Le 5 juillet 2017
Un entre-deux sur fond de paranoïa kafkaïenne.
- Réalisateur : Kim Ki-duk
- Acteurs : Ryoo Seung-bum, Lee Won-geun, Young-Min Kim
- Genre : Drame
- Nationalité : Sud-coréen
- Distributeur : ASC Distribution
- Durée : 1h54mn
- Titre original : Geumul
- Date de sortie : 5 juillet 2017
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Résumé : Sur les eaux d’un lac marquant la frontière entre les deux Corées, l’hélice du bateau d’un modeste pêcheur nord-coréen se retrouve coincé dans un filet. Il n’a pas d’autre choix que de se laisser dériver vers les eaux sud-coréennes, où la police aux frontières l’arrête pour espionnage. Il va devoir lutter pour retrouver sa famille...
Notre avis : Révélé à l’international au milieu des années 90, Kim Ki-duk est, tout comme Hong Sang-soo, un cinéaste qui a su s’inspirer du cinéma européen pour dépeindre son pays, et ce avant la vague des films de genre qui nous arrive de Corée depuis quelques années. Dans cette effervescence créatrice où la mode est à la rupture des codes, Kim Ki-duk a su rester droit dans ses bottes et conserver un style très naturaliste dans la conception de ses mélodrames. Avec Entre 2 rives, il s’attaque au délicat sujet de la scission de la péninsule coréenne, une problématique qu’il avait déjà traitée, avec une approche relativement similaire, quinze ans plus tôt dans The Coast Guard. Pour cela, le schéma de son intrigue est des plus simples : envoyer un Nord-coréen au sud et en imaginer les conséquences. Ce point de départ est éminemment efficace puisqu’il permet en quelques minutes de révéler la tension et la défiance qui rendent à ce jour impensable une réunification entre ces deux pays qui en furent autrefois un seul.
Il apparaît vite que le personnage principal a davantage peur de la réaction des autorités militaires en cas d’éventuel retour que de ce peut lui faire subir l’administration séoulite. Entre 2 rives se donne donc pour finalité d’illustrer à quel point les méthodes peuvent être aussi dures dans les deux camps. La démonstration se fait par une interminable succession de scènes d’interrogatoires musclés et autres manipulations mentales dans lesquelles le réalisateur peine à faire naître le moindre suspense. La thématique de l’endoctrinement est ainsi traitée de façon bavarde et l’effet miroir entre les deux idéologies se retrouve mis à mal par l’autocensure que s’impose Kim Ki-duk, qui laisse hors-champ les violences policières commises au sud alors qu’il les filme frontalement lorsqu’elles ont lieu au nord de la ligne de démarcation. De la même façon, il ne peut s’empêcher de justifier le comportement des agents du sud en rappelant l’existence d’espions venus du nord, sans reproduire cet argument dans le sens inverse. Ce patriotisme, même s’il est inconscient et maladroit, vient prendre à contre-pied le discours moralisateur de cette œuvre qui se voudrait la plus politique de la filmographie de son auteur.
L’unique scène à retenir est finalement celle où le pauvre pêcheur communiste se retrouve débarqué dans les rues marchandes de Séoul. Sa découverte abasourdie de l’opulence qui permet à cette société de consommation de mettre à la rue nourriture et autres biens de valeur, est certainement l’élément le plus intelligemment subversif de ce long-métrage, mais il n’y est malheureusement qu’anecdotique. La rencontre qu’il fait à cette occasion avec une prostituée renvoie à une problématique que semble apprécier Kim Ki-duk. Dans Bad Guy (2001), il opposait déjà amour et prostitution, c’est cette fois la notion même de liberté qu’il met en porte-à-faux avec le plus vieux métier du monde, mais, encore une fois, cette piste de réflexion sociétale reste purement marginale. Indubitablement, le cinéaste avait beaucoup à dire sur l’aliénation déshumanisante vers laquelle a mené l’antagonisme belliqueux entre les deux régimes coréens, pourtant la façon qu’il a de les mettre dos à dos pour dénoncer leur manque de considération envers un pauvre homme littéralement pris dans les mailles du filet, manque cruellement de subtilité. Il est d’ailleurs dommage qu’il faille attendre le plan final pour mesurer tout le fatalisme qui anime ce film.
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