original : Hard Candy
- Date de sortie : 27 septembre 2006
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Résumé : Tout commence par un chat entre deux internautes aux pseudonymes de Thonggrrrrrl14 et Lensman319. Les deux personnes, respectivement Hayley Stark, adolescente de quatorze ans (Ellen Page, alors âgée de dix-sept ans) et Jeff Kohlver (Patrick Wilson), photographe de trente-deux ans, se mettent d’accord pour se donner rendez-vous. Ils font connaissance dans un café-restaurant local, avant de se rendre au domicile de Jeff. Hayley entame un strip-tease tandis que Jeff la photographie. L’homme tombe ensuite inconscient et se réveille attaché, réalisant que Hayley l’a drogué et le prend en otage, l’accusant d’être un pédophile et un assassin d’enfants. Jeff proteste et affirme son innocence tandis que Hayley tente de le faire avouer, et commence à lui infliger des sévices…
Critique : Tout commence par un tchat entre deux utilisateurs à l’alchimie évidente. L’une semble être une adolescente américaine en mal de reconnaissance au visage angélique, l’autre un individu peu recommandable, se cachant derrière de belles phrases et un champ lexical pré-calculé pour charmer l’audience. Ils décident en toute connaissance de cause de se rencontrer pour une shooting photo peu commune. Le mal est fait. La partie de cache-cache s’est trop éternisée, les masques lubriques et fallacieux sont tombés, il est temps de passer aux choses sérieuses, indiscipliné, réservé aux adultes. Hard Candy est une expérience unique et extrêmement traumatique. Le spectateur a le regard alerte, les genoux tremblants et le palpitant à 180 battements par minute.
David Slade, le réalisateur, conscient du caractère plaisamment ordurier de son processus de création, laisse sa caméra virevoltante s’attarder sur les regards et la gestuelle de ses personnages désespérés, tous deux parfaitement incarnés par des interprètes en grande forme, Ellen Page en tête, qui trouve un premier rôle de taille où il aurait été si facile de plonger à bras-le-corps dans le sadisme pur et dur et l’auto-parodie, là où l’habileté démiurgique demeure le maître-mot. Hard Candy possède une atmosphère poisseuse, caniculaire, à la fois sale et clinique, à la lisière du film de genre expérimental, car David Slade ne cesse de repousser ses protagonistes, son histoire et sa diégèse dans ses retranchements les plus abjects et paradoxalement jouissifs de l’âme humaine. Nul n’aurait anticipé la psychopathie de cette étudiante bien sous tous rapports, nul n’aurait soupçonné les tendances pédophiles de ce photographe artistique au professionnalisme avéré. Pourtant, plus le long métrage avance et recule l’échéance de l’implosion tant redoutée, plus l’écriture gagne en nuances, nos deux personnages s’évertuant à briser leurs moules conceptuels, tout en dégageant une aura davantage symbolique que démonstrative. Le paramètre "huis clos" accentue davantage l’aspect profondément malaisant que constitue cette confrontation entre deux visions d’un même point névralgique, l’origine du Mal.
Le vertige aura duré jusqu’à la dernière seconde, tant Hard Candy déploie son nihilisme assumé avec une puissance émotionnelle rarement atteinte dans le cinéma de genre. La notion de justice y demeure extrêmement floue, tout comme les motivations réelles ou tangibles de son couple vedette en proie à de violents troubles existentiels. Mais l’essentiel est ailleurs. Hard Candy vaut surtout son pesant d’or pour le saisissement qu’il arrive à susciter chez le spectateur, non sans un certain goût pour la violence sourde et les sévices corporels à rallonge, ainsi que son propos magnifique concernant la condamnation légitime du crime sexuel. Se faire justice soi-même ? Oui... mais à quel prix ? La conclusion arrivée, on aura peut être un élément de réponse. Cette œuvre difficile d’accès, à la morale jusqu’au-boutiste, saura déceler votre part d’ombre avec une facilité troublante.
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