« Rome, l’unique objet de mon ressentiment »
Le 8 septembre 2023
Le sommet du péplum et le chant du cygne d’un certain classicisme hollywoodien, magnifié par l’élégante mise en scène de Joseph M. Mankiewicz.
- Réalisateur : Joseph L. Mankiewicz
- Acteurs : Francesca Annis , Elizabeth Taylor, Richard Burton, Robert Stephens, Martin Landau, Roddy McDowall, Andrew Keir, George Cole, Rex Harrison, Herbert Berghof, Grégoire Aslan, Martin Benson, Cesare Danova, Pamela Brown, Gwen Watford, John Cairney
- Genre : Drame, Biopic, Historique, Péplum
- Nationalité : Américain, Britannique, Suisse
- Distributeur : Swashbuckler Films
- Editeur vidéo : Fox Pathé Europa
- Durée : 4h06mn
- Titre original : Cleopatra
- Date de sortie : 25 septembre 1963
L'a vu
Veut le voir
Résumé : Cléopâtre. Un nom mythique pour une souveraine légendaire. Voici le fabuleux portrait de la reine du Nil, dont la beauté dévastatrice a fait trembler deux des plus grands seigneurs de l’Empire romain, Jules César et Marc-Antoine. Une relation sulfureuse, faite de pouvoir et de trahison, qui changea le cours de l’histoire à jamais.
Critique : Quand la 20th Century Fox entreprend le projet de Cléopâtre, elle se lance dans le tournage interminable de ce qui était alors la superproduction la plus coûteuse depuis Autant en emporte le vent. Le film ne rentra pas dans ses frais et fut un échec cuisant pour la firme hollywoodienne. Le grand public le trouva bavard et moins spectaculaire que Ben Hur ou Les Dix commandements. La critique regretta la compromission de Joseph L. Mankiewicz, l’un des cinéastes les plus raffinés et érudits de Hollywood (Eve, La comtesse aux pieds nus), réduit au rang de maître de chantier d’un roman-photo historique égayé de morceaux de bravoure. Le très sérieux Georges Sadoul se risqua même à un calembour dans son Dictionnaire des films, estimant qu’« au lieu de quatre heures, elle en paraissait, cette Cléo, de cinq à sept ».
- © 1963 Twentieth Century Fox. Tous droits réservés.
Certes, la première partie, axée sur le rapprochement de Cléopâtre et César, est peut-être moins aboutie, en dépit de l’excellent Rex Harrison, que le cinéaste avait déjà dirigé dans L’aventure de Madame Muir (1947) : on pourra être, en effet, agacé par les conventions d’un certain cinéma historique, basé sur les intrigues de pouvoir et d’alcôve avec sons de trompettes et déclamation théâtrale de seconds couteaux. Martin Landau, Hume Cronyn, Rody MacDowall ou Grégoire Aslan, d’une raideur toute scénique, n’échappent pas au surjeu d’un John Gielgud dans Jules César (1953), adaptation shakespearienne par le même réalisateur. Mais ces réserves sont minimes, eu égard à la beauté poignante de l’ensemble et des qualités de la dramaturgie. Avec le recul, Cléopâtre marque l’apogée du péplum et frappe par le paradoxal mélange de sobriété et de magnificence de la mise en scène, jamais étouffée par les figurants, les décors somptueux (galères, chars, palais royaux), ou les costumes : Irene Sharaff contribue ici à un apparat vestimentaire, avec une création de soixante robes pour Cléopâtre, sans compter les djellabas et les toges !
- © 1963 Twentieth Century Fox. Tous droits réservés.
Aux scènes intimistes (qui semblent le plus être associées à l’univers de Mankiewicz) succèdent quelques séquences incontournables, dont la triomphale entrée de la reine dans Rome, une danse orgiaque où une fausse Cléopâtre allume Marc-Antoine, et un combat naval final magistralement filmé. Au carrefour de ces deux tendances du film (le minimalisme et le faste), on citera une éblouissante séquence onirique, qui voit Cléopâtre consulter une voyante, le meurtre de César apparaissant en surimpression. L’œuvre doit aussi beaucoup au couple formé (dans le récit comme à la ville), par Elizabeth Taylor et Richard Burton. Les cris de jalousie ou de dépit alternant avec les témoignages d’amour semblent ironiquement autobiographiques, tout en anticipant leurs compositions dans Qui a peur de Virginia Woolf ? (Mike Nichols, 1966). Cette œuvre qui s’achève par un double suicide après une défaite militaire est elle-même un chant du cygne, celui d’un certain classicisme hollywoodien. Dès la seconde moitié des années 60, le cinéma américain commencera sa période de démystification sous l’égide des Altman, Penn et autres Peckinpah...
Galerie photos
Votre avis
Pour participer à ce forum, vous devez vous enregistrer au préalable. Merci d’indiquer ci-dessous l’identifiant personnel qui vous a été fourni. Si vous n’êtes pas enregistré, vous devez vous inscrire.
aVoir-aLire.com, dont le contenu est produit bénévolement par une association culturelle à but non lucratif, respecte les droits d’auteur et s’est toujours engagé à être rigoureux sur ce point, dans le respect du travail des artistes que nous cherchons à valoriser. Les photos sont utilisées à des fins illustratives et non dans un but d’exploitation commerciale. Après plusieurs décennies d’existence, des dizaines de milliers d’articles, et une évolution de notre équipe de rédacteurs, mais aussi des droits sur certains clichés repris sur notre plateforme, nous comptons sur la bienveillance et vigilance de chaque lecteur - anonyme, distributeur, attaché de presse, artiste, photographe. Ayez la gentillesse de contacter Frédéric Michel, rédacteur en chef, si certaines photographies ne sont pas ou ne sont plus utilisables, si les crédits doivent être modifiés ou ajoutés. Nous nous engageons à retirer toutes photos litigieuses. Merci pour votre compréhension.