Le 28 janvier 2017
Babak Anvari signe un film de genre intimiste et minimaliste particulièrement efficace. L’horreur insidieuse y côtoie un discours au parti pris féministe dans le contexte de la guerre entre l’Iran et l’Irak qui agita la décennie 80.
- Réalisateur : Babak Anvari
- Acteurs : Narges Rashidi, Bobby Naderi, Avin Manshadi
- Genre : Épouvante-horreur
- Nationalité : Britannique, Qatarien, Jordanien
- Distributeur : Netflix
- Durée : 1h24mn
- Festival : Gérardmer 2017
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– en VOD sur Netflix depuis le 07/01/17
Résumé : Téhéran, 1988. Dans le conflit qui oppose l’Iran à l’Irak, voilà huit ans que la ville est la cible de bombardements. Après le départ de son mari au combat, Shideh doit élever seule leur fille Dorsa. Quand le toit de leur immeuble est touché par un missile qui – miraculeusement – n’explose pas, Shideh semble progressivement perdre pied au fur et à mesure du comportement de plus en plus étrange de Dorsa. Essayant de trouver un sens à ces changements soudains chez sa fille, Shideh apprend par un voisin superstitieux que ce missile a dû transporter avec lui un djinn, une force surnaturelle qui voyage avec le vent et qui cherche depuis à posséder sa fille. Shideh n’a alors d’autre choix que celui d’affronter l’esprit malveillant pour réussir à sauver Dorsa.
Notre avis : Prix H.R Giger « Narcisse » du meilleur film à Neuchâtel et dernière petite sensation de Sundance, le premier long-métrage signé par le réalisateur d’origine iranienne Babak Anvari n’aura pas laissé indifférent lors de sa tournée des festivals en 2016. Une tournée qui n’est pas encore prête de s’achever comme en témoigne cette sélection en compétition à Gérardmer pour le compte de cette 24e édition. Film de genre minimaliste que ce soit en terme de décor (l’intérieur d’un immeuble comme cadre unique), de protagonistes ou d’effets horrifiques, Under the shadow se charge de privilégier son ambiance avant toute chose. L’arrière-plan politique sous forme de blâme à l’encontre de l’islamisme radical dans un contexte de conflit entre l’Iran et l’Irak qui agita la décennie 80 donne un cachet supplémentaire à la production. Le choix de cet environnement lui permet de se détacher du statut trop conformiste auquel on pourrait de prime abord la dédier (une mère et sa fille confrontées à un esprit maléfique, ici le djinn, cela nous rappelle Mister Babadook, Grand Prix 2014 à Gérardmer, qui fut une très agréable surprise).
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En nous exposant de multiples informations sur le personnage de Shideh, mère de famille jouée par Narges Rashidi, le réalisateur n’hésite pas à égratigner la société iranienne de l’époque. On pointe ici du doigt la condition féminine établie au sein de cette société (les difficultés pour Shideh à poursuivre ses études de médecine pour un activisme passé qui n’a plus lieu d’être ou encore la scène de l’arrestation lorsque Shideh se retrouve par la force des circonstances non voilée en pleine rue) comme le refus de s’ouvrir à la culture du monde occidental (l’exemple des magnétoscopes alors interdits et qui peuvent faire l’objet de dénonciation). Le parti pris féministe se poursuit dans le désaccord entre Shideh et son mari. Ce dernier voudrait en effet qu’elle et leur fille quittent l’appartement lorsque la menace de bombardements est avérée, ce qu’elle refusera jusqu’à devenir la dernière des habitantes à quitter les lieux.
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La peur de la guerre combinée au fruit de l’imagination va donner de la matière à l’installation d’une terreur psychologique produisant l’effet attendu. Visuellement, pas d’esbroufe, et c’est tant mieux. Sur ce dernier point, le film est un véritable exemple qui prouve qu’il n’y a nullement besoin d’en faire des tonnes à l’écran (à peine quelques jump scares et une horreur insidieuse particulièrement efficace) pour faire naître la peur et élever crescendo le niveau d’inquiétude du spectateur. Sur des canevas pourtant classiques qui ont fait leurs preuves, cette incursion dans l’horreur domestique à forte tendance psychologique n’en occulte pas pour autant l’arrière-plan politique au travers de son personnage principal, mais aussi par son contexte historique. Des débuts encourageants et prometteurs pour Babak Anvari dont la carrière sera à suivre d’un peu plus près.
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