J’irai au paradis car l’enfer est ici
Le 19 décembre 2014
Fata morgana est un terme qui désigne le phénomène optique des mirages. Herzog nous amène à la recherche d’un paradis perdu dans un poème en images hypnotique.
- Réalisateur : Werner Herzog
- Genre : Documentaire
- Nationalité : Allemand
- Editeur vidéo : Potemkine
- Durée : 1h13mn
- Titre original : Fata morgana
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Fata morgana est un terme qui désigne le phénomène optique des mirages. Herzog nous amène à la recherche d’un paradis perdu dans un poème en images hypnotique.
L’argument : Tourné en Afrique Fata Morgana est un poème en trois temps : la creation, le paradis et l’age d’or, soutenus par les textes sacrés du Popol-Vuh (livre maya des Indiens Quichis).
Notre avis : On ne peut pas vraiment goûter au tour de force que représente ce documentaire si on ne sait pas que la plupart des objets qu’on voit au loin n’existent pas. Ou plutôt devrait-on dire qu’ils existent mais pas à l’endroit où on les voit. Ce sont des mirages. Fata Morgana est le nom qui désigne ce phénomène optique. Ce film est peut-être l’œuvre la plus poétique d’Herzog. C’est la quête en Afrique d’un paradis perdu, paradis fantasmagorique qui n’a jamais existé. Le désert filmé ne renvoie pas à l’état d’avant la chute qui serait celle d’une vision rousseauiste de l’Humanité. Le désert ici c’est le chaos. Herzog filme des charognes, cadavres de bêtes n’ayant pas trouvé d’eau. La mort est partout, jusque dans ce qu’on ne voit pas à l’écran. Il faut absolument voir le film en écoutant les commentaires du réalisateur. Lorsqu’il nous explique qu’un paysage qu’on voit est en fait le lieu où les français ont fait leur essais nucléaires, on le considère différemment. Lorsqu’on apprend les déboires vécus par le réalisateur, on prend conscience de la résonance le liant à ce qu’il filme. C’est une histoire d’’impasse. Face à la ruine du monde dit civilisé qui apparaît en pointillés via des installations pétrolifères ou de infrastructures abandonnées, il n’y a pas d’alternative. L’Afrique n’est pas le paradis qui pourrait redonner un sens à la vie. Herzog filme le chaos mais paradoxalement devant la répétition des images s’installe une forme d’hypnose mystique. C’est particulièrement sensible sur les longs défilés d’images qu’accompagnent les chansons de Leonard Cohen. Herzog est un mystique, il y a chez lui du maître Eckhardt ou du Hildgarde de Bingen (de grands mystiques allemands du Moyen Age). Une des idées des mystiques c’est que Dieu étant tout, on ne peut pas lui attribuer de prédicats (on ne peut pas dire Dieu est ceci ou cela). Ne reste alors plus de différenciation. On arrive à l’Être Suprême. On arrive aussi au Néant. Les deux se rejoignent. C’est le sens de l’alpha et l’oméga. En cherchant le Néant on cherche Dieu. Évidemment le problème c’est qu’Herzog est athée. Mais tout son cinéma n’est peut-être rien d’autre que la recherche d’un sentiment d’extase qui serait une extase athée. C’est la quête de quelque chose qui dépasse toutes les idéologies et surtout qui ne peut pas se satisfaire d’une conception matérialiste de la vie. Fata Morgana est un poème profond à la beauté mélancolique qu’on aimerait bien ne pas avoir à noter ou classifier. Mais comme on a quand même envie d’en parler, on se dit qu’on peut le faire tout en ayant conscience que ce qu’on peut écrire dessus n’épuise pas l’essence de cet étrange objet. On le conseillera beaucoup à ceux qui sont attirés par les mots comme "contemplation", "lenteur", "répétition", "spiritualité" et "extase" et pas du tout aux autres.
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