Le 4 décembre 2020
Une relecture de la légende œdipienne à l’heure d’Internet. Malgré une mise en scène un peu figée, ce téléfilm retient l’attention.
- Réalisateur : Marcus Richardt
- Acteurs : Katja Riemann, Nils Rovira-Muñoz, Elisa Schlott
- Genre : Drame
- Nationalité : Allemand
- Distributeur : Arte
- Durée : 1h45min
- Date télé : 4 décembre 2020 20:55
- Chaîne : Arte
- Date de sortie : 4 décembre 2020
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Résumé : Un jeune homme vit reclus dans sa chambre depuis deux ans. Désespérée, sa mère va travestir son identité pour renouer le dialogue... sur Internet.
Critique : Un couple sur la plage qu’on croirait sorti d’une photographie de Martin Parr, avec des couleurs saturées. La mère joue avec son fils, le père s’éloigne pour se figer face à la mer. Puis il amorce un mouvement latéral, parallèle à la ligne d’horizon, pour sortir du champ. Bientôt, l’homme est parti, "sans dispute, sans explication", comme le résume tout simplement sa femme, démunie.
Ce qui suit est hanté par le deuil de l’absence, dans des couleurs froides : les années ont passé. Kristin et son fils, devenu une sorte d’hikikomori, vivent la lourdeur du quotidien à travers des existences parallèles, plombées par le chagrin. Impossible pour eux d’envisager la moindre interaction. Impossible pour l’héroïne de comprendre ce qu’elle a "fait de mal". La première demi-heure du téléfilm s’écoule comme un lent poison que serait devenu ce passé qui ne passe pas. Les divertissements auxquels consent Kristin n’y font rien : cours de danse et soirées ne la rassérènent pas. Mais il reste le virtuel, qui permet l’anonymat et profile une bifurcation tout aussi symbolique qu’intéressante, parce qu’elle nous ramène en territoire œdipien : l’absence du père provoque un scénario numérique qui transite par un forum et suppose évidemment le mensonge de la mère, tandis que, comme le héros tragique de l’Antiquité, David se méprend sur une identité. Erreur fatale, disent à la fois le mythe et l’écran. Les mots s’enchaînent dans l’intimité d’une conversation : le spectateur pressent le drame, à l’aune de l’éternel antagonisme entre principe de plaisir et principe de réalité. Le fragile David, rebaptisé par antithèse Goliath96 sur le net, tombe peu à peu amoureux de Cinderella97, la bien nommée. Cependant, le conte de fées n’existera pas et pour cause.
Si la multiplication des situations virtuelles engendre une mise en scène plutôt figée et des échanges d’abord répétitifs sur les cerfs-volants, si l’on peut regretter que, selon un synopsis attendu, le jeune homme devienne de plus en plus visible à mesure qu’il s’enfonce dans son fantasme, si le choix du montage parallèle pour documenter le quotidien des deux communicants paraît une évidence trop visible, l’histoire retient tout de même l’attention, cheminant selon un itinéraire initiatique, une expérience finalement douloureuse, mais nécessaire.
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