Good Luck Algeria - la critique du film

Critique : Au cœur du débat sur la bi-nationalité, ce long-métrage tombe à point. S’inspirant de l’aventure de son frère qui a concouru pour les Jeux olympiques d’hiver sous la bannière de l’Algérie à Turin en 2006, le réalisateur nous sert une comédie sociale qui traite tant de l’entreprise et du sport que de la famille et des racines. Trop de sujets tuent l’intrigue. Et puis, l’émotion étant toute entière concentrée dans l’histoire de cette famille multiethnique (Samir est certes algérien, ce qui ne l’empêche pas d’avoir une mère française et une épouse italienne) tolérante et joyeuse, on s’attachera surtout à la suivre dans sa quête du vivre-ensemble. Les scènes colorées et vives au milieu de la famille algérienne nous font regretter que tout le film n’ait pas été consacré à cette réflexion sur l’héritage culturel et familial.

© Ad Vitam

À ce moment-là, on est en totale empathie avec Sam. Il ne parle pas arabe. Habitué au rythme d’action à l’occidental, il doit composer avec la façon dont les Algériens « prennent le temps ». Enfin, en découvrant que son cousin a appelé sa fille Jihad et son fils Oussama, il comprend la différence de vie et de culture entre eux, malgré les liens du sang. Sami Bouajila, passant habilement de l’humour à l’émotion, incarne avec justesse ce jeune homme à la fois lucide et rêveur. Le voir se débattre patiemment et gentiment entre les méandres administratifs et les embûches dues à la lourdeur des relations franco-algériennes ne manque pas de piquant. La beauté de cette histoire tient aussi au fait qu’elle n’est pas bien loin d’être une fable poétique, remplie de personnages bienveillants. Le père, un adorable vieux monsieur de plus de quatre-vingt ans, interprété par comédien presque débutant, est un homme parfait (trop peut-être ?) à la générosité infinie. Il ne rêve que d’intégration réussie pour ses enfants. Il privilégie l’humain à la notion de patrie ou d’héritage. Le couple qu’il forme avec la magique Hélène Vincent fait fondre de bonheur. D’origine française, elle a fait le pari de l’intégration inverse. Elle a appris l’arabe et elle est tout à fait à l’aise avec les us et coutumes du pays de son mari. Elle est le lien entre les deux cultures que portent leurs enfants. À côté d’elle, Chiara Mastroianni, épatante de naturel dans le rôle de cette femme, à la fois douce et déterminée, qui permet à son aventurier de mari, quelque peu déconnecté des réalités de la vie, d’assurer la réalisation de ses projets, même les plus fantaisistes. Elle symbolise aussi la voie de l’espoir. Il n’est pas loin le temps où la méfiance vis-à-vis de l’étranger était focalisé sur l’Italien désormais devenu européen, comme elle l’est aujourd’hui envers les Maghrébins. Et pour compléter cette smala sympathique, il ne faut pas oublier Franck Gastambide (Stéphane, l’ami d’enfance de Sam), avantageusement dépouillé de son habituel look de mauvais garçon de banlieue.
Avec ses dialogues ciselés et vifs et sa mise en scène bien rythmée, ce premier long-métrage a tout d’un grand. En 1994, les États-Unis avaient produit le film Rasta Rockett. Là aussi, il était question de sports d’hiver, de tolérance et de choc des cultures. Son succès dans le monde avait été colossal. Nous n’en souhaitons pas moins à ce film réconfortant sur notre capacité à vivre la mixité.