Monstre sacré
Le 27 octobre 2024
– Sortie de Godzilla Minus One / Minus Color les 2 et 3 novembre 2024 : version en noir et blanc
- Réalisateur : Takashi Yamakazi
- Acteurs : Ryūnosuke Kamiki, Sakura Andō, Hidetaka Yoshioka, Yūya Endō, Munetaka Aoki , Minami Hamabe, Yuki Yamada
- Genre : Science-fiction, Action, Film de monstre
- Nationalité : Japonais
- Distributeur : Piece of Magic Entertainment France
- Durée : 2h05mn
- Reprise: 2 novembre 2024
- Titre original : Gojira -1.0 / ゴジラ-1.0 (マイナスワン)
- Date de sortie : 7 décembre 2023
- Voir le dossier : Godzilla
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Les jeudi 7 et vendredi 8 décembre 2023, Godzilla Minus One avait envahi une trentaine de cinémas français pour des projections exceptionnelles, dont certaines en iMAX : le raz-de-marée qu’il avait alors provoqué amène le Roi des Monstres à faire son retour fracassant dans près de trois cents salles.
Résumé : Le Japon se remet à peine de la Seconde Guerre mondiale qu’un péril gigantesque émerge au large de Tokyo, Godzilla. Koichi, un kamikaze déserteur traumatisé par sa première confrontation ale monstre, voit là l’occasion de racheter sa conduite pendant la guerre.
Critique : Godzilla est définitivement une créature coriace : depuis le film culte d’Ishirō Honda sorti en 1954, le cinéma, à la fois au Japon et aux États-Unis, ne cesse de voir resurgir la bête, figure ironiquement allégorique de l’holocauste nucléaire qui mit un terme à la conflagration entre les deux pays. Si le premier opus était une indéniable réussite, la saga, dont peu d’épisodes ont atteint nos écrans, nous a ensuite proposé du bon, du moins bon, voire du très mauvais : la coïncidence qui permis aux Français de visionner Godzilla Minus One moins d’une semaine après le trailer de Godzilla x Kong : The New Empire nous a, par exemple, permis de mesurer le gouffre qui sépare la franchise japonaise de son spin-off américain.
Avec ce nouveau chapitre, la Tōhō donne le coup d’envoi, avec certes une petite année d’avance, de la célébration du soixante-dixième anniversaire de sa licence-phare : le film constitue, selon le décompte officiel de la firme, la trentième occurrence cinématographique japonaise du célèbre kaijū, à laquelle s’ajoutent ses déclinaisons en mangas, en animes, en séries ou en jeux vidéo. Ce ne sont toutefois pas moins de sept années qui se sont écoulées depuis sa dernière apparition dans les salles obscures du Pays du Soleil Levant, dans Shin Godzilla de Hideaki Anno.
- © Toho Co., Ltd
L’action de Godzilla Minus One se situe avant la première manifestation du Roi des Monstres, tant dans la diégèse de la saga que dans les salles obscures, en 1954 : elle se déroule plus précisément dans les tout derniers jours de la Seconde Guerre mondiale en 1945, puis durant les deux années suivantes. Il s’agit d’une première, qui permet à son réalisateur non seulement d’effectuer un retour aux sources en refaisant de Godzilla le fléau, auteur de destructions dantesques, qu’il était à l’origine, mais également de procéder à une sorte de reboot qui puisse s’abstraire des autres films, même si ce sont encore des essais nucléaires américains dans le Pacifique qui font muter le saurien.
Ce que l’on peut donc qualifier de prequel, (d’où le -1 du titre), suit un kamikaze qui s’est dérobé à sa mission-suicide en prétextant une avarie matérielle et se retrouve, de retour au Japon, flanqué d’une jeune voleuse qui a recueilli un nourrisson orphelin : une occasion pour le réalisateur de procéder à une charge antimilitariste, mais aussi et surtout de doubler la trame traditionnelle des kaijū eiga en faisant de son film un drame historique. Ainsi, dans le long-métrage, les survivants des bombardements américains doivent, malgré l’affliction et le dénuement dans lesquels vit le Japon d’après-guerre, affronter une nouvelle apocalypse en ne comptant que sur eux-mêmes, puisque ni l’armée, ni les pouvoirs publics ne sont en mesure de les aider : faut-il y déceler une allégorie de la gestion chaotique par le gouvernement japonais de la crise sanitaire provoquée par la Covid-19 ?
- © Toho Co., Ltd
À l’écriture, derrière la caméra et aux effets visuels, officie Takashi Yamazaki, le réalisateur du surprenant Returner (2002) et plus récemment de Lupin III : The First (2019) : sa maîtrise des technologies numériques s’avère, dans Godzilla Minus One, un atout, en particulier lors des scènes où des foules s’enfuient paniquées devant la puissance destructrice du kaijū. Le cinéaste avait d’ailleurs déjà, en entame d’Always : Sunset on Third Street 2 (2007), filmé une séquence fantasmée de destruction de Tokyo par le Roi des Monstres et supervisé, depuis, les effets spéciaux de Shin Godzilla.
Dans cet opus, l’équipe du film a choisi de revenir à l’apparence qu’avait la créature dans les films de la période « Versus » (1989-1995) et de la Millenium era (1999-2004), en s’éloignant volontairement de l’apparence conçue, aux États-Unis, par Legendary Pictures pour le MonsterVerse. Le monstre reste néanmoins en images de synthèse, puisque la technique traditionnelle de la suitmation, qui consistait à filmer des acteurs dans des costumes, a été définitivement abandonnée après Godzilla : Final Wars (2004) de Ryūhei Kitamura, qui marquait les cinquante ans de la licence.
- © Toho Co., Ltd
Si plaisant soit-il, le long-métrage n’est pas exempt de défauts : on regrettera ainsi une morale quelque peu discutable sur le sentiment de culpabilité du kamikaze déserteur, des scènes pour le moins mélodramatiques, pour ne pas dire tire-larmes, et des personnages secondaires dont l’apparence et la psychologie tournent trop souvent au cliché. Le plan élaboré par un professeur Nimbus nippon pour vaincre le monstre confine pour sa part au ridicule. Mais la bande originale de Naoki Satō, dont les cuivres renouent avec le souffle de la partition de Sword of the Stranger (2007), confère à l’ensemble une dimension épique qui ne peut qu’emporter l’adhésion du spectateur.
Au Japon, le film a été diffusé en MX4D, une technologie qui accentue les scènes d’action au moyen d’effets spéciaux intégrés dans la salle : durant la projection, les sièges tremblent, les lumières vacillent, du vent souffle et de la fumée jaillit à chaque apparition du gigantesque saurien. Mais, même sans ces procédés immersifs, on retrouve, en visionnant Godzilla Minus One, le plaisir du cinéma de Georges Méliès, d’une époque où les films étaient des attractions foraines pour amateurs de sensations fortes : et la reprise du thème original du premier Godzilla, composé par Akira Ifukube, finit de faire du long-métrage un spectacle prodigieusement régressif…
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