En place - Jean-Pascal Zadi, François Uzan - critique de la série

Critique : Trois ans après le beau succès de Tout simplement Noir, Jean-Pascal Zadi confirme qu’il aime la comédie et la satire sociale. Cela lui permet de proposer un discours souvent juste sur la difficulté d’accueillir la diversité, ici les Français noirs, dans les institutions culturelles et politiques. Tout simplement Noir brillait par des dialogues sans filtre et en poussant les curseurs au-delà des espérances, mais il est difficile d’en dire autant pour En place. Un peu comme si la machine Netflix avait anesthésié l’énergie et la témérité de Zadi. Mais la question qui prévaut est celle des attentes qu’il convient d’avoir autour de la série.

En effet, il serait malhonnête d’attendre d’elle l’ambition de croquer la vie politique française et de livrer un grand discours social. Elle ne semble pas en avoir la prétention. En effet, En place se dirige autant vers la comédie familiale que le grand pastiche politique. Elle s’en sort mieux dans le premier registre que dans le second.

© Gaël Turpo/Netflix

Souvent écrite avec lourdeur, elle ne parvient pas à être suffisamment vraisemblable pour embarquer son spectateur vers l’aventure politique que vit Stéphane Blé. Les retournements de situation et les coups politiques sont soit trop attendus, soit à côté de la plaque. Reconnaissons tout de même que les auteurs racontent parfois la réalité française, du moins le veulent-ils, notamment dans l’évocation des barrières que rencontrerait un Noir dans la course à l’Élysée. Mais le discours est si appuyé qu’il en devient moins percutant. La caricature flirte avec la paresse sans s’y engouffrer. Le scénario dévoile ses coutures un peu grossières, en nous suppliant de les accepter pour qu’il puisse jouer des situations et placer quelques espiègleries. Cependant, impossible de dire que cela ne fonctionne pas.

Car au-delà du potache de bas étage (pourquoi pas ?) et d’une suspension d’incrédulité mise à rude épreuve, En place dévoile de vraies qualités. L’écriture n’est pas tout le temps, et laisse un joli champ d’expression à des comédiens impliqués. Le talent fait le reste. Poelvoorde s’en donne à cœur joie en socialiste véreux. Il compense les dialogues pas finauds par un numéro enthousiasmant, au même titre que ses partenaires. Marina Foïs s’amuse, quand Zadi et sa bande nous accompagnent gaiment en créant cette intimité qui les rend touchants. Quelques séquences sont très réussies, et des saillies verbales sortent du lot, grâce à un sens comique irréfutable.

© Gaël Turpo/Netflix

L’ensemble, bien tenu par une direction artistique pas négligée, donne un résultat de bonne facture. Il déçoit le féru de politique et d’acerbe, mais comble l’amateur de conte feel good et, comme dirait Stéphane Blé, good vibe.