Pêche qui roule
Le 2 juin 2011
Yuki Kawamura filme la famille, le deuil et la nature avec un lyrisme sans emphase dans ces deux moyens-métrages à la beauté poignante.
- Réalisateur : Yuki Kawamura
- Genre : Drame, Documentaire, Expérimental
- Nationalité : Japonais
- Plus d'informations : http://www.yukikawamura.com
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– Durée : 36mn (Grandmother ) et 37mn (Senko)
Yuki Kawamura filme la famille, le deuil et la nature avec un lyrisme sans emphase dans ces deux moyens-métrages à la beauté poignante.
L’argument :
– Grandmother : La grand-mère du cinéaste Yuki Kawamura meurt après cinquante jours de coma ; aux côtés de l’ensemble de la famille, nous l’accompagnons dans cette épreuve. C’est l’opportunité pour chacun de se réfléchir dans le deuil, et au delà de ça, dans la vie, ses formes multiples, ses disparitions comme ses ressources inépuisables, et les signes de son infinie diversité. La beauté de la vie est dans l’eau, la brume et l’écume, dans la mousse et les arbres, dans le visage mourant de sa grand-mère et dans l’attention, l’affection et les plaisanteries de sa famille, dans chaque monde, chaque souffle de ses enfants. (Grand prix du court métrage, Cinéma du Réel 2010).
– Senko : Une jeune famille japonaise est confrontée à la maladie de sa mère. Ce court-métrage impressionnant nous montre par des images profondément symboliques comment Yu et son père réagissent à la possibilité de la mort, et comment cela affecte la vision de la vie d’un jeune enfant. (Prix du jury œcuménique - Festival International du Film Court d’Oberhausen 2008)
Notre avis : Installé a Paris depuis 2000, Yuki Kawamura réalise des installations vidéo en collaboration avec des musiciens (Yoshihiro Hano, Bruno Lefort) et a égalément signé trois courts métrages. Si ses oeuvres font souvent penser à celles de sa compatriote Naomi Kawase on y reconnaît aussi l’influence, revendiquée, de Tarkovsky, Antonioni ou Hou Hsiao Hsien.
C’est à ce dernier, et à son maître Ozu, que l’on pense souvent en voyant Senko, le premier film de fiction de Kawamura, réalisé en 2008.
La tragédie familiale (la mort de la mère) y est dite sans dramatisation forcée, en une suite de plans paisibles : une conversation dans la chambre d’hôpital où la femme alitée demande à son mari de lui apporter une pêche ; le mari de dos, avançant maladroitement à vélo dans un vaste paysage crépusculaire, s’arrêtant pour ramasser les pèches qu’il vient de laisser tomber puis remontant sur le vélo pour repartir ; la famille réunie en silence autours du cercueil de la mère.
L’attention aux gestes infimes et aux moments où il ne se passe presque rien (le père et le fils au bain, le petit garçon libérant la grenouille), les plans magnifiques d’insectes, de fleurs, de paysages, instantanés sublimes saisissant les mouvements à peine perceptibles d’une nature apparemment immuable et toujours changeante, font de Senko - étincelle un poème célébrant sans emphase la splendeur du monde et la fragilité, déchirante et précieuse, de la vie.
La légèreté et la malléabilité de l’outil video permettent à Kawamura d’échapper à toutes les règles établies (il n’hésite pas à saturer l’image en filmant à contre jour) et à toutes les crispations narratives ou techniques pour faire affleurer, sans avoir jamais l’air de la solliciter, une émotion de la plus belle eau.
Le documentaire Grandmother (2009) n’est pas moins beau. Kawamura y filme sa famille réunie à l’hôpital autour de sa grand-mère plongée dans le coma puis pour les funérailles de celle-ci.
Filmant de très près le visage de la vieille dame, le cinéaste ne cède pas au voyeurisme. La maladie et la mort, regardées en face, ont simplement leur place entre les magnifiques plans de paysages, l’équipage d’un bateau de pêche posant face à la caméra ou le rituel des funérailles. L’eau est ici omniprésente et apporte la note d’apaisement qui ne rend pas moins insoutenable la mort d’un être proche mais permet au regard de ne pas s’aveugler dans la douleur.
Car ce poignant film de deuil est aussi une irrésistible invitation à ouvrir les yeux sur le monde.
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Le DVD
Distribué par Lowave et ADAV, le double DVD réunissant ces deux merveilles est disponible aussi dans plusieurs points de vente notamment à Paris, à la librairie du Centre Pompidou et au Palais de Tokyo.
Les suppléments
Pas de suppléments sur les DVDs. Il faut se rendre sur le site du cinéaste pour avoir plus d’informations. Signalons que chacun des deux DVDs est double face (NTSC et PAL), que les films sont chapitrés et que sont proposés des sous-titres français (version PAL uniquement) et anglais.
Image
Ces films provoquent d’abord un émerveillement visuel et le transfert en DVD leur rend parfaitement justice. Si l’outil video accuse parfois ses limites dans les plans larges on est ébloui par l’intensité des couleurs et une définition dans l’ensemble plus que satisfaisante.
Son
Une stéréo d’une belle présence et d’une parfaite lisibilité rend justice au travail de l’ingénieur du son François Collin et aux compositions de Yoshihiro Hanno. La musique intime et universelle de ces films peut ainsi résonner en nous sans obstacle.
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