"Vania, you can drive my car..."
Le 24 juin 2024
Road movie intime, Drive My Car embarque certes son spectateur dans un voyage psychologique au long cours, grâce à son art de l’ellipse et de la construction, mais n’est pas exempt de tics auteuristes.
- Réalisateur : Ryūsuke Hamaguchi
- Acteurs : Hidetoshi Nishijima, Masaki Okada, Tōko Miura , Reika Kirishima, Park Yu-rim
- Genre : Drame
- Nationalité : Japonais
- Distributeur : Diaphana Distribution
- Editeur vidéo : Diaphana Édition Vidéo
- Durée : 2h59mn
- Date télé : 25 juin 2024 21:00
- Chaîne : OCS Pulp
- Titre original : ドライブ・マイ・カー
- Date de sortie : 18 août 2021
- Festival : Festival de Cannes 2021
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Résumé : Alors qu’il n’arrive toujours pas à se remettre d’un drame personnel, Yusuke Kafuku, acteur et metteur en scène de théâtre, accepte de monter {Oncle Vania} dans un Festival, à Hiroshima. Il y fait la connaissance de Misaki, une jeune femme réservée qu’on lui a assignée comme chauffeure. Au fil des trajets, la sincérité croissante de leurs échanges les oblige à faire face à leur passé.
Critique : Découvert en France en 2015 à la sortie de son triptyque Senses, Ryūsuke Hamaguchi, ancien élève de Kiyoshi Kurosawa, était de nouveau, cette année, en compétition à Cannes, après Asako I & II, après avoir enchanté la dernière Berlinale avec Contes du hasard et autres fantaisies qui y a obtenu l’Ours d’argent.
- Copyright : The Match Factory
Comme Lee Chang-dong dans Burning, il adapte, dans son nouveau film, qui a reçu le Prix du scénario et le Prix du jury oecuménique, une brève nouvelle homonyme extraite du recueil Des hommes sans femmes d’Haruki Murakami, mais en la densifiant au moyen d’éléments issus d’autres nouvelles du recueil.
Comme son titre le suggère, Drive My Car se déroule principalement,dans une rutilante Saab 900, rouge vif, avec le volant à gauche : de fait, en raison d’un accident, Yusuke Kafuku (nom qui n’est pas sans évoquer Kafka, auteur très symbolique chez Muarakami), acteur et metteur en scène, doit être conduit chaque matin au théâtre et raccompagné chaque soir dans sa résidence insulaire par son chauffeur, la taciturne Misaki.
- Copyright : The Match Factory
Dans le huis clos de l’habitacle, pendant leurs allers-retours quotidiens et au fil des routes qu’ils empruntent, ces deux solitudes ouvrent la porte de leurs tourments : alors que la place du mort est laissée vide, ils apprennent, en échangeant à demi-mots sur leurs deuils respectifs, à se connaître l’un l’autre, mais aussi et surtout eux-mêmes. Ainsi, tandis que Yusuke écoute la voix de sa défunte épouse, qui inventait de son vivant des histoires de lamproies, récitant sur une cassette les répliques de la pièce qu’il monte, Misaki retourne sur les traces de son enfance douloureuse et de la perte de sa mère.
Brisé par le destin, le personnage principal met en scène, dans la ville martyre d’Hiroshima, une pièce dont il dira lui-même qu’elle conduit sa vie, Oncle Vania d’Anton Tchekhov, mais dans une version polyphonique où se répondent le japonais, le mandarin, le coréen et même la langue des signes, et qui constitue sans doute une manière de dire l’universalité de la douleur de survivre aux morts et la force curative des mots. Il a en outre choisi pour incarner le personnage éponyme de la pièce, un jeune acteur dont il est convaincu qu’il a autrefois entretenu une liaison avec son épouse depuis décédée et qui l’accompagnera dans son travail de deuil.
- Copyright : The Match Factory
Dans ce film peuplé par les souvenirs et les secrets, dont la mise en scène travaille sur les dédoublements et les reflets, Hamaguchi projette, en les faisant regarder dans le rétroviseur de leur vie, les traumas enfouis dans ses personnages, en restant toujours à une distance pudique d’eux et de leurs contradictions ; et révèle tout ce qui se niche entre les mots, en faisant dialoguer les silences et les non-dits.
Prenant parfois des virages inattendus, Hamaguchi conduit pour ainsi dire son film comme Misaki la voiture, avec une souplesse que finit par reconnaître Kafuku, pourtant d’abord réticent à être dépossédé du volant, et convainc le spectateur comme ses personnages qu’il faut « continuer à vivre », ainsi que le déclame Sonia à Vania dans la scène finale de la pièce, très savamment filmée par le réalisateur.
- Copyright : The Match Factory
Le film, construit sur une période de plusieurs années, dure tout de même près de trois heures, d’autant que son générique n’apparaît qu’au bout de quarante-cinq minutes, une audace qui déroutera sans doute certains spectateurs. On regrettera également que le réalisateur développe une comparaison entre la vie et le théâtre, certes directement issue de la nouvelle, mais qui, du fait qu’il s’agit d’une adaptation cinématographique, ajoute une couche interprétative supplémentaire qui complexifie excessivement le propos.
Le test DVD
Image :
Sans une débauche de moyens techniques, le rendu est bon. La qualité de la photographie est excellente.
Son :
Le son habille le film avec une justesse remarquable, et laisse la part belle autant au silence qu’à la parole.
Suppléments :
Seulement deux suppléments sont à noter mais le livret explicatif est de toute beauté :
Livret de 24 pages avec une riche iconographie :
– Note d’intention du réalisateur
– Le poids suspendu des émotions par Jérome Rivage, directeur artistique des 3 Continents
– Babel sur le rivage par Mathieu Macheret, Cahiers du Cinéma juillet/août 2021
– Entretien avec Hidetoshi Nishijima, comédien
– Biographie et filmographie de Ryusuke Hamaguchi
– Les acteurs
– Liste artistique et liste technique
Bande annonce
– Sortie DVD/Blu-ray : 1er mars 2022
Galerie Photos
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