Yasmina et les mangeurs de patates - La chronique BD

Yasmina vit seule avec son père au sommet d’un immeuble. Quand son père rentre à la maison le soir, c’est tout l’immeuble qui le sent arriver, car sa veste imbibée de l’odeur de friture de son travail, embaume les escaliers.

Yasmina, elle navigue dans un tout autre monde. Son pêché mignon à elle, c’est la gastronomie.

Pour elle pas de fast-food, mais une passion saine pour la grande cuisine : les goûts, les jolies choses bien faites et en finesse. Chaque midi elle prépare la gamelle de son papa, à l’ancienne… Ses collègues en sont jaloux sans pour autant lâcher d’une frite leur plateau de patates bien grasses taillées en bâtonnets. Belgitude oblige, la frite est classée au patrimoine de l’Unesco chez nos voisins européens !

Wauter Mannaert/ Dargaud

La petite a sa grande vie : après l’école elle passe voir ses amis Cyrille et Marco qui cultivent leur jardin ouvrier chacun à sa façon. Le plus ancien à grand coup de Rondup et le plus jeune façon bobo-écolo-bio. Yasmina se délecte de la richesse des récoltes et de manger des légumes, ce qui pour une enfant n’est pas banal !
Jusqu’au jour où leur paradis est rasé. Le microcosme amical en prend un coup mais va vite se ressouder autour du mystérieux comportement de leurs congénères.

L’homme est devenu un loup pour l’homme… En quelques jours, des situations dramatiques et cocasses surviennent. Que se passe-t-il ? Pourquoi tant d’agressivité partout dans la ville ?

Wauter Mannaert/ Dargaud

La suite est à découvrir dans ce fabuleux plaidoyer pour un retour aux valeurs sûres : la nature bienfaitrice, le respect de ses cycles et la diversification alimentaire.
En se prenant pour un dieu tout puissant, l’homme tel un être avide et sans scrupule, cherche à rendre plus docile les consommateurs. Il se rend lui-même dépendant du prêt-à-manger, de l’industrie de masse et de la culture intensive. L’auteur nous prévient des dangers de la malbouffe (Saint Jean-Pierre Coffe priez pour nous) car nous devenons - sans nous en rendre compte - dépendants des gouts formatés, comme un troupeau d’animaux.

Wauter Mannaert/ Dargaud

Le dessin est léger, frais et entraînant, allant crescendo jusqu’à faire bouillir la marmite à stress à plusieurs reprises.

Yasmina par son courage et sa ténacité trouvera peut-être une nouvelle recette bien à elle pour protéger le patrimoine gustatif des humains et la richesse de notre planète.
Mais la revanche et les solutions pourraient naître avec la génération à venir, semblant bien plus sage que les « vieux sages » qui se refilent depuis toujours la patate chaude en matière de « manger sain » et cherchent toujours à édulcorer le problème de la pollution mondiale.