Le 4 septembre 2017
Une tentative audacieuse, qui refuse les facilités pour se concentrer sur des problèmes terriblement humains, et emporte l’adhésion pour peu qu’on se prête au jeu.
- Réalisateur : Jean-Christophe Sandt
- Acteurs : David Meslet, Anne Mino, Amandine Claudy
- Genre : Drame
- Nationalité : Français
- Distributeur : Saint-André des Arts
- Durée : 1h45mn
- Date de sortie : 13 septembre 2017
L'a vu
Veut le voir
Résumé : Vincent vit le bonheur auprès de sa femme et ses enfants jusqu’au jour où un événement tragique vient tout bouleverser. Laurence, le bonheur, elle voudrait bien y goûter : c’est pourquoi elle décide de prendre son destin en main. Mais que se passe-t-il dans la vie de gens lorsque l’amour a disparu ? Le bonheur retrouvé serait-il à la croisée des chemins ?
Notre avis : Pour son premier film, Jean-Christophe Sandt n’a pas vraiment choisi la facilité, ni par les thèmes ni par leur traitement ; en croisant deux itinéraires qui ne se rejoignent que deux fois, deux itinéraires presque inversés (Vincent, bien dans son couple, devient veuf, alors que Laurence quitte un quotidien étouffant), il choisit de limiter les événements pour se concentrer sur des discussions, la plupart du temps duelles, qui se transforment en des exercices plus ou moins réussis de maïeutique. Pas ici ou presque de dialogues anodins, les personnages ne se demandent pas le sel, ne perdent pas de temps avec les banalités ; ainsi quand Vincent aborde Anne, à la fin d’une soirée, évacue-t-il rapidement la question de son emploi pour lui demander qui elle est vraiment. Sa quête, complexe, nécessaire et annoncée en préambule par un jeu de piste amoureux, le pousse d’ailleurs sans cesse à interroger les autres, de manière souvent décalée. Mais sans doute est-ce tout le film qui est décalé, dans le jeu des acteurs, dans les dialogues tout sauf naturels, comme dans l’impression de piétinement : significativement, il se clôt quand pourrait arriver ce qu’au fond on attendait.
- Copyright Cinéma Saint-André des Arts
Mais le corps du film dépasse un marivaudage de jeunes intégrés dans la société ; cousin lointain de Rohmer, Sandt refuse quasiment les décors (à l’écran, ce sont essentiellement des visages, et s’il y a un panorama, comme dans la fin rêvée, il devient sujet d’interrogations), utilise avec parcimonie musique et profondeur de champ : l’humain, rien que l’humain. Mais un humain embourbé dans un monde sans modèle (Vincent ne cesse de les chercher à travers ses questions, mais ses interlocuteurs le renvoient à son moi improbable, que justement il tâtonne à définir), en perpétuelle oscillation : « comment vivre l’après ? » se transforme vite en « comment vivre ? » . A ces questions s’en ajoutent bien d’autres, sur le rôle qu’on se croit obligé de tenir, sur les conventions, la culpabilité, la liberté, le vrai, le faux, que compliquent encore les restes d’une vulgate psychologisante. En effet les personnages passent leur temps à définir ce qu’ils croient ou ce qu’ils ressentent par des expressions toutes faites ou des sentences ; Vincent et Laurence, chacun de son côté, font l’expérience d’une recherche solitaire, âpre sans doute, mais qui ne peut se satisfaire de réponses générales. Autrement dit, le film peut se voir comme une tentative de retrouver un essentiel fardé par des lieux communs qui empêchent d’y accéder. Il n’est pas sûr que Vincent et Laurence y parviennent, mais c’est la quête elle-même qui intéresse le cinéaste, et chaque rencontre, chaque discussion, participent de cette entreprise démesurée.
- Copyright Cinéma Saint-André des Arts
Les acteurs sont lumineux dans des rôles complexes et se sortent à peu près de dialogues impossibles, très écrits, mais qui correspondent à l’économie générale du film. Ils arrivent à rendre concrètes des expériences théoriques, avec une distanciation qui peut gêner au début, mais trouve ensuite sa légitimité. Car rien ici ne vise la larme facile, le sentimentalisme. Même la mort de Mathilde, qui aurait pu donner lieu à une émotion justifiée, est expédiée en ellipse. Et pourtant de ce film aussi sincère qu’exigeant, se dégage un charme tenace qui tient sans doute aussi au refus des concessions ; Sandt parvient par ses questionnements incessants à interpeller le spectateur, à l’impliquer dans une recherche abrupte et stimulante. Si on renonce à l’idée d’un divertissement léger et si on accepte les partis-pris ardus, C’était maintenant devient une expérience singulière, enrichissante, que l’on a envie de partager avec des personnes de confiance.
- Copyright Cinéma Saint-André des Arts
Galerie Photos
Votre avis
Pour participer à ce forum, vous devez vous enregistrer au préalable. Merci d’indiquer ci-dessous l’identifiant personnel qui vous a été fourni. Si vous n’êtes pas enregistré, vous devez vous inscrire.
aVoir-aLire.com, dont le contenu est produit bénévolement par une association culturelle à but non lucratif, respecte les droits d’auteur et s’est toujours engagé à être rigoureux sur ce point, dans le respect du travail des artistes que nous cherchons à valoriser. Les photos sont utilisées à des fins illustratives et non dans un but d’exploitation commerciale. Après plusieurs décennies d’existence, des dizaines de milliers d’articles, et une évolution de notre équipe de rédacteurs, mais aussi des droits sur certains clichés repris sur notre plateforme, nous comptons sur la bienveillance et vigilance de chaque lecteur - anonyme, distributeur, attaché de presse, artiste, photographe. Ayez la gentillesse de contacter Frédéric Michel, rédacteur en chef, si certaines photographies ne sont pas ou ne sont plus utilisables, si les crédits doivent être modifiés ou ajoutés. Nous nous engageons à retirer toutes photos litigieuses. Merci pour votre compréhension.