Le 9 juin 2014
- Réalisateur : David Cronenberg
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David Cronenberg en fin de carrière ? Maps to the stars divise les critiques, mais qu’en est-il sur un plan commercial et dans la mise en perspective d’une carrière marquée par un seul franc succès public, la Mouche ?
David Cronenberg en fin de carrière ? Maps to the stars divise les critiques, mais qu’en est-il sur un plan commercial et dans la mise en perspective d’une carrière marquée par un seul franc succès public, la Mouche ?
Malgré Cannes, Maps to the stars n’a pas eu l’écho sulfureux escompté. La dernière étrangeté du cinéaste canadien, pourtant marquée par l’interprétation de Julianne Moore (qui lui a valu un prix sur la Croisette) et la présence de Robert Pattinson :178.000 entrées en 15 jours dans plus de 230 salles. C’est peu, mais la baisse en 2e semaine a été ténue. On imagine pourtant mal Maps to the stars parvenir aux 355.000 entrées de Cosmopolis qui avait obtenu, un an plus tôt, un éclairage cannois plus impressionnant, permettant à la star de Twilight de casser son image dans une oeuvre viscérale, aux propos sourds, hors des canons du cinéma commercial.
La carrière de Cronenberg peut se découper en 3 parties : l’avant Dead Zone, l’après Crash... Avant La Mouche, le cinéaste excelle dans les productions de séries B aux distributeurs indépendants qui font ce qu’ils peuvent pour exposer ses films : Frissons : parasites meurtriers (300.000) et Chromosome 3 (237.000) s’en sortent bien mieux que Rage qui doit se contenter de 24.000 entrées, en raison d’une micro sortie, et ce, malgré la présence au générique de la star du X Marilyn Chambers, vue dans Derrière la porte verte. On est alors dans les années 70. L’écho critique est quasi inexistant.
Cronenberg démarre les années 80 sur les chapeaux de roue avec Scanners qui dépasse les 598.000 entrées et qui deviendra même une franchise en vidéo. C’est la consécration pour le cinéaste stigmatisé par le sceau de la violence et de l’épouvante zarbi.
Hollywood convoite ses talents et lui permet de sortir d’un certain anonymat avec deux œuvres fortes, Dead Zone d’après l’auteur à la mode Stephen King. Un succès (737.000) produit par Dino de Laurentiis qui lui permet de passer après Kubrick, Brian de Palma ou George A. Romero... Mais c’est Videodrome qui marque tous les esprits, devenant l’essence même de ce que les fans attendent du cinéaste, en matière de métaphore, de perversion et d’étrange. Trop abscons, sûrement atypique dans son genre horrifique, le film est un échec mondial (226.000 en France), mais un hit en vidéo. Le culte Cronenberg prend de l’ampleur...
Avec La Mouche qui repart glorieux d’Avoriaz, le cinéaste connaît en 1987, le plus gros succès de sa carrière avec 2.119.000 entrées. Cela sera la seule fois qu’il dépassera le million en France. Il faut dire que ce remake de science-fiction d’une série B américaine des années 50, alors en concurrence avec le Blue velvet de Lynch, est le jalon le plus grand public de sa carrière, savoureux mélange d’émotions fortes, de romance tragique et d’effets spéciaux ravageurs. Faux Semblants, Grand Prix à Avoriaz, est un autre succès pour le réalisateur en 1989, avec 597.000 tickets vendus. Toutefois le ton donné est celui du film d’auteur, plus rigoureux, moins spectaculaire. Cronenberg adoubé par la critique n’exploitera plus que ce filon, à quelques rares exceptions.
Le début des années 90 est délicat avec les échecs du Festin Nu d’après William Burroughs (qui avait tout pour plaire sur le papier à ses fans, mais trop austère au final) et surtout M. Butterfly (101.000 en 1994) qui le fait sortir pour la deuxième fois, après l’inédit Fast company dans les années 70, hors du cinéma de science-fiction. Son cinéma a perdu en rythme, en pertinence... Il faudra attendre le scandale cannois Crash en 1996 pour que sa carrière reprenne des couleurs (585.000 entrées, l’un des succès estivaux de cette époque). La sélection à Cannes, où la polémique fait "rage", laisse entrevoir l’une des plus belles histoires d’amitié entre le festival et un réalisateur, qui reviendra à plusieurs reprises, y compris comme président du jury. Avec eXistenz l’auteur affectionne une dernière fois le cinéma de genre à la Videodrome que ses fans lui réclamaient : une promo efficace (quelle bande-annonce !) et la nostalgie propulse le film en tête des entrées en France (621.000).
Après cela, Cronenberg se fait chantre des "Cahiers du cinéma" et ne cherche plus trop à rendre des comptes à qui que ce soit. Spider, thriller cérébral dans l’esprit d’un psycho-killer, ennuie (168.000 entrées en 2002), tout comme le biopic psychanalitique A dangerous method (l’un de ses pires films !) avec 518.000 spectateurs somnolents en 2011). Que dire de l’expérience Cosmopolis, vendue par une bande-annonce putassière comme un film apocalyptique trépident (355.000) ?
Pourtant, c’est durant cette période que Cronenberg livrera deux de ses plus gros succès : A history of violence (804.000, 2005) et Les promesses de l’ombre (801.000, 2007), un diptyque de thrillers noirs avec Viggo Mortensen, devenu, à l’instar de Pattinson aujourd’hui, acteur fétiche du cinéaste (on le reverra aussi dans A dangerous method).
C’est donc dans ce contexte de filmographie en dents de scie qu’il faut replacer Maps to the stars, produit curieux d’un cinéaste à la carrière longue de 40 ans, qui n’a jamais caressé les spectateurs dans le sens du poil, demeurant, même sous contrôle apparent des studios, farouchement indépendant et cohérent, au risque de désarmer ses plus grands adeptes.
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