Fidelio, l’odyssée d’Alice - le test DVD

En choisissant un monde peu filmé, Lucie Borleteau réalise un film audacieux, hors des sentiers battus.

L’argument : Alice, 30 ans, est marin. Elle laisse Félix, son homme, sur la terre ferme, et embarque comme mécanicienne sur un vieux cargo, le Fidelio. A bord, elle apprend qu’elle est là pour remplacer un homme qui vient de mourir et découvre que Gaël, son premier grand amour, commande le navire.
Dans sa cabine, Alice trouve un carnet ayant appartenu à son prédécesseur. La lecture de ses notes, entre problèmes mécaniques, conquêtes sexuelles et mélancolie amoureuse, résonne curieusement avec sa traversée.
Au gré des escales, au milieu d’un équipage exclusivement masculin, bercée par ses amours qui tanguent, Alice s’expose au bonheur de tout vivre à la fois et tente de maintenir le cap…

Le film : Retour d’un film original, bien accueilli par la critique, qui brasse des thèmes et des styles différents, la partie documentaire côtoyant une histoire sensuelle. De même les dialogues oscillent-ils entre des répliques ordinaires, quelques phrases sentencieuses et le journal du disparu, très littéraire. Lucie Borleteau ne manque donc pas d’audace en dressant le portrait d’une femme libre et forte, inscrite dans un contexte rare, le monde des marins. La présence continue de la mer donne au film une ampleur inhabituelle, et nombre de détails sonnent vrai. Rares sont les œuvres à donner autant de réalisme au monde du travail, impression renforcée par le refus du studio et l’utilisation de marins comme acteurs. Si l’histoire frôle parfois le convenu, la réalisatrice excelle à montrer par de courtes séquences le quotidien de ces hommes et de cette femme isolés. On songe parfois aux grands récits maritimes du dix-neuvième siècle, mais la dimension métaphysique est remplacée, époque oblige, par une réflexion sur la chair et l’amour.

© Pyramide Distribution

Les suppléments :

Un entretien de 20 minutes entre la réalisatrice, l’actrice principale et Charlotte Garson revient sur la genèse du film et les conditions du tournage ; entre anecdotes et analyse, la discussion enrichit utilement notre vision. Deux courts-métrages de Lucie Borleteau complètent ces bonus : il s’agit de deux fables ; l’une, Les Vœux (2008, 33 minutes), faussement médiévale, qui fait penser à Rohmer, est plus intrigante et originale que réellement aboutie. L’autre, La Grève des ventres (2012, 30 minutes), séduit par des ruptures de ton et une fraîcheur confondante.

L’image :

La copie est propre, les couleurs et la lumière très naturelles, malgré un léger manque de précision.

Le son :

Beaucoup de présence ; belle restitution du travail sur les bruitages.