Le 6 août 2018
Un film fleuve, biopic alangui et description magnifique de l’Amérique de la dépression.


- Réalisateur : Hal Ashby
- Acteurs : David Carradine, Ronny Cox, Melinda Dillon, Gail Strickland, Ji-Tu Cumbuka
- Genre : Drame, Biopic, Musical
- Nationalité : Américain
- Distributeur : Les Artistes Associés
- Editeur vidéo : ESC Éditions
- Durée : 2h27mn
- Box-office : 51.663 entrées Paris Périphérie
- Titre original : Bound for glory
- Date de sortie : 25 mai 1977

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– Sortie DVD et Blu-ray : le 7 août 2018
– Oscar de la meilleure photographie et de la meilleure chanson de film 1976
Résumé : Dans la petite ville texane de Pampa, en 1936, le musicien Woodie Guthrie chante les misères et les luttes de travailleurs opprimés.
Notre avis : Pendant la dépression, dans une petite ville du Texas, Woodie Guthrie chante et vivote en peignant des enseignes, dans un cadre familial plutôt étouffant. Ce sont les quelques premières minutes du film, et David Carradine prête son impeccable placidité à un personnage réel (même si cette adaptation de son autobiographie déjà « aménagée » semble à son tour prendre des libertés) et diablement intéressant. En effet cette partie, la seule dans laquelle il semble
- ©1977 United Artists. Tous droits réservés. Affiche par Tom Jung
relativement stable, définit non seulement l’époque et sa misère, mais aussi un personnage anticonformiste qui préfère de pas recevoir d’argent plutôt que de peindre une enseigne dans les couleurs voulues ou qui offre ses pinceaux à un fou et dit n’avoir pas besoin d’argent. Sa devise, écrite dès le générique, guide ses errances et ses toquades apparentes : « Il ne faut jamais dépendre de qui que ce soit ». Ni d’un employeur, ni des sponsors à la radio, ni même d’amis qui, avec les meilleures intentions du monde, conseillent des compromissions, ni, in fine, de femme et enfants. Car au fond, et malgré des rencontres nombreuses, Guthrie est incapable de rester en place et préfère s’arracher aux autres même s’il tient à eux ; d’où ce plan récurrent (et célèbre) où il chante, seul, sur le toit des trains : il n’a même pas besoin de public pour chanter.
Son parcours, qui le conduit en Californie dont, à l’instar des héros de Steinbeck, il découvre rapidement la sinistre réalité, le confronte à la violence et à l’exploitation communes : du pasteur patelin aux contrôleurs de trains, des employeurs aux producteurs de radio, c’est toujours la même oppression, toujours les mêmes
- ©1977 United Artists. Tous droits réservés. Affiche par Tom Jung
contraintes. Et de ce constat amer il veut porter témoignage avec ses chansons dont il espère qu’elles rendent les gens fiers d’eux. Changer le monde avec ses moyens propres, ne pas accepter les arrangements ni les yeux baissés. Cela donne des séquences savoureuses (la liste des chansons qu’exigent les sponsors), mais c’est la description de la misère qu’Ashby réussit le mieux : le magnifique plan-séquence dans le campement, la scène de la poussière qui envahit même l’intérieur, ou ce fugace passage pendant lequel Guthrie chante la liberté syndicale au milieu des travailleurs d’une usine, tout cela dans une esthétique qui distille avec parcimonie les couleurs et joue d’une sorte d’aura avec brio.
Biopic ? Film social ? Politique ? Road movie ? En route pour la gloire brasse divers genres au gré d’un rythme indolent, à l’image de son héros, ce qui ne va pas sans longueurs et baisses de régime (le film dure 2h30, tout de même). On aurait aimé parfois plus de mordant, et même si les intrigues secondaires contribuent à définir Guthrie (voir la rencontre avec la riche bénévole, par exemple), elles alourdissent une œuvre sympathique qui évite le lyrisme et le pamphlet avec un certain panache.
- Affiche française originale © 1977 Les Artistes Associés Distribution. Tous droits réservés.
Le blu-ray
Les suppléments :
En dehors de la bande-annonce, il n’y a à proprement parler qu’un entretien avec Jacques Vassal, spécialiste de folksong, qui parle (bien) de Guthrie plus que du film (33mn)
L’image :
Il y a bien quelques micro-parasites, un grain par moments trop épais, mais la copie retranscrit soigneusement l’esthétique affadie et brumeuse du film.
Le son :
La VO est suffisamment nettoyée pour que les dialogues, mais surtout les chansons, s’apprécient sans anicroches, compte tenu de l’âge du film : la guitare sonne bien, la voix est profonde. Même soignée, la VF est un peu datée.
Le film a été sélectionné au Festival de Cannes, en 1977, et après un démarrage en catimini (8.000 entrées en première semaine, sur Paris Périphérie), avait su devenir l’un des sleepers de l’été, finissant sa carrière parisienne à 55.000 tickets vendus.