Le 17 novembre 2016
L’incompréhension guette. De manière presque insondable, de ses premiers épisodes bancals et bien peu passionnants, Cromo s’est relevé, avec tous ses constituants à l’unisson, pour surprendre le spectateur par sa force atmosphérique. On ne comprend pas vraiment ce qu’il s’est passé. Mais on y a adhéré.
- Acteurs : Moro Anghileri, Guillermo Pfening, Germán Palacios , Emilia Attias
- Genre : Drame, Thriller
- Nationalité : Argentin
- Chaîne de TV : Ciné +
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– Retrouver "L’intégrale Cromo" en replay
– Cromo est à retrouver en intégralité sur CINE+ A LA DEMANDE dans le cadre de L’Autre Festival
Résumé : Valentina, biologiste, prélève des échantillons d’eau dans une réserve naturelle du nord de l’Argentine. Elle les envoie pour analyse. Le lendemain, son corps est retrouvé sans vie dans les marécages. Son mari, Diego, et son amant, Simon, mènent l’enquête…
Notre avis : Cas très particulier que ce Cromo...
Telle une règle établie, on affirme parfois que dans l’optique de déterminer si l’accroche entre une série et son spectateur va s’opérer, il faut au minimum lui accorder le bénéfice du doute sur trois épisodes. Dans le contexte de la série argentine, ces trois là (en particulier les deux premiers) ne laissent que bien peu d’informations optimistes, d’espoirs, quant à ce qu’il va suivre. Pourtant, il faut s’efforcer, voir plus loin que ces bases timides et boiteuses, en constante recherche du ton à adopter, où la mise en scène auteurisante au possible vient écraser le potentiel dramatique, où les acteurs peinent à nous faire croire à quoi que ce soit, et surtout pas à leur amitié et relation avec la femme de l’un d’entre eux, problématique lorsque le décès de cette dernière provoque l’enclenchement réel de l’intrigue. Pas d’un seul coup, mais de manière fortement exponentielle, assez pour questionner le spectateur sur cet important basculement de qualité bien perceptible, la série gagne en confiance, quasiment miraculeusement, jusqu’à aboutir à ce qu’elle tentait en vain d’instaurer sur ses premiers épisodes : une atmosphère oppressante et lourde.
- Copyright : TV Pública
La sève de Cromo ne réside pas tant dans son intrigue que dans la manière millimétrée de la mettre en scène. En soit, dans les mains de réalisateurs moins convaincus et attachés au projet que Lucía Puenzo, Nicolás Puenzo et Pablo Fendrik, cette enquête sur fond de scandale écologique se serait rapidement entichée d’encombrantes limites. Corruption, chantage, menace, mise sous silence, patron sans scrupule, quelques décès par ci par là... Rien de bien surprenant, d’autant plus que l’intrigue joue carte sur table en dévoilant le véritable visage de tous ses acteurs, et ce avant même de passer le cap des deux heures de la série, dévoilant au spectateur les responsables du décès de Valentina, une biologiste environnementale. L’intérêt est donc ailleurs, à chercher du côté du déploiement de ces constituants, intransigeant et au naturel implacable, notamment et tout particulièrement dans les nombreux flashbacks, répondant à une logique narrative, soit scénaristiquement pertinente (un personnage raconte à un autre ce qu’il sait), soit psychologiquement pertinente (le reflet de l’état mental d’un personnage). Cromo axe son récit sur ses différents protagonistes, dans un camp comme dans l’autre, si bien qu’elle passionne par cette humanisation des enjeux, avec ce grand paradoxe d’une population atteinte sanitairement par cette eau bourrée de chrome, mais qui n’osent dénoncer la tannerie fautive parce qu’elle soutient à elle seule l’économie du village.
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Pour appuyer l’ambivalence du propos, Cromo se repose sur son casting dont la force monte crescendo. Si certaines incarnations demeureront agaçantes malgré quelques séquences fortes et une mise en danger frontale de ces dernières, la légitimité de leur point de vue, de leurs actions, n’en pâtiront étonnement que très peu. On ne les apprécie pas tous, mais on les comprend. On les comprend parce que les réalisateurs les font évoluer (pour la plupart) dans un monde âpre, bien loin des grandes villes du pays (guère reluisantes également soit dit en passant), et parviennent à nous transmettre l’aridité de ce monde isolé répondant à la loi du plus fort. Avec sa photographie déroutante et son travail musical incroyable (on fera exception du générique de fin), Cromo accable par son écrasante chaleur et sa sécheresse désolante, caractéristique de Corrientes (enfin, un petit bled à côté plutôt). Alternant entre ce village et Buenos Aires, les Puenzo et Pablo Fendrik ne ménagent pas le moral du spectateur avec la représentation de ces deux mondes divergeant par bien des aspects, l’un d’une extrême moiteur, l’autre d’une extrême froideur, bleutée et désincarnée par cette vision des buildings et plus globalement par l’architecture moderne régnant dans la capitale. Dans un pareil univers, la voie de la vérité se paye par de lourd tributs, avec un pesant sentiment de défaite concernant Simon et Diego (incarné respectivement par les excellents Germán Palacios et Guillermo Pfening). Après l’engrenage infernal vient le temps du deuil. Le plus douloureux.
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