Facing Ali - La critique du film

Il est regrettable qu’un documentaire sur Mohammed Ali oublie d’évoquer véritablement l’homme et le sportif.

L’argument : Dix adversaires de Mohammed Ali reviennent sur leur combat contre le triple champion du monde.

Notre avis : L’ambition de Facing Ali est de brosser un portrait de Mohammed Ali à travers le regard rétrospectif de ses anciens adversaires, pour certains des amis. L’angle d’attaque original se distingue d’emblée des documentaires basés sur des archives, voix-off à l’appui ou d’un biopic comme Ali de Michael Mann - intéressant et pertinent au demeurant. Mais, ce qui s’annonce comme un film sur Mohammed Ali se révèle très rapidement trompeur : chaque témoin y va de son histoire personnelle et c’est le « grand déballage » sur la place publique : drogue, suicide familial, précarité, révélation mystique... Tout y passe dans le misérabilisme à outrance, la larme à l’œil, sans pudeur aucune. Pour sûr, si Pete McCormack avait rencontré un boxeur victime d’un embrigadement sectaire, manchot ou schizophrène, il l’aurait placé dans Facing Ali ! En quête de sensationnel, le long-métrage s’enfonce progressivement dans un voyeurisme malsain.

Si l’on comprend vite qu’Ali n’est qu’un prétexte pour réaliser un documentaire, on ne peut même pas dire que celui-ci traite de la boxe ! A peine est-ce une démonstration - biaisée - du sport comme moyen de sortir de son milieu social. A trop vouloir faire « pleurer dans les chaumières » et faute de documentation sur l’époque du célèbre boxeur, nos pauvres lanternes restent éteintes, insensibles à ce qui se passe à l’écran. Il est néanmoins possible de percevoir les intentions du cinéaste par les mots clé qui s’affichent, en grosses lettres blanches, simultanément aux témoignages, soulignant grossièrement « ce qu’il faut retenir ». Le même procédé s’exécute en amorce des séquences d’archives des matchs de boxe où le mot « Versus » s’affiche en lettres gigantesques. Il ne manquerait plus qu’un roulement de tambour pour être au summum de la vulgarité...

Les seuls moments de grâce sont ceux des interviews de certains témoins où les jolis plans de coupe, éclairés artificiellement par une lumière bleutée, rendent grâce à ces hommes fragiles, blessés par la vie autant que par les combats, sous leurs carrures massives. A ces moments-là, on perçoit l’essence et l’essentiel de leur discours sur la difficulté de se faire une place dans ce monde et que la boxe est, pour eux, une rédemption et un vecteur d’identité. On touche là le cœur même du message de Mohammed Ali ; là aurait été la matière véritable de Facing Ali.
Inédit en France, ce documentaire de 2009 est éventuellement à découvrir en guise d’hommage au monstre de la boxe, décédé en ce début de juin 2016.