Eclat norvégien
Le 11 janvier 2014
Une superbe balade personnelle et habitée sous la merveilleuse lumière norvégienne.
- Réalisateur : Rune Denstad Langlo
- Acteurs : Sven-Bertil Taube, Anders Baasmo Christiansen, Marie Blokhus, Frederik Meldal Nørgaard, Tobias Santelmann
- Genre : Drame, Comédie dramatique
- Nationalité : Norvégien
- Durée : 1h33
- Titre original : Jag Etter Vind
- Plus d'informations : http://www.arrasfilmfestival.com/
- Festival : Festival d’Arras
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Une balade mélancolique très personnelle brassant les thèmes du deuil, des destinées, de l’acceptation de soi ou encore des échanges taciturnes pour finalement évoquer la Vie, tout simplement.
L’argument : Dix ans qu’Anna n’a pas vu sa famille. Quand elle apprend le décès de sa grand-mère, elle décide de retourner chez elle. La jeune femme renoue alors avec son passé et découvre des secrets bien cachés.
Notre avis : Prix de la critique au dernier Arras Film Festival, Chasing The Wind était clairement, et à juste titre, décrit par le Jury de journalistes comme le "mieux mis en scène de la sélection 2013". Effectivement, on ne peut qu’être admiratif du travail remarquable du réalisateur Rune Denstad Langlo, d’ailleurs présent pour évoquer en toute modestie son approche personnelle du sujet. Au-delà des questions émouvantes sur la difficulté des échanges familiaux ou l’assentiment des véritables aspirations, le film du norvégien sonne vrai à chaque plan, probablement parce qu’il est autobiographique et éminemment personnel. Entrecroisant les problématiques sans jamais nuire à sa personnalité, la réalisation navigue tranquillement vers des pauses contemplatives incarnées... mais néanmoins à mille lieux de tout sentimentalisme ou poncifs intello-réflexifs émaillant souvent ce type de récits.
Chasing the Wind s’inscrit dans la continuité de Nord, précédente réalisation de Denstad Langlo qui évoquait déjà l’itinéraire vers les responsabilités adultes, mais sur un ton beaucoup plus humoristique. Cette fois, le norvégien jette un regard tendre sur des êtres désillusionnés : le personnage du grand-père, en dépit de son habillage revêche, n’est qu’un homme abîmé par un amour puissant mais sinueux envers sa femme décédée. Le déroulement certes linéaire du métrage est systématiquement transcendé par des instants parallèles de questionnements, dont l’unique finalité est le rattachement à la problématique très humaine : si j’avais orienté ma vie vers A, au lieu d’aller vers B, où serais-je aujourd’hui ?
De ce récit de deuil illusoirement classique, Rune Denstad Langlo va trouver le parfait équilibre entre mise en scène dépouillée méditative et rigueur formelle qui emplit l’œuvre de sous-textes très cinématographiques : la scène de découpe du bois pour le cercueil, au caractère sexuel simplement convenu par l’utilisation magistrale du son off, illustrerait à merveille les essais de Michel Chion tels que Le son au cinéma. De ces poses jouant sur la bienséance des apparences, le metteur en scène va crédibiliser l’histoire d’amour impossible entre son héroïne et son amour de jeunesse le temps d’une plongée dans l’intime renversante de justesse. Comme beaucoup de personnages féminins du Arras Film Festival, Marie Blokhus compose un superbe portrait de femme pertinent ; elle mériterait même le prix de la meilleure interprétation de cette édition 2013.
Dans Chasing The Wind, une simple scène de découpe de pain peut se métamorphoser en aveux entre un grand-père et sa-petite fille, alors qu’ils étaient incapables de communiquer dans la séquence précédente. Au-delà du sens de mise en scène aussi sobre que racé, ce qui rend le film si brillant, c’est le sentiment de véracité permanent. Toute proportion gardée, on retrouve chez Langlo un souci du détail qui transmue le décor en acteur comme chez Visconti. De l’aveu même du réalisateur, il a fait construire le cercueil du film par son frère alors qu’ils étaient tous deux en deuil de leur grand-mère. De cette succession de détails en apparence anodins, le montage précis achève de colorer le film d’une authenticité qui rappellera forcement à tout un chacun sa propre expérience. Sans nul doute l’un des dix meilleurs films de 2013, malheureusement toujours pas distribué en France. A bon entendeur…
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