Le nouveau Nanni Moretti à Cannes
Le 17 avril 2011
En habitué du festival, le cinéaste italien revient en compétition, cinq ans après Le Caïman, avec une comédie papale qui s’annonce corrosive.

- Réalisateur : Nanni Moretti
- Acteurs : Michel Piccoli, Nanni Moretti, Margherita Buy
- Genre : Comédie dramatique
- Nationalité : Français, Italien
- Festival : Festival de Cannes 2011

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– Durée : 1h42
En habitué du festival, le cinéaste italien revient en compétition, cinq ans après Le Caïman, avec une comédie papale qui s’annonce corrosive.
L’argument : Le cardinal Melville vient d’être élu pape et prend le nom Celestin VI. En proie en doute, tombé en dépression, il entreprend une psychanalyse avec Brezzi.
Notes : Onzième long-métrage de l’incontournable Nanni Moretti, Habemus papam est aussi son cinquième à être présenté en compétition officielle à Cannes. Le réalisateur, étendard d’un cinéma italien engagé et caustique (du moins de ses restes), demeure une valeur sûre du festival, qui le vit remporter le prix de la mise en scène en 1994 (pour son œuvre autobiographique Journal intime), et surtout la Palme d’Or pour La Chambre du fils, magnifique mélo qui bouleversa la Croisette en 2001. Revenu à un cinéma plus politique et satirique ces dernières années, après le portrait détourné et non autorisé de Berlusconi (dont il est un ennemi idéologique déclaré) dans Le Caïman, Moretti s’attaque aujourd’hui à l’autre grande institution de son pays : le Vatican. En contant le parcours d’un pape fraîchement institué mais doutant de sa foi, le cinéaste a les moyens de jeter un grand pavé (romain) dans la mare cléricale. Moretti n’en est d’ailleurs pas à un coup d’essai en la matière puisqu’il abordait déjà la religion de front dans La messe est finie, qui décrivait déjà une crise de croyance et fit beaucoup parler de lui en son temps.
Habemus papam emprunte son titre aux premiers mots prononcés par les cardinaux, suite à leur décision en conseil, lors de leur allocution solennelle aux fidèles chrétiens. Tout un symbole en somme, avec cette fameuse "fumée blanche" qui boucle les conclaves, que Moretti prend à bras le corps avec gourmandise. Pour le rôle du pape "Celestin VI", le réalisateur s’est offert les services de Michel Piccoli, monstre parmi les monstres, qui n’en est pas à un scandale cannois près (après La Grande Bouffe de Ferreri). C’est sa première collaboration avec Moretti, qui lui donnera lui-même la réplique dans un rôle de psychiatre, ou comment régler des tourments de sa foi par des biais freudiens (!). Les premières images annoncent un ton enlevé, plutôt léger, dans la tradition de la comédie satirique à l’italienne, avec un petit air de Discours d’un roi. Suite aux premières projections de presse romaines, les échos furent d’ailleurs un peu timides : les ecclésiastes qui ont vu le film l’auraient plutôt apprécié, ne le jugeant pas "anticlérical", quitte à le conseiller au Sérénissime Benoît XVI en personne pour une séance du soir ! Des foudres vaticanes limitées, pour une œuvre qui ne devrait sortir ses crocs qu’à moitié.